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Réunion

Et si l’on libérait La Réunion ?

Pour ouvrir le bal, une anecdote qui pourrait faire un peu honte d’être Français.
Le président Hollande a rendu visite au pape François, le 24 janvier dernier, pour un entretien quelque peu crispé. Un entretien (expédié en 35 minutes) qui tranchait avec celui accordé, le 18 mai 2013, à la chancelière allemande Angela Merkel : 45 minutes sous le signe de la bonne humeur et même du rire. Mais bon ! Les atomes crochus, ça ne se discute pas !
Ce qui choque plutôt, c’est de voir – sur les images de la rencontre entre les deux François – le président français s’asseoir avant le pape. Certes, on entend clairement ce dernier lui dire « asseyez-vous », mais il n’était pas obligé d’obtempérer et pouvait marquer son respect. La question est de savoir s’il s’agit juste d’un manque d’éducation ou de la volonté de montrer que la France n’est plus la fille aînée de l’Église. Cette première visite au pape, pour François Hollande, ne serait alors que celle rendue à un chef d’État comme un autre et non à une autorité religieuse. De quoi faire plaisir aux « frères la gratouille » du Grand Orient qui, pour certains, ferment leurs travaux maçonniques en criant « à bas la calotte ! »
Pour le catholique Hollande, ce serait une révolte freudienne contre le père ! Révolte à laquelle est bien étrangère Angela Merkel qui est une femme et n’est pas catholique de surcroît. De quoi faire les délices des psychanalystes ! Mais nous en resterons là sans quitter entièrement la France.
 
Ça se passe du côté de La Réunion, cette fois, où le président de la Région, Didier Robert, n’a pas du tout apprécié que l’île française soit marginalisée lors des célébrations des 30 ans de la Commission de l’océan Indien (COI), aux Seychelles, les 9 et 10 janvier. Il y a de quoi s’étouffer de colère, en effet, puisque Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, a préféré mettre en première ligne sa protégée Claudine Ledoux, nouvel ambassadeur itinérant, qui était connue jusqu’alors comme maire socialiste de Charleville-Mézières. Ce qui lui donne évidemment les compétences et connaissances requises pour représenter la France dans l’océan Indien.
Vous l’aurez compris, bien sûr, chers lecteurs, cette nomination est un beau cas de népotisme dont est malheureusement coutumière la République française. Les Français sont tous égaux, mais il y en a quand même qui sont plus égaux que les autres !
Dans le compte-rendu des célébrations seychelloises, diffusé par le service de presse de la COI, le nom de Didier Robert n’est pas cité une seule fois, de même que celui de la dynamique ambassadrice française aux Seychelles, Geneviève Iancu, qui est une vraie diplomate, elle, contrairement à son homologue Claudine Ledoux.
Au-delà de ces polémiques, on peut se demander à quoi sert un ambassadeur itinérant alors que la France dispose déjà dans chaque île d’un ambassadeur. À faire le petit télégraphiste entre Navin Ramgoolam et Didier Robert ? Il y a de quoi se montrer sceptique et se demander s’il ne s’agit pas encore d’un gaspillage d’argent public alors que, dans le même temps, la France réduit ses missions économiques.
 
J’ai bien apprécié la lettre que Didier Robert a envoyée à Laurent Fabius.
Une missive qui ne fait pas dans la dentelle diplomatique ! Une petite leçon historique d’abord : « (…) L'intégration de La France en 1986 (dans la COI – Ndlr) est clairement liée à la situation de La Réunion (…) les textes stipulent qu'il s'agit de permettre aux deux collectivités de développer des échanges avec la zone et que la représentation de la France/Réunion est assurée par le préfet de la Région ou le président de la Région… » Et pour finir, le président de la Région Réunion écrit que « le 30ème anniversaire des Accords de Victoria sonne pour le peuple Réunionnais comme un retour aux temps anciens, celui d'une attitude méprisante ».
On croyait pourtant, depuis quelques années, que la France avait choisi La Réunion comme relais de sa coopération dans la zone. Mais le pouvoir socialiste semble avoir renoué avec un jacobinisme pur et dur, ce « mal français » récurrent. Ce qui pourrait avoir pour effet de favoriser à La Réunion un courant « autonomiste » qui se fait déjà sentir. Il ne s’agirait pas d’une « autonomie étape vers l’indépendance », comme la revendiquait Paul Vergès à une époque. Il s’agirait d’une vraie décentralisation et, tout simplement, de l’application d’un principe de subsidiarité qui est un fondement de l’Union européenne (on l’ignore trop souvent).
L’Europe des régions, une chance pour La Réunion ? Peut-être bien !