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Afrique

Etat des lieux d’une démographie galopante

Avec un taux de fécondité variant entre 3 et 4,8 enfants par femme, l’Afrique voit sa population augmenter de 3% par an, ce qui entraîne un doublement tous les vingt ans. Nous sommes en présence d’une exception car, partout ailleurs dans le monde, la tendance a été inversée.

L’apogée de la démographie mondiale a été atteinte dans les années 1970 avec un taux de 2,1% d’augmentation annuelle. Puis le taux d’accroissement a baissé à 1,7%dans la décennie 1990, Asie incluse. L’Afrique n’a pas suivi ce mouvement. Les projections actuelles partent du postulat de la baisse de l’ISF (Indice synthétique de fécondité) qui permet d’évaluer le nombre d’enfants mis au monde par une femme en âge de procréer. Toutes ces données postulent une baisse de 50% de l’ISF africain en trente ans. Dans la décennie 1990, il était de 6,7 enfants par femme et il est postulé qu’il baissera à 3,4 en 2020.
Les experts peuvent ainsi annoncer que la démographie africaine passera à 2,1% en 2020. Or, il s’agit d’un postulat qui, pour le moment, ne semble pas se vérifier. 

L’EXPLOSION DÉMOGRAPHIQUE ENTRAÎNE DES CONFLITS

Depuis la fin de la seconde moitié de la décennie 1990, l’ISF a certes très légèrement baissé au Kenya et au Zimbabwe, mais, dans le même temps, il a augmenté en Ethiopie, au Mali et en RCA (République centrafricaine), passant respectivement de 6 à 7,5, de 6 à 7 et de 5 à 6. Quant à la Somalie, on y compte 6,4 enfants par femme et 6,1 en RDC (République démocratique du Congo). 
Le cas du Sahel est particulièrement parlant. Voilà en effet une région incapable de nourrir ses habitants et où la population double quasiment tous les vingt ans avec une croissance de 3,9% et une moyenne de 7,6 enfants par femme. En 2040, cette région fragile, en voie de désertification et aux ressources plus que limitées, devra ainsi faire vivre plus de 150 millions d’habitants. Cette explosion démographique a pour conséquence un phénomène d’extension des terres arables aux dépens des pâturages, d’où des conflits entre po-pulations – comme le montrent les conflits entre éleveurs Peuls et agriculteurs Bambara au Mali – et une surexploitation des puits, d’où leur tarissement. 

L’EXPANSION REPART À LA HAUSSE DANS CERTAINS PAYS

L’exemple du Niger illustre la catastrophe annoncée. Dans un entretien à « Jeune Afrique » en date du 28 décembre 2014, le président nigérien Mamadou Issoufou a ainsi révélé un sondage proprement effarant réalisé parmi la population de son pays qui montre que les Nigériennes souhaitent avoir 9 enfants et leurs maris 11. Le Niger, pays désertique qui a un taux de fécondité de 7,1 enfants par femme, avait 3 millions d’habitants en 1960 et il en aura 40 en 2040 et 60 en 2050. Dans le nord du continent, l’Algérie constitue également un cas particulier car s’y produit un retour en arrière démographique. Le programme de planification familiale avait en effet permis d’y faire baisser l’indice synthétique de fécondité de 4,5 enfants par femme en 1990 à 2,8 en 2008. Or, signe de la ré-islamisation du pays, en 2014, l’ISF y a rebondi à 3,03. Résultat, en 2016 la population algérienne est de 40 millions d’habitants en ne comptant toutefois que les seuls résidents. Pour mémoire, en 1830, elle était estimée à 1 million.

LA COLONISATION RESPONSABLE DE LA SURPOPULATION
Les colonisateurs débarrassèrent les Africains de la lèpre, de la rougeole, de la trypanosomiase, dite « maladie du sommeil », du choléra, de la variole, de la fièvre typhoïde et de la fièvre jaune. Résultat, « l’enfer étant pavé de bonnes intentions », les missionnaires, les religieuses soignantes, les médecins et les infirmiers coloniaux ont provoqué un cataclysme démographique. Conséquence des révolutions introduites par la médecine « coloniale », la population africaine augmente d’environ 3% par an en moyenne alors que, dans le même temps, les ressources agricoles ne progressent que de 1%seulement. À l’époque pré-coloniale, l’Afrique était un continent de basse pression démographique et les Africains vivaient dans un milieu aux ressources inépuisables. En un siècle, la médecine coloniale a fait que la population du continent a été multipliée par sept. Or, ni les populations ni leurs dirigeants n’ont pu, ni voulu, intégrer cette véritable révolution. Tout au contraire, ils l’encouragent.

Biographie Bernard Lugan