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Les nouveaux défis de la gestion des ressources humaines

Pour construire un projet d’entreprise dont l’écosystème répondra aux attentes d’une nouvelle génération de collaborateurs, il faut faire émerger une vision commune et des éléments de langage qu’on pourra partager.

L’apparition d’une école des relations humaines au travail date des années 30, sous l’impulsion d’Elton Mayo. Un concept innovant pour l’époque et qui a surpassé les modèles productivistes dans lesquels il n’existait pas de fonction dévolue au personnel. La gestion des ressources humaines a continué d’évoluer et la définition d’un langage commun, fixant les bases de la concertation au sein de l’entreprise, est de plus en plus à l’ordre du jour. Avec le concours du cabinet de coaching Conseil & Services, les invités du Tecoma Business Forum ont échangé leurs réflexions dans le but d’aboutir à une formulation commune des enjeux qui s’imposent, aujourd’hui, à la gestion des ressources humaines (GRH). « Nous pourrons ainsi constituer un atelier, sur deux matinées de travail, pour élaborer ensemble un projet d’expérimentation en GRH », propose Louis-Laurent Léger, coach chez Conseil & Services. Il faut donc collecter des mots pour construire une vision commune en tant que base de travail.
 

Louis-Laurent Léger, coach chez Conseil & Services et animateur du Tecoma Business Forum avec son collaborateur Frédéric Martinetti : « Nous pouvons remplacer le mot épanouissement par bien-être, c’est plus modéré, car il n’y a pas l’obligation de résultat, mais l’envie de mettre les moyens pour y parvenir. »
Louis-Laurent Léger, coach chez Conseil & Services et animateur du Tecoma Business Forum avec son collaborateur Frédéric Martinetti : « Nous pouvons remplacer le mot épanouissement par bien-être, c’est plus modéré, car il n’y a pas l’obligation de résultat, mais l’envie de mettre les moyens pour y parvenir. »
 

 

SE REMETTRE EN QUESTION POUR SE RAPPROCHER

« La notion de nouveaux défis m’interpelle car la raison d’être du manager est déjà de répondre à des défis, de façon permanente. Ce n’est donc pas nouveau. Je préfère aussi le mot management plutôt que le mot gestion des RH », observe Bernard Alvin, gérant de Bernard Alvin Conseil, spécialisé dans le développement des potentiels et pionnier du management vocationnel. Il faut aussi introduire la notion d’individus et la notion d’équipes. « Le domaine des RH, s’agissant de l’humain, est complexe et mouvant. Avec une société de plus en plus digitalisée, l’évolution de l’humain prend aussi une tout autre dimension », remarque Franziska Goderbauer, exécutive coach et fondatrice d’ActOI.  
 

Pascal Hamel, représentant régional de l’Association nationale des DRH, et DRH de la Cilam : « Avant de manager, il faut recruter, et donc faire évoluer l’attracti-vité de l’entreprise. »
Pascal Hamel, représentant régional de l’Association nationale des DRH, et DRH de la Cilam : « Avant de manager, il faut recruter, et donc faire évoluer l’attracti-vité de l’entreprise. »
 

Il convient enfin de parler d’écosystème pour évoquer à la fois l’importance du rôle de la personne et de celui de l’organisation. « L’objectif du DRH sera toujours de recruter la meilleure personne pour le bon poste. Ce sont les moyens pour y parvenir qui évoluent un peu car les attentes ne sont plus les mêmes. Avant de manager, il faut recruter, donc faire évoluer l’attractivité de l’entreprise », analyse Pascal Hamel, représentant régional de l’Association nationale des DRH, et DRH de la Cilam qui emploie 700 collaborateurs. 
Un des enjeux de la mission du DRH est d’améliorer l’employabilité des collaborateurs par la mise en place de formations. Face à de nouvelles générations de salariés, il doit lui-même s’adapter à de nouveaux profils. Les impératifs de recrutement n’oblitèrent pas la nécessité de faire évoluer les collaborateurs au sein de l’entreprise. 
 

