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La Sematra évite le crash d’Air Austral et la fait voler plus haut

L’aérien étant un outil indispensable au tourisme et à l’économie, la Région Réunion a investi pour que la société d’économie mixte Sematra devienne actionnaire à 97,82 % d’Air Austral. Pour assurer son redressement et son développement régional.

La Sematra est une société d’économie mixte créée le 3 août 1990 par la Région Réunion en application du code général des collectivités territoriales qui prévoit à l’article L.4433-21 que les régions d’Outre-mer ont compétence pour créer des SEM ayant pour objet le transport aérien ou maritime. 
En 2006, le capital de la Sematra se répartissait ainsi : Région 50 %, Département 30 % et divers 20 % (dont CCIR, Sofider, Caisse des dépôts, etc.). Et la SEM alors elle-même actionnaire d’Air Austral à hauteur de 46,57 %, le reste du capital de la compagnie aérienne étant détenu par des banques (14,45 %), la Caisse réunionnaise de retraite complémentaire (6,75 %), des entreprises locales et personnes physiques (19,33 %) et le personnel d’Air Austral (12,90 %).
En mars 2010, Didier Robert succède à Paul Vergès à la présidence de la Région et, six mois plus tard, il prend la place de Nassimah Dindar, présidente du Département, à la présidence de la Sematra, qu’il estime lui revenir de droit puisque que la Région en est l’actionnaire principal. Didier Robert prendra même, en janvier 2012, la présidence du conseil de surveillance d’Air Austral, occupée jusqu’alors par Paul Vergès, avant de prendre ses distances en février 2015.
La gouvernance de la compagnie aérienne a évolué avec la création d’un poste de P-DG confié à Marie-Joseph Malé. Entretemps, Didier Robert s’est impliqué pour impulser un nouvel élan à la compagnie aérienne, pour laquelle il a de grands projets. Hélas, la compagnie est mal en point, comme le confirme une expertise financière du cabinet Deloitte.
Air Austral demande à son principal actionnaire de venir à son secours et, en juillet 2012, la Sematra augmente sa participation dans la compagnie aérienne pour atteindre 97,82 % du capital (contre 46,57 % en 2010). Pour y parvenir, la Sematra a d’abord dû augmenter son propre capital. Tous les actionnaires n’ont pas mis au pot selon leur participation initiale et la Région détient désormais 73,5 % du capital, le Département 11,4 %, la Caisse des dépôts 13,6 % et les autres 1,5 %.

Une volonté forte de la Région

L’injection de plusieurs millions d’euros dans le capital d’Air Austral par la Région via la Sematra est vécu comme une distorsion de la concurrence par une compagnie aérienne concurrente, Corsair, qui porte l’affaire devant la justice (Tribunal administratif (TA) et Commission européenne). Mais Bruxelles et le TA de Saint-Denis confirment finalement le bon droit de la Sematra et de la Région, qui ont agit en « investisseurs responsables ».
De son côté, Didier Robert, précise que l’opération est temporaire, deux ans tout au plus, le temps qu’Air Austral se redresse, son souhait étant de revendre à ce moment des actions, pour que la SEM ne détienne plus que 33 %. Mission est d’ailleurs donnée à une banque pour trouver de nouveaux investisseurs. À l’époque du tandem Gérard Ethève (président du directoire) et Paul Vergès (président du conseil de surveillance), une offre de Jacques de Chateauvieux avait été déclinée sans qu’on en connaisse vraiment les raisons. Sous l’ère de Didier Robert et Marie-Joseph Malé, des négociations sont menées avec le groupe familial Dubreuil, originaire de Vendée mais propriétaire d’Air Caraïbes. Sans succès. De même, les négociations avec le groupe réunionnais Océinde n’aboutiront pas. En revanche, Air Austral a pu trouver de nouveaux actionnaires pour créer sa filiale mahoraise Ewa Air : la CCI de Mayotte, la Caisse des dépôts et le groupe mahorais Issoufali.
En 2016, la Région et la Caisse des dépôts procèdent encore à une augmentation du capital de la Sematra, de 48 millions d’euros (dont 38 millions pour la Région et 10 millions pour la Caisse des dépôts). Le Département décide de ne pas suivre. Son président Cyrille Melchior a rappelé début 2019 que cette collectivité souhaitait revendre ses parts. La difficulté est que seule une collectivité locale ayant une compétence dans les transports peut racheter ces parts et que Didier Robert a indiqué que la Région n’était pas intéressée, sa participation étant déjà importante. Pas moins de 88 millions d’euros en capital, a indiqué un élu lors de la présentation du Budget primitif 2019.
En tous cas, c’est grâce à la Région si Air Austral a pu se redresser et même se développer avec le rachat de 49 % des parts d’Air Madagascar.