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Océan Indien

Emmanuel Macron survole l’océan Indien à très haute altitude

Il est fort probable que le rachat de Vindémia par le groupe Bernard Hayot soit validé par l’Autorité de la concurrence début 2020. Pourquoi ? D’abord parce que Jean-Charles Naouri, le patron du groupe Casino, a besoin d’argent, qu’il est pressé et qu’il souhaite vendre l’ensemble d’un coup, c’est-à-dire La Réunion, Madagascar, Maurice et Mayotte. L’enseigne Carrefour devrait donc faire assez vite son apparition dans ces îles. On imagine mal Emmanuel Macron faire des misères à Jean-Charles Naouri. D’autant que le Groupe Bernard Hayot est une entreprise française, qu’elle tient la route et met 219 millions d’euros sur la table. Apparemment, seul un fonds de pension était en compétition pour racheter l’ensemble. 

Une visite présidentielle très géopolitique

Conclusion, l’affaire est emballée ! Les naïfs qui invoquent l’indépendance de l’Autorité de la concurrence n’ont qu’à lire notre article sur la perquisition chez Air Austral. J’ajouterai que le fait que Bpifrance, la banque publique d’investissement, accompagne par un prêt Make Distribution est un indice supplémentaire. En effet, Make  Distribution a pour raison d’être le rachat au groupe Bernard Hayot de quatre hypermarchés parmi les sept figurant dans le parc de Vindémia à La Réunion. 
La transition est toute trouvée avec la visite d’Emmanuel Macron à Mayotte et à La Réunion du 22 au 25 octobre inclus. Le président a joué pleinement au président avec une stature gaullienne. La première dimension de ce voyage a été géopolitique même si Emmanuel Macron a dû prendre en compte une forte demande sociale et jouer très modérément au Père Noël. Il est facile d’offrir royalement 11 000 emplois aidés à La Réunion quand on en a supprimés 25 000. Mayotte a eu la confirmation qu’elle aurait sa piste longue. L’AFD est prête à financer dès que le dossier est bouclé.
Mais le Président a volé à haute altitude pour mieux voir le « grand » océan Indien en accueillant à La Réunion une trentaine de grands patrons d’Afrique du Sud, de Maurice, d’Inde et de Madagascar, mais aussi des ministres de Madagascar, d’Inde, de Maurice, des Seychelles et des Comores. La présence de l’Inde était d’ailleurs significative comme pour reconnaître que ce pays est la principale puissance de l’océan Indien. Jamais une visite présidentielle n’a été internationalisée à ce point. Visiblement, le premier objectif d’Emmanuel Macron consistait à montrer que la France est toujours une puissance sur laquelle il faut compter, que sa présence dans l’océan Indien, à travers La Réunion, Mayotte et les îles Éparses, contribue à la stabilité de cette zone qui est « l’épicentre du commerce mondial » et qu’elle est prête à intensifier sa coopération avec les autres puissances. La France se pose également en garante de la protection de la biodiversité et des zones de pêche contre les « prédateurs ». D’ailleurs, lors de sa visite à Mayotte, Emmanuel Macron n’a pas manqué de se rendre dans l’archipel des Glorieuses, figurant parmi les îles Éparses. Sur la Grande Glorieuse, il a déjeuné avec les légionnaires et annoncé la mise en place d’une réserve naturelle nationale.
La Réunion et Mayotte pourront-elles profiter de la dynamique internationale que veut insuffler le président de la République ? Rien n’est moins sûr car elles sont empêtrées dans des crises sociales (et migratoire pour Mayotte). Pas évident non plus de s’ouvrir quand on est un département français, soumis comme tel à des règlementations nationales. Il suffit de constater les problèmes de visa que rencontrent certains ressortissants de pays du « grand » océan Indien pour se rendre à La Réunion. 
Pour finir, un clin d’œil à Pravind Jugnauth qui, à Maurice, vient de gagner sa légitimité de Premier ministre en s’imposant nettement lors des élections générales du 7 novembre. Pour être plus exact, c’est l’alliance qu’il conduisait qui s’est imposée avec 38 députés élus à Maurice sur 60. En ajoutant les deux députés de l’Organisation du Peuple de Rodrigues (OPR) qui le soutiennent et les candidats repêchés grâce au système du « Best Loser » (mis en place par les Anglais en faveur des minorités), il dispose de 44 députés sur un total de 70 que compte le Parlement.   

Pravind Jugnauth doit lancer les bons signaux

Lors des précédentes élections, en 2014, c’était son père, Anerood Jugnauth, qui figurait comme leader et se retrouvait Premier ministre à l’âge de 84 ans. Fin 2016, il passait le relais à son fils, en toute légalité, mais il manquait encore la légitimité à Pravind Jugnauth. C’est chose faite même s’il ne s’agit pas d’un raz-de-marée orange (la couleur du MSM, son parti). Si l’on regarde globalement le vote, c’est environ un électeur inscrit sur trois qui a voté pour son alliance. Mais le découpage électoral est favorable à Pravind Jugnauth qui s’impose davantage dans les campagnes que dans les villes. En position de force, il doit maintenant lancer les bons signaux aux investisseurs et aux bailleurs de fonds.