Isabelle Ramdiale Soubaya, directrice du Pôle de l’entrepreneuriat étudiant de l’université de La Réunion : « Il ne faut pas négliger les questions de la formation des salariés et de l’accompagnement des compétences. »
Isabelle Ramdiale Soubaya, directrice du Pôle de l’entrepreneuriat étudiant de l’université de La Réunion : « Il ne faut pas négliger les questions de la formation des salariés et de l’accompagnement des compétences. »
 

 

EN-VIE D’AVOIR ENVIE

On doit parfois rechercher une ressource en interne, qu’on aurait souhaité trouver à l’extérieur. « C’est la question de la formation des salariés et celle de l’accompagnement des compétences », ajoute Isabelle Ramdiale Soubaya, directrice du Pôle de l’entrepreneuriat étudiant de l’université de La Réunion. Le but de ce Pôle est la mise en place de formations pour les étudiants et leur sensibilisation à la création d’entreprise. 
La notion de cohabitation transgénérationnelle apparaît aussi importante. « Il faut se faire une idée précise des attentes des uns et des autres pour trouver un juste milieu en matière de formation », témoigne Pascal Hamel. « Les générations peuvent avoir du mal à se rapprocher, cela demande une capacité à se remettre en question, commente Franziska Goderbauer. »
 

Veena Desmonts, responsable de l’ingénierie de formation de la  SPL AFPAR : « Au-delà des compétences transversales et du savoir-être, des collaborateurs peuvent faire preuve de créativité et de capacité d’innovation. Ce qui est plutôt une aptitude en soi, une capacité de prise de risque dans le cadre de leur mission. »
Veena Desmonts, responsable de l’ingénierie de formation de la SPL AFPAR : « Au-delà des compétences transversales et du savoir-être, des collaborateurs peuvent faire preuve de créativité et de capacité d’innovation. Ce qui est plutôt une aptitude en soi, une capacité de prise de risque dans le cadre de leur mission. » 
 

Ces notions clés permettent d’identifier des aspects fondamentaux pour définir les problématiques actuelles en ressources humaines. « Pour qu’une entreprise se développe, il lui faut de la résilience. Cela dépend de ses équipes et de collaborateurs qui sont peut-être en place depuis de longues années. La résilience de l’entreprise dépend aussi de la souplesse individuelle et de l’adaptabilité des équipes », formule Véronique Stern, chargée de mission Innovation chez Nexa, l’agence régionale de développement, d’investissement et d’innovation. Cela ne dépend pas seulement du savoir-être des collaborateurs. « Au-delà des compétences transversales, et du savoir-être, des collaborateurs peuvent faire preuve de créativité et de capacité d’innovation. Ce qui est plutôt une aptitude en soi, une capacité de prise de risque dans le cadre de leur mission », pense Veena Desmonts responsable de l’ingénierie de formation de la SPL AFPAR, organisme de formation dédié aux adultes. La notion de talents recoupe ces aptitudes qui dépassent le cadre des simples compétences. « Selon l’opinion du regretté Jacques Brel, le talent n’existe pas. C’est avoir envie de faire quelque chose, disait-il. Il est vrai que les soft skills sont les plus difficiles à cerner. Elles dépendent aussi d’une envie », évoque Franziska Goderbauer. « Nous pourrions l’orthographier « en-vie » car l’enjeu pour le manager est de créer de la vie dans l’entreprise », propose Bernard Alvin. Envie et créativité se traduisent-elles par audace ? « Une capacité à être moteur, à proposer, à avoir envie de développer. Mais les entreprises acceptent-elles encore l’audace ? », s’interroge Véronique Stern. Cela semble pourtant indispensable. « Est-ce que les entreprises qui n’acceptent pas l’audace feront encore partie des entreprises de demain ? », questionne Franziska Goderbauer qui accompagne les dirigeants pour conduire le changement dans leur entreprise. 
 

