Décès à 91 ans de l’ancien Premier ministre sir Anerood Jugnauth
« Le pouvoir ne se partage pas ! », cette célèbre citation de l’ancien président français, Jacques Chirac, résume bien le parcours de l’animal politique qu’était sir Anerood Jugnauth (SAJ). Clin d’oeil cynique de l’Histoire, le décès de cet animal politique, qui a forcé le destin de son pays pour en faire un véritable miracle économique, survient au moment même où la petite île de l’océan Indien traverse la pire crise économique et sociale depuis son indépendance.
Sir Anerood Jugnauth, plus connu comme SAJ, a été, sans aucun doute, l’un des hommes politiques mauriciens les plus importants de l’histoire post-indépendance de l’île. Il aura été successivement ministre, Premier ministre durant cinq mandats et président de la République durant deux mandats. Personnage complexe, habité par l'ambition, à la fois homme de lumière, carré, simple, chaleureux, fan de football britannique et un homme de l'ombre passionné par la spiritualité, dur, secret, imprévisible et paradoxalement calculateur qui ne s'embarrasse pas de sentiments pour obtenir ce qu'il veut. La facétieuse presse mauricienne le surnommera d'ailleurs de façon élégante Rambo.
En un mot : une bête politique dont même ses pires ennemis saluent le rôle dans le décollage économique de Maurice.
Il n'a pas trente cinq ans lorsqu'il accède aux plus hautes charges de l'État en devenant, en 1965, ministre du Développement dans le gouvernement de Seewoosagur Ramgoolam, qui deviendra, trois ans plus tard, le premier chef de gouvernement de l’ile indépendante. Cette même année, le jeune Anerood Jugnauth participe à la conférence constitutionnelle à Londres. Cette conférence est fondamentale car elle va conduire à l’indépendance de Maurice mais dont le prix à payer a été, selon de nombreux historiens, l’excision des Chagos de son territoire…
Lors des élections législatives de 1982, Anerood Jugnauth, membre imminent du MMM (Mouvement militant mauricien), est un des maîtres d’oeuvre du fameux 60/0, soit 60 députés pour le nouveau pouvoir contre aucun pour le parti sortant, qui balaie le parti Travailliste de Seewoosagur Ramgoolam.
En 1983 surviendra la cassure de parti Mauve, le MMM, et la création du MSM (Mouvement socialiste militant) qui deviendra la véritable machine de guerre au service de SAJ.
Élu premier ministre, il décide la création de la zone franche, en faisant venir des investisseurs asiatiques, en particulier hongkongais effrayés par la rétrocession à la Chine communiste, en assure ainsi indirectement l’essor du tourisme et de l’hôtellerie.
SAJ assure le plein emploi dans l'île et en fait un modèle salué internationalement. Maurice écrit alors un nouveau chapitre de son histoire économique…