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Le groupe Sotravic apporte un nouveau relais de croissance avec l’économie bleu

En six mois, son projet de climatisation marine (Sea Water Air Conditioning) s’est métamorphosé en optant pour un réseau secondaire qui permettra d’exploiter l’eau de mer de grande profondeur à d’autres fins que la climatisation de certains bâtiments de Port-Louis.



Très réactif et pragmatique, le groupe Sotravic s’inspire aujourd’hui du modèle d’Hawaï. Dans cet État américain d’Océanie, archipel aux 137 îles, l’exploitation des fonds marins génère un chiffre d’affaires de 2,6 milliards d’euros dont seulement 57 millions pour la climatisation marine ou SWAC (Sea.Water Air Conditioning). En clair, au lieu d’être rejetée à la mer après avoir servi à climatiser des bâtiments, l’eau de grande qualité – qui est captée dans l’océan à plus de 1 000 mètres de profondeur – est fournie à différents opérateur pour des activités très diversifiées. Certaines, comme l’embouteillage d’eau destinée à la consommation, présentent une très forte valeur ajoutée. Cette eau, qui aurait des vertus thérapeutiques, est vendue à 4,5 dollars la bouteille de 1,5 litre et à 2 dollars la bouteille de 50 cl. Environ 800 000 bouteilles sont exportées quotidiennement d’Hawaï vers les Etats-Unis, le Japon, la Corée du Sud et la Chine. D’autres activités comme l’aquaculture n’offrent pas la même rentabilité, ce qui implique qu’Urban Cooling Ltd (ou une autre filiale de Sotravic qui serait créée à cet effet) ne se positionne pas comme un simple fournisseur d’eau, mais comme un partenaire proposant des offres différenciées. Une formule de prise de participation est d’ailleurs envisageable. Emmanuel André, le CEO de Sotravic ne l’écarte pas et il se prépare à lancer à l’échelle internationale des appels à projets. Des entreprises ont déjà fait connaître leur intérêt, notamment pour l’activité d’embouteillage. Quant à l’aquaculture, Emmanuel André se montre rassurant face aux craintes exprimées dans le secteur touristique sur les risques d’une prolifération de requins, attirés par les élevages. Les activités d’aquaculture sont prévues hors mer. Le groupe mauricien a commencé à travailler sur une approche du marché, les activités possibles en tenant compte de l’espace nécessaire et les retours sur investissement. Il a identifié quatre pistes principales : 

1.L’EMBOUTEILLAGE D’EAU 

Cette activité d’embouteillage après osmose inverse ne pose pas de problème technique. L’enjeu est essentiellement marketing et l’exemple d’Hawaï montre que cela peut fonctionner. En étant réaliste, Urban Cooling estime qu’un objectif de prix de vente de 150 à 200 roupies (3,75 à 5 euros) la bouteille est possible. 

2.L’AQUACULTURE 

L’étude montre que l’Abalone, un mollusque qu’on appelle Ormeau en français, s’y prêterait plus facilement car son élevage n’est pas trop complexe et le kilo d’ormeau peut se vendre jusqu’à 100 euros. Pour atteindre une production suffisante, il faut compter au moins 391 millions de roupies (9,8 millions d’euros) d’investissement. À partir de 100 tonnes annuelles, destinées principalement à l’export, l’activité se révèle rentable. Seul problème, il faut compter entre quatre et cinq ans pour stabiliser cette production. Un Ormeau met 18 mois pour arriver à maturité, plus pour certaines variétés. Sur Port-Louis, les quartiers de Bain des Dames et Cassis notamment, pourraient accueillir de telles activités et y générer de l’emploi. 

3.THALASSOTHÉRAPIE ET COSMÉTIQUE 

Ces activités pourraient intéresser les hôtels mauriciens aussi bien que des acteurs internationaux. Le bon modèle peut d’ailleurs consister à commencer par la thalassothérapie – qui n’existe pas encore à Maurice – avant de décliner des marques de cosmétique. Le Japon est en pointe dans ce domaine de la cosmétique à base d’eau de grande profondeur. L’entreprise DHC (Daigaku Honyaku Center) a lancé DHC Beauty en 1980 et développe une gamme de produits pour femmes. Elle s’est implantée en Californie en 1995, puis en Corée du Sud, à Taïwan, à Shanghai, en France et à Hong Kong. 

4.UN CENTRE DE RECHERCHE INTERNATIONAL 

Un investissement estimé à 45 millions de roupies (1,1 million d’euros) permettrait d’accueillir un panel de 30 à 40 scientifiques plaçant Maurice sur la carte mondiale de l’économie bleue et de générer de nouvelles activités. Cela passe par un « benchmarking » important dans des pays en pointe dans le domaine, comme le Japon, la Corée du Sud, les Etats-Unis et la France (sachant que l’Ifremer dispose d’une antenne à La Réunion). Toutes ces activités en « Downstream » pourraient générer dans un premier temps un chiffre d’affaires d’un milliard de roupies (25 millions d’euros) pour des investissements s’élevant au total à 1,5 milliard de roupies (37,5 millions d’euros). Très peu au regard d’Hawaï, mais cet État américain a lancé son réseau secondaire il y a 34 ans. Une montée en puissance est donc probable car l’économie bleue représente un véritable relais de croissance. Pour l’accélérer, il sera nécessaire d’instaurer un véritable partenariat public-privé. 

CLIMATISATION MARINE : « AVEC 15 CLIENTS, C’EST GAGNÉ »

Pour la réalisation de son projet de climatisation de certains grands bâtiments de Port-Louis, Urban Cooling Ltd (filiale de Sotravic) s’est lancée dans une véritable course de vitesse. Son challenge consiste à disposer d’au moins quinze clients ayant donné leur accord de principe d’ici le 15 décembre afin de pouvoir démarrer les travaux en 2017. Les contrats sont discutés au cas par cas et permettront à ces clients d’être gagnants au moins sur le long terme. À court terme, pour ceux qui sont équipés de climatiseurs de nouvelle génération, le coût de l’électricité sera équivalent, mais le SWAC évitera des investissements futurs. La première phase du projet consiste à fournir 23 mégawatts dès le deuxième trimestre 2018. Un challenge qui a déjà séduit des institutions financières importantes comme la Banque africaine de développement (BAD) dont le concours se révèle déterminant puisque l’investissement total est estimé à 2,2 milliards de roupies (55 millions d’euros).

 

UN BATEAU DE JAN DE NUL POUR LES ÉTUDES TECHNIQUES

Davidsen Arnachellum
Davidsen Arnachellum

Le bateau « Joseph Plateau » du leader mondial du dragage et des travaux maritimes a accosté à Port-Louis le 21 octobre pour y effectuer, jusqu’au 6 novembre, sur une zone de six kilomètres, les échantillonnages et les tests pour les études techniques nécessaires à la réalisation du projet de climatisation marine. Construit au chantier naval d’Uljanik en Croatie, le bateau tient son nom d’un éminent professeur de physique, Joseph Plateau (1801-1883), de l’université de Liège. C’est le plus grand bateau de reconnaissance et d’études marines au monde. Il mesure 191,5 mètres de long et peut relever des échantillons jusqu’à 2 000 mètres de profondeur à l’aide d’un véhicule téléguidé qui est capable de localiser la portion la plus profonde d’un tuyau à 10 centimètres d’exactitude.