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Avec Rwazi, Joseph Rutakangwa est convaincu de proposer aux Mauriciens un outil puissant pour pénétrer les marchés africains.
Maurice

Joseph Rutakangwa : À 27 ans, il a déjà créé 1 000 emplois en Afrique !

Ce Tanzanien de 27 ans a des idées et mieux… de la suite dans les idées. En 2018, il crée, avec son associé, Rwazi, une entreprise qui permet aux professionnels d’optimiser leurs ventes tant à Maurice que sur le continent Africain. Et les résultats sont impressionnants !

Joseph Rutakangwa est à Maurice depuis 2015, mais ne parle pas un mot de créole ou de français. Non pas qu’il soit timide, introverti ou distant… Bien au contraire, il suffit de l’entendre parler pour s’en assurer ! Un gros bosseur, reconnaît-il. Passionné par tout ce qui est projets et entrepreneuriat. Boursier, il fait partie de la première génération d’étudiants africains ayant obtenu une licence de l’ambitieuse African Leadership University qui se veut être la pépinière des leaders africains de demain. Et force est de constater que Joseph Rutakangwa est l’archétype du « leader-africain-de-demain ». Avec un collaborateur, il a lancé Rwazi, une entreprise qui propose des services de collecte de données à des fins commerciales. « On aide les entreprises à connaître à tout instant où sont vendus leurs produits, à quels prix et quelles sont leurs performances et celles de leurs concurrents directs. » Suffisait d’y penser !

L’envie d’entreprendre

Né à Dar es Salaam, en Tanzanie, il a plutôt suivi un parcours académique atypique avant d’en arriver là. Il commence à étudier à domicile, puis part apprendre les langues et la littérature auprès de prêtres catholiques en Ouganda. Il revient en Tanzanie pour terminer son cycle secondaire. Preuve qu’il est un garçon naturellement doué pour les études, il fait partie des trente étudiants tanzaniens qui sont sélectionnés pour le Youth Exchange and Study (YES), le programme d’échanges du département d’État américain qui offre des bourses aux étudiants du secondaire de pays à forte population musulmane pour qu’ils étudient pendant une année aux États-Unis. 
À l’issue de ses études secondaires, bouclées en 2010, il choisit la seule voie qui s’offre à lui : entreprendre, car aucune université ne lui a proposé de bourse suffisante pour étudier. Il se lance d’abord dans la conception graphique et audiovisuelle, mais vu son jeune âge – tout juste 18 ans -, cela ne marche pas. Il choisit alors de devenir Volontaire des Nations-Unies (VNU) pour soutenir sur le terrain des projets de développement communautaire de l’ONU. Il devient le président d’une branche locale dont la mission est plus particulièrement d’aider les jeunes chômeurs africains à entreprendre. « Je voyais dans l’entrepreneuriat le meilleur moyen de sortir les jeunes Africains de la pauvreté », confie-t-il. Il devient ensuite formateur (Alumni Trainer) pour le programme YES avec des missions (entre autres) en Indonésie, tout en commençant à travailler en tant que consultant local pour des multinationales. 
En 2015, Joseph a l’opportunité d’étudier à Maurice tout en continuant à travailler auprès de compagnies mauriciennes et africaines comme consultant. Dans la foulée, il tente de développer un projet de culture de maïs et de riz en Tanzanie, mais, faute de financement, l’affaire tombe à l’eau. C’est durant cette période, jonglant entre études et travail, qu’il rencontre celui qui deviendra son collaborateur, Éric Sewankam-bo. Titulaires tous deux d’une licence en gestion d’entreprise de l’African Leadership University, ils décident de conjuguer leurs talents en créant Rwazi qu’ils  développent au sein de l’incubateur mauricien de startups, La Plage Factory. 
Les raisons du choix de Maurice pour lancer cette entreprise ?  « À Maurice, l’écosystème est bien structuré et favorable aux startups, permettant l’accès à des mentors, des investisseurs, des aides légales et administratives ainsi qu’aux médias. Tout cela m’a permis d’aller au bout de mon projet, en toute sécurité et sérénité », confie le jeune homme, avant d’ajouter : « J’espère que les autres pays africains s’inspireront de Maurice en ce domaine. » 
Évoquant la genèse de Rwazi, il se souvient comment l’idée lui est venue : « Ayant travaillé quatre ans comme consultant, je me suis aperçu qu’un problème commun aux entreprises pour lesquelles je travaillais était de ne pas trouver de données sur l’activité du marché. En particulier, les entreprises de biens de consommation ont besoin de données sur les performances de leurs produits dans les points de vente. Ces données sont essentielles pour qu’elles optimisent leur distribution. » 

 

Avec Rwazi, Joseph Rutakangwa est convaincu de proposer aux Mauriciens un outil puissant pour pénétrer les marchés africains.
Avec Rwazi, Joseph Rutakangwa est convaincu de proposer aux Mauriciens un outil puissant pour pénétrer les marchés africains. Photo : Davidsen Arnachellum
 

Précieuses données

Et de constater que les entreprises étrangères ont du mal à pénétrer les marchés africains car elles utilisent des modèles de distribution issus de marchés développés mais qui ne représentent que moins de 5 % des ventes en Afrique subsaharienne.  « Sur un marché en développement, un produit qui est partout dans les boutiques et à un prix inférieur à la concurrence se vend mieux qu’un produit placé en supérette. »
Rwazi aide ainsi les entreprises à s’installer efficacement sur un territoire, fournissant en temps réel toutes les données sur la disponibilité, la visibilité et les prix des produits par rapport à la concurrence. Récolter ces données permet non seulement aux entreprises d’affiner leurs stratégies et choisir intelligemment quels points de vente privilégier, mais surtout de prédire les pics de demande. « Grâce aux données que nous collectons, nous pouvons anticiper ces pics et ainsi répondre efficacement aux demandes en produisant davantage », explique le jeune entrepreneur. 
Mais à ses yeux, Rwazi joue aussi un « rôle social important ». Elle permet, en effet, d’offrir du travail à des chômeurs diplômés comme 
« mappeurs », collaborateurs dont le rôle consiste à visiter les points de ventes des territoires désignés par le client et de reporter sur l’application mobile les informations recueillies (ils sont rémunérés à la tâche) À travers Rwazi, Joseph contribue ainsi, mine de rien, à donner du travail à un bon millier d’Africains qualifiés (dont 109 à Maurice) ! Confiant dans la viabilité de son projet, il espère que l’investissement mauricien vers le continent africain, annoncé comme inévitable, se concrétisera et que Rwazi sera au cœur de l’aventure. Demain a déjà commencé.