Sylvie Hoarau, attachée à la direction de l’Offre des services de Pôle Emploi : « On peut préférer parler d’efficience, qui permet d’atteindre ses objectifs en fonction d’un projet. »
Sylvie Hoarau, attachée à la direction de l’Offre des services de Pôle Emploi : « On peut préférer parler d’efficience, qui permet d’atteindre ses objectifs en fonction d’un projet. » 
 

 

UNE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES 3.0

Le bien-être au travail est-il synonyme de productivité ? « Dans un monde idéal, les collaborateurs sont heureux de contribuer à la progression de l’entreprise. Le terme de ressources humaines convient-il, cependant ? Et par quoi pourrait-on le remplacer ? », se demande Frédéric Martinetti, coach et collaborateur de Conseil & Services. » Ce dernier s’intéresse à la conceptualisation d’une GRH 3.0 qui permettrait aux collaborateurs d’une structure de participer au processus décisionnel. Avec une vision collective, pour aller vers du management plus participatif. « À tous les jeunes que nous intégrons chaque année, nous proposons surtout d’être valorisés par un rôle, un statut, qu’ils n’avaient pas auparavant. C’est dans ce cadre-là qu’ils vont être performants », interpelle Nicolas Deloffre, directeur de l’École de la deuxième chance. Il ne faut donc pas oublier la notion de reconnaissance du collaborateur dans sa fonction. « Un mot phare n’a pas été mentionné, c’est la motivation des femmes et des hommes. C’est pourtant la première pré-occupation d’un manager », note Bernard Alvin. L’épanouissement au travail est aussi un thème très actuel dans l’univers de l’entreprise. Cela devient une exigence pour beaucoup de personnes qualifiées en recherche d’emploi. « L’entreprise ne peut pas tout apporter dans ce domaine. Doit-on se définir au travers de son travail ou en partie seulement ? », interroge Franziska Goderbauer. « Aux États-Unis, on crée des postes de Chief Happiness Officer, c’est quelque chose de très prisé actuellement », relève Bernard Alvin. 
 

Jenny Seibert, responsable de marketing et de communication chez Nexa : « L’important, c’est aussi l’adaptabilité, dans notre société qui évolue. Aussi bien pour le collaborateur que pour le manager qui s’adaptera davantage au cas par cas. »
Jenny Seibert, responsable de marketing et de communication chez Nexa : « L’important, c’est aussi l’adaptabilité, dans notre société qui évolue. Aussi bien pour le collaborateur que pour le manager qui s’adaptera davantage au cas par cas. »
 

 

L’INDIVIDU EST-IL INTERCHANGEABLE ?

Le bonheur de ses collaborateurs n’est pas la raison d’être d’une entreprise. « Le but définitif est tout de même de produire plus et mieux. Ce n’est pas de rendre les salariés heureux. On n’en parlait pas il y a vingt ans et peut-être, dans un temps futur, pensera-t-on au contraire qu’il vaut mieux les stresser », temporise Pascal Hamel. « On peut retenir la notion de bien-être au travail plutôt que celle d’épanouissement. C’est plus modéré car il n’y a pas l’obligation de résultat, mais l’envie de mettre les moyens pour cela », conclut Louis-Laurent Léger. L’efficacité de l’entreprise doit aussi être préservée. « On peut préférer parler d’efficience, qui permet d’atteindre ses objectifs en fonction d’un projet », commente Sylvie Hoarau, attachée à la direction de l’Offre des services de Pôle Emploi. Pour cela, la ressource humaine reste indispensable, même si elle peut être remplaçable. « Cette expression confère de l’utilité à la personne, et du sens, car sans son effectif, le grand tout de l’entreprise ne fonctionne plus, ajoute Veena Desmonts. Nous savons, aujourd’hui, que la ressource humaine représente davantage que la simple addition des compétences. » 
Il y a aussi l’intelligence cognitive et les soft skills. « Je trouve plutôt noble de lier à l’humain l’origine des résultats de l’entreprise. Ce qui pose problème, c’est qu’on ne parle pas là de l’intégralité de l’être humain, ni de l’intégralité de la ressource de l’entreprise. Est-ce que cela diminue l’individu qu’il soit interchangeable ? Car une organisation se définit au travers du fait qu’elle fonctionne indépendamment des individus », souligne Franziska Goderbauer. 
 

