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Comment doper son entreprise avec de l’externalisation

Bien différente de l’image de centre d’appels « low cost » qu’on s’en fait parfois, l’externalisation peut être un moyen de développer des compétences et d’intégrer une nouvelle expertise. Une voie vers plus de compétitivité pour les entreprises.



« Déjà en 2008, 45% des entreprises françaises avaient franchi le pas de l’externalisation, souligne Delphine Kursner, consultante en optimisation de la ressource humaine au sein du cabinet Orghom. À 49% pour leur système d’information et parfois de télécommunications, à 48% pour leur logistique, à 30% pour leurs ressources humaines et à 17%pour leurs ventes. » Au niveau mondial, l’externalisation des fonctions IT (Information Technology) est passée de 43% en 2013 à 60% en 2014. D’après le cabinet Deloitte, elle progresse chaque année de 12% à 25% suivant les domaines d’activité. « La digitalisation fait que l’externalisation se renforce, confirme Dominique Vienne, président du groupe Convergence, opérant dans l’externalisation de la gestion énergétique. Mais le marché de La Réunion manque de maturité dans ce domaine. Les chefs d’entreprise l’ont adoptée en matière d’infor-matique, en comparaison du coût d’un serveur en interne, et en matière de ressources humaines pour l’essentiel. » 
Le retard d’équipement en très haut débit n’a pas favorisé ces évolutions. « Le maillon faible est la connexion du dernier kilomètre pour beaucoup d’entreprises », constate Joseph Christophi, gérant de Maneva Conseil. 

CONSERVER UN CONTRÔLE DE LA QUALITÉ

Pour répondre aux besoins croissants de compétitivité, le choix de confier à un prestataire la responsabilité d’une fonction non stratégique permet à l’entreprise de se focaliser sur son cœur de métier. « L’externalisation est aussi un moyen de rendre stratégique chaque élément de la chaîne de valeur », ajoute Dominique Vienne. Le prestataire effectuant la mission dans le cadre de son cœur de métier, il y ajoute de la performance et une maîtrise des coûts. Des coûts fixes deviennent ainsi des coûts ajustables, le prestataire supportant la charge des variations d’activité. Des dépenses en équipements et en charges de personnel laissent place à des forfaits de prestations. On passe des investissements aux dépenses opérationnelles. « Parmi les entreprises qui optent pour l’externalisation, 49% le font pour réduire les coûts, mais elles sont aussi 39% à rechercher des gains en efficacité et un recentrage sur leur métier, relève Delphine Kursner. Le challenge est alors d’identifier le meilleur prestataire pour 67% des dirigeants, de contrôler la qualité de la prestation (66%) et d’évaluer son coût global (46%). » Les rapports fournis par le prestataire se révèlent particulièrement importants pour ne pas renoncer au contrôle de la qualité, à partir de tableaux de bords basés sur des indicateurs de performance. Pour la force de vente, par exemple, l’externalisation apporte un regard extérieur et doit pouvoir fournir des rapports très détaillés sur la perception des produits dans leur environnement de vente. 
 

Delphine Kursner, consultante en optimisation de la ressource humaine au sein du cabinet Orghom : « L’externalisation ne se fait pas non plus sans risque. La perte de savoir-faire, à terme, est un inconvénient. » Philippe Stéphant
Delphine Kursner, consultante en optimisation de la ressource humaine au sein du cabinet Orghom : « L’externalisation ne se fait pas non plus sans risque. La perte de savoir-faire, à terme, est un inconvénient. » Philippe Stéphant

UN PHÉNOMÈNE CLASSIQUE DE BALANCIER

Dans un premier temps, l’augmentation de la compétence, dans le champ d’une mission externalisée, échappe à l’entreprise. « L’externalisation ne se fait pas non plus sans risque. La perte de savoir-faire à terme est un inconvénient », souligne Delphine Kursner. Dans certains cas, cependant, la prestation permet de mieux accompagner le management de l’entreprise et d’aboutir à la formation de personnels qui s’en chargeront en interne. « En apportant notre savoir-faire, nous avons donné envie aux entreprises d’adopter de la méthode et du process, partage Nathanaël Juricic, directeur d’Optimark Océan Indien, spécialisé dans la force de vente et le marketing. Il arrive fréquemment que nos clients embauchent nos intervenants. » Une telle synergie peut trouver son accomplissement dans un phénomène classique de balancier. « Un élément clé de la compétitivité des entreprises est la capacité à externaliser pendant quatre à cinq ans pour bien comprendre le métier concerné, puis à réinternaliser la fonction pendant plusieurs années », analyse Dominique Vienne. 
 

