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Maurice/Réunion

Laurent Lemaître (Club Export Réunion) : « À deux, nous pouvons faire la différence »

Co-organisateur du séminaire sur la ville durable, le président du Club Export Réunion est convaincu que les savoir-faire réunionnais et mauricien en matière d’urbanisme écologique sont exportables. Demain l’Afrique ?

L’Éco Austral : Gérard Sanspeur soutient que la ville durable à Maurice doit être la priorité de l’État mauricien. Et à La Réunion ?
Laurent Lemaître
: Les enjeux en termes de développement urbain durable sont les mêmes à La Réunion qu’à Maurice, nous construisons pour les générations futures. Nous devons penser confort des usagers, agriculture raisonnée et proche des consommateurs, réduction des déchets, déplacements doux, connectivité, réductions énergétiques, etc. De profondes réflexions sont en cours à La Réunion, avec des projets déjà lancés pour certains, comme les téléphériques, les trains urbains, le SWAC (Sea Water Air Conditioning), le mix énergétique, le tout en phase avec les règlementations françaises qui poussent à améliorer l’habitat et l’environnement. Notre île a également acquis une forte expérience dans la réalisation des éco-quartiers (Smart Cities).

N’y a-t-il pas cependant des différences d’approche ? 
Le tournant pris à l’île Maurice depuis quelques années avec les Smart Cities et les grosses infrastructures urbaines a rendu inévitable, mais non voulu dès le départ, le passage aux villes durables, des villes qui sont en quelque sorte condamnées à fonctionner. Mais la question qui taraude les investisseurs privés mauriciens est de savoir comment réussir le mélange entre le logement « social » et le « haut de gamme ». À La Réunion, les notions de rentabilité  des investissements en infrastructures sont assez différentes. C’est plutôt l’État qui anticipe les développements urbains à venir et les investissements privés qui suivent. Le mix entre les logements sociaux et privés, parfois encadré par l’État, est par ailleurs une chose bien maîtrisée en raison de la réalité économique et sociale propre à l’île.

Concrètement, quelles opportunités de coopération peut-on identifier entre les deux îles ?
D’abord, il faut souligner que les échanges existent depuis des années. Les implantations d’entreprises privées, notamment, sont déjà nombreuses d’une île à l’autre. Mais ce séminaire a montré la nécessité de dégager d’autres formes de coopération. À titre d’exemple, la problématique des déchets est commune à La Réunion et Maurice et une réflexion régionale doit être mise en place très rapidement. La Réunion ne pourra pas concurrencer l’île Maurice dans des domaines où le coût de la main d’œuvre fait la différence, et elle n’en a pas la volonté. En revanche, l’expertise et la qualité de services de ses entreprises font la différence lorsqu’il y a nécessité de valeur ajoutée. Enfin, les réflexions engagées par l’État français et les collectivités locales réunionnaises sur différentes problématiques économiques et écologiques, l’aménagement du territoire par exemple, peuvent inspirer les Mauriciens.

Nos îles sont-elles en mesure d’exporter leur modèle de villes durables ? 
Je retiens de ce séminaire que la coopération régionale, même si elle prend du temps, est devenue une réalité. Nous avons cette volonté commune d’agir sur le continent africain et d’amener nos compétences au service de l’édification de la ville durable de demain.
Nos particularités insulaires (cyclone, sismicité, proximité de la mer), combinées au respect des normes européennes et à la mobilité de nos PME, sont des atouts que n’ont pas nos concurrents internationaux. Je suis convaincu que notre expertise alliée à la mobilité des entreprises mauriciennes peut faire la différence en Afrique face aux gros opérateurs européens, sud-africains et chinois. C’est pourquoi nous devons associer nos forces et nos compétences.