Franziska Goderbauer, exécutive coach et fondatrice d’ActOI : « Est-ce que les entreprises qui n’acceptent pas l’audace feront encore partie des entreprises de demain ? »
Franziska Goderbauer, exécutive coach et fondatrice d’ActOI : « Est-ce que les entreprises qui n’acceptent pas l’audace feront encore partie des entreprises de demain ? »
 

 

UNE VISION AUDACIEUSE ET PARTAGÉE

La ressource humaine n’est pas facilement remplaçable, et encore moins interchangeable, quand on connaît les difficultés de recrutement à La Réunion dans de nombreuses spécialités professionnelles. Y compris pour des personnels sans qualification, comme pour le lancement d’un fast-food, par exemple. La contribution des collaborateurs est d’autant plus précieuse pour les entreprises. « L’important, c’est aussi l’adaptabilité, dans notre société qui évolue. Aussi bien pour le collaborateur que pour le manager, qui s’adaptera davantage au cas par cas », exprime Jenny Seibert, responsable de marketing et de communication chez Nexa. Après cette phase d’échanges, il faut maintenant construire une phrase qui va définir les pistes de travail pour le premier atelier sous la direction de Conseil & Services. « Et si nous rendions l’écosystème plus agile et en-vie autour d’une vision audacieuse et partagée ? » est finalement la formule approuvée par tous en conclusion de ce forum. Deux pistes de réflexion sont déjà identifiées pour l’atelier : « Se rencontrer pour construire ensemble » et « Bâtir un projet d’équipe personnalisé ».
 

Véronique Stern, chargée de mission Innovation chez Nexa: « La résilience de l’entreprise dépend aussi de la souplesse individuelle et de l’adaptabilité des équipes. »
Véronique Stern, chargée de mission Innovation chez Nexa: « La résilience de l’entreprise dépend aussi de la souplesse individuelle et de l’adaptabilité des équipes. »
 
Nicolas Deloffre, directeur de l’École de la deuxième chance : « À tous les jeunes que nous intégrons chaque année, nous proposons surtout d’être valorisés par un rôle, un statut, qu’ils n’avaient pas auparavant. »
Nicolas Deloffre, directeur de l’École de la deuxième chance : « À tous les jeunes que nous intégrons chaque année, nous proposons surtout d’être valorisés par un rôle, un statut, qu’ils n’avaient pas auparavant. »
 

 

Bernard Alvin, gérant de Bernard Alvin Conseil, spécialisé dans le développement des potentiels et pionnier du management vocationnel : « Aux Etats-Unis, on crée des postes de Chief Happiness Officer, c’est quelque chose de très prisé actuellement. »
Bernard Alvin, gérant de Bernard Alvin Conseil, spécialisé dans le développement des potentiels et pionnier du management vocationnel : « Aux Etats-Unis, on crée des postes de Chief Happiness Officer, c’est quelque chose de très prisé actuellement. »
 
Frédéric Martinetti, coach et collaborateur de Conseil & Services : « Dans un monde idéal, tous les collaborateurs seraient très heureux de permettre à leur entreprise de dégager des bénéfices et de la productivité. »
Frédéric Martinetti, coach et collaborateur de Conseil & Services : « Dans un monde idéal, tous les collaborateurs seraient très heureux de permettre à leur entreprise de dégager des bénéfices et de la productivité. »

Les propositions issues des groupes de travail constitués lors de chaque Tecoma Business Forum feront l’objet d’une publication par l’Eco austral. 

Photos : Guillaume Foulon

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