Nathanaël Juricic, directeur d’Optimark Océan Indien, spécialisé dans l’externalisation de la force de vente et du marketing : « Il arrive fréquemment que nos clients embauchent nos intervenants. »  Philippe Stéphant
Nathanaël Juricic, directeur d’Optimark Océan Indien, spécialisé dans l’externalisation de la force de vente et du marketing : « Il arrive fréquemment que nos clients embauchent nos intervenants. »  Philippe Stéphant
 

L’ÉVOLUTION IMPORTANTE DE LA FONCTION IT

Une première génération d’externalisation visait la maîtrise des coûts et une réduction de personnel. Une seconde génération fait appel à des ressources externes pour une mise à jour nécessaire des compétences. Avec son évolution importante, la fonction IT (Information Technology) devient stratégique. Elle fait partie du cœur de métier de l’entreprise mais a besoin d’expertise. « Une troisième génération s’est développée dans le contexte de forts enjeux compétitifs où les innovations sont constantes et permettent de valoriser un avantage concurrentiel dans la réponse au client, observe Delphine Kursner. Dans ce contexte, des entreprises ont intégré les fournisseurs dans leur chaîne de valeur, jusqu’à externaliser des activités de leur cœur même de compétences. » On n’observe pas encore à La Réunion d’externalisation extrême par laquelle l’entreprise se décharge de l’aspect matériel de la production et ne réalise plus en interne que le design, le marketing et l’aspect commercial. Ce qui est le cas, par exemple, d’Apple et de Coca-Cola dans des secteurs où la marque joue le rôle essentiel. C’est aujourd’hui la gestion externalisée de l’image de l’entreprise et de sa présence sur les réseaux sociaux qui prend de l’essor à La Réunion. Il s’agit de se donner un avantage concurrentiel dans le délai de réponse au client et de proposer des produits adaptés plus rapidement que les entreprises concurrentes.
 

Au niveau mondial, l’externalisation des fonctions IT (Information Technology) est passée de 43% en 2013 à 60% en 2014. D’après le cabinet Deloitte, elle progresse chaque année de 12% à 25% suivant les domaines d’activité.  Stocklib/Kheng Guan Toh
Au niveau mondial, l’externalisation des fonctions IT (Information Technology) est passée de 43% en 2013 à 60% en 2014. D’après le cabinet Deloitte, elle progresse chaque année de 12% à 25% suivant les domaines d’activité.  Stocklib/Kheng Guan Toh
 

 

DÉFINITION DE L’EXTERNALISATION
L’externalisation (outsourcing en anglais) correspond au transfert d’activités d’une entreprise vers un prestataire externe spécialisé dans un domaine ou offrant des capacités de production supérieures. Il s’agit souvent de la sous-traitance d’activités ne correspondant pas au cœur de métier de l’entreprise et lui permettant alors de se recentrer sur celui-ci.
L’ÉMERGENCE DU « FACILITY MANAGEMENT » 
Le « Facility Management » est encore très peu développé à La Réunion. Au sein du groupe Convergence, la société Corem a créé l’entité Cofaci qui assure cette prestation multi-services et multi-techniques pour le fonctionnement et la maintenance d’un ensemble immobilier. « Nous œuvrons à faire émerger ce marché, confie Rahim Juhoor, gérant de Corem. Il s’agit de gérer, de façon externalisée, l’exploitation d’un bâtiment et sa maintenance au quotidien. » Cofaci gère ainsi, à Sainte-Clotilde, le Centre d’affaires Cadjee et l’immobilier d’entreprise de l’amé-nageur Sodiac. « L’enjeu est de maintenir la valeur actualisée nette du patrimoine (VAN) alors que le donneur d’ordre se concentre sur ses activités métier », explique Rahim Juhoor. En dehors de la maintenance et d’un audit du bâtiment, les missions peuvent s’étendre à la gestion des locataires, de l’accueil, des livraisons, du stationnement et à toute autre activité souhaitée par le donneur d’ordre.  
INCUB’GE MUTUALISE LES RECRUTEMENTS
Les groupements d’employeurs (GE) visent à mutualiser le recrutement de collaborateurs dans différents métiers pour des missions d’assistance ponctuelle. Des entreprises d’un même secteur d’activité organisent ainsi une gestion externalisée en ressources humaines, confiée à l’administrateur du GE. « Nous avons déployé huit groupements d’employeurs à La Réunion, informe Béatrice Althiery, directrice du Pôle politique économique de la Chambre de commerce et d’industrie. C’est une mutualisation de moyens dans des métiers très variés : fonctions supports, RH, comptabilité, gestion, BTP et maintenance industrielle. » Les collaborateurs recrutés partagent des missions récurrentes et des interventions d’appoint. « Nous avons créé un incubateur de groupements, Incub’GE, et notre plan d’action pour 2016 prévoit de favoriser la création de GE dans l’industrie. »