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Du leadership au e-leadership : le numérique change-t-il la donne ?

Compte-rendu d’une conférence organisée à Paris par G9+ (qui représente 50 000 professionnels du numérique), en partenariat avec La Poste et le CIGREF (Réseau de grandes entreprises).  

 Les technologies de l’information et de la communication sont de plus en plus utilisées par les entreprises pour innover et conquérir de nouveaux marchés. Elles ont besoin de dirigeants qui soient à l’aise dans leur métier d’entrepreneur, dans leur fonction de manager, ayant du charisme mais aussi, et surtout, une bonne maîtrise des outils numériques. L’e-leader est cet animal, encore aujourd’hui rare, qui se trouve à la croisée de ces caractéristiques. Il a une appétence particulière pour son métier mais aussi pour les « choses » technologiques et numériques, c’est un « IT savvy » (qui maîtrise la technologie). Comme l’explique Nils Fonstad, directeur associé du Lab de l'INSEAD, ses compétences peuvent se représenter sous la forme d’un « T » : elles sont « horizontales », liées au développement d’organisations avec une expertise transversale qui touche toute l’entreprise sur les aspects innovation, gestion du changement, développement de visions stratégiques, expérimentations avec tous les acteurs de l’entreprise. Elles sont aussi « verticales », liées à l’usage maîtrisé des outils numériques et des services qu’ils permettent d’offrir aux individus comme à l’entreprise. En son temps, le leader emmenait son entreprise à la conquête des marchés, le e-leader fait de même mais en utilisant l’effet démultiplicateur des outils numériques. Il a changé sa posture traditionnelle en développant des fonctions de manager et de leadership qui tirent parti des médias sociaux et permettent de toucher beaucoup plus de monde dans un temps plus court.
 

LA TRANSFORMATION NUMÉRIQUE DES MANAGERS

 
« Les nouveaux outils comme Twitter permettent de passer du « trop d’info » à la « smart data » : je sélectionne ce qui m’intéresse. » (Pascal Dasseux, COO de Havas Media). Ces outils sont en transformation perpétuelle et nécessitent un suivi et une adaptation permanente. Bien qu’à la base ce soient des outils informatiques, ce sont avant tout des outils qui s’adressent à tous, permettent de relier les gens et d’atteindre de nouveaux espaces jusque-là inaccessibles.
« Les outils sociaux permettent de rencontrer des gens qui ont les mêmes besoins et de démultiplier la capacité d’apprentissage. Ils fonctionnent sur le principe du « Je donne donc je reçois. L’interaction est donc essentielle. » (Frédéric Charles, directeur stratégie et gouvernance SI de la Lyonnaise des Eaux).
Essentiellement utilisés en entreprise pour un usage métier, comme le mail en son temps, les outils sociaux bousculent les hiérarchies et poussent à la mise en place d’organisations où l’échange d’idées peut se faire de manière transversale à l’entreprise : des communautés où tout le monde est autorisé à avoir des idées ! Pour l’e-leader, culturellement, partager est donc très important, mais de manière professionnelle, ouverte et honnête. Le management à l’heure du numérique transforme donc l’entreprise. Le management traditionnel reposait sur le légal et l’humain, le numérique y ajoute la dimension technologique en créant un nouveau levier d’action et de suivi pour l’entreprise.
« Il n’y a pas de différence dans la nature du leader et de l’e-leader. Dans les deux cas, il s’agit de façonner une image, d’entraîner, de faire adhérer et de développer ses collaborateurs. Dans ce cadre, les médias sociaux n’ont rien changé. Le rôle du leader n’a pas changé. En revanche, les outils permettent l’ubiquité et de toucher beaucoup plus de monde. » (Sylvie Joseph, directrice transformation numérique de La Poste).
 

NE PAS ÊTRE SUR LES MÉDIAS SOCIAUX, C’EST RISQUER DE PERDRE SON LEADERSHIP

 
Aujourd’hui, très peu de dirigeants du CAC 40 sont sur Twitter et les réseaux sociaux. Or, nous vivons à l’époque du « real time data » et il devient impensable qu’un dirigeant ne soit pas présent dans le numérique. En tant que leader, il doit expliquer et insuffler une vision qui ne peut aujourd’hui ignorer le numérique, pour comprendre ce que font les concurrents, mais aussi la valeur des pépites du Web, les nouvelles PME, etc. pour pouvoir aussi conclure des alliances stratégiques créatrices de business.
« Twitter c’est comme une grande rivière, tu mets la main dedans et tu récupères des gouttes d’info. » (Alexandre Malsch, directeur général de Melty)
Le tissu économique français doit adopter les outils numériques et les médias sociaux. Cela devrait permettre d’accélérer la croissance économique. Un patron du CAC 40 comme d’une PME doit être sur les médias sociaux au risque de perdre son leadership et, comme le leadership ne se définit plus aujourd’hui sans les outils numériques, de ne pas être un e-leader.
Du côté des dirigeants politiques, la révolution est aussi en marche. Le terrain était favorable car les hommes politiques ont un rapport particulier au public et au citoyen. Ils n’ont peut-être pas un temps d’avance dans la pratique, mais sont pleinement conscients qu’il faut y aller, et vite. Et pour cela, il faut pratiquer et mouiller la chemise, agir dans la durée et adopter les codes de chaque réseau social. Twitter par exemple change le mode de dialogue : il est difficile de faire de la langue de bois en 140 signes. Si de nombreux hommes politiques animent leurs propres réseaux, seuls ou avec une équipe, en revanche, les partis politiques semblent en retard pour utiliser les médias sociaux en matière de communication.
« Le soutien numérique au politique n’est pas évident, « liker » (signifier « j’aime » – Ndlr) sur Facebook est trop visible auprès des amis et de son écosystème personnel. En France, on hésite donc à l’utiliser pour ne pas trop se dévoiler. » (Matthieu Lamarre, directeur de la communication du MODEM). Il est important de distinguer la parole de l’homme politique de celle de son équipe. Le respect d’une charte expliquant qui fait quoi est un élément important de la confiance qui lie le politique au citoyen dans une société numérique.
Ainsi, le e-leader de demain se distinguera du leader et du manager traditionnels tout en alliant plusieurs de leurs compétences. Son positionnement et son savoir-faire seront inévitablement liés à la l’identité de marque ainsi qu’à son identité numérique propre avec un équilibre encore à inventer.
 
À propos de G9+
Fédérant aujourd'hui 20 communautés d'anciens de toutes formations (écoles d'ingénieurs, management, sciences politiques, université), l'Institut G9+ représente 50 000 professionnels du numérique. Grands acteurs privés & publics et pôles d'expertise concernés font naturellement partie de son environnement. L’Institut G9+ apporte un éclairage investigateur, constructif et audacieux sur les secteurs du numérique, en transformation permanente. Acteur indépendant, il catalyse et agite les tendances d’aujourd’hui et de demain – technologiques, sociétales, marchés, management, usages – en organisant une trentaine de conférences par an, ouvertes à tous. Il a pour ambition d'être un think tank de référence dans ce secteur. Pour en savoir plus: www.g9plus.org.