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L’accompagnent dans la durée : un investissement très profitable

Dans le monde actuel, on a tendance à vouloir tout faire trop vite… L’accompagnement de salariés et de dirigeants n’échappe pas à cette dictature de la vitesse et pas seulement pour des questions de coût. Mais la continuité est un facteur important de réussite.

Accompagner une personne dans une entreprise ou la « coacher », comme on le dit plus trivialement, fait partie du paysage quotidien de la gestion des ressources humaines. Une activité qui semble s’être totalement normalisée même s’il reste des entreprises qui l’évitent pour des raisons diverses : problèmes de coûts, de rapports de pouvoir, d’hostilité à tout ce qui est « psy » ou par manque de temps… Mais si le coaching s’est quelque peu banalisé, il n’en a pas toujours été ainsi. Quand j’ai annoncé que je lançais mon activité en 1991, mon environnement professionnel immédiat s’est montré incrédule. La situation a bien changé depuis !

« Il est de coutume de dire que l’être humain n’exploite que 1% ou 5% de ses capacités ou potentiels, mon expérience me fait penser que ce score est même trop optimiste. »

LA NOTION DE PARCOURS… ET D’HISTOIRE PERSONNELLE

Pourquoi en étais-je venu à décider de lancer cette activité ? En fait, pour moi, elle s’inscrivait DANS LA CONTINUITÉ. Auparavant je m’étais beaucoup investi dans les séminaires de développement personnel et comme j’avais la curiosité de rappeler les participants quelques mois plus tard, ceux-ci me disaient que les formations avaient été formidables, mais qu’ils n’avaient pas réussi à intégrer les enseignements dans leur travail quotidien. J’ai alors pensé que l’accompagnement dans la durée pourrait être la solution. J’insiste sur ce point : j’ai démarré cette activité alors innovante parce qu’elle s’inscrivait dans une continuité. J’ai toujours accordé énormément d’importance à la notion de parcours, et même d’histoire. D’ailleurs, les personnes que j’ai accompagnées savent toutes à quel point je m’attarde sur leur histoire qui possède un avant, un pendant et un après. Dans un monde qui va vite et où le temps est sans cesse raccourci et compressé, c’est une gageure ou même UNE PROVOCATION de défendre une démarche qui prétend s’inscrire dans une continuité et dans la durée ! Aujourd’hui, on vante les mérites des thérapies brèves car elles permettent d’obtenir des résultats très rapidement. On n’a plus le temps de faire une psychanalyse ! Le coaching a également suivi cette tendance à la brièveté et les parcours sont en général plutôt réduits. Je discutais récemment avec un dirigeant de grande entreprise m’indiquant que, chez lui, les coachings ne dépassaient pas 20 heures d’intervention au total. Cela est très fréquent dans le monde actuel de l’entreprise. En ce qui me concerne, je prends beaucoup plus en compte la notion de temps. Tout d’abord, mes accompagnements durent environ 40 heures ou plus, à cela s’ajoutent 40 autres heures de travail me concernant car je rédige un rapport suite à chaque séance, sachant qu’une heure d’accompagnement me donne une heure de travail d’écriture. Je termine chaque session des 40 heures par une séance de restitution avec les principaux acteurs engagés dans le processus, la personne accompagnée, moi-même, le DRH et le manager. Il n’est pas rare qu’au vu des résultats, nous définissions des « piqûres de rappel » pour prolonger le travail et consolider les acquis, mais aussi pour atteindre d’autres objectifs. Par ailleurs, je réalise une veille (non rémunérée) pour toutes les personnes que j’ai accompagnées, celles-ci peuvent me consulter à tout moment.

« Il n’est pas rare qu’au vu des résultats, nous définissions des piqûres de rappel pour prolonger le travail et consolider les acquis, mais aussi pour atteindre d’autres objectifs. » -Stocklib@Le Moal Olivier

« Il n’est pas rare qu’au vu des résultats, nous définissions des piqûres de rappel pour prolonger le travail et consolider les acquis, mais aussi pour atteindre d’autres objectifs. »

BIEN PLUS QU’UNE FORMATION

À présent, je possède un très grand recul sur ce métier et l’un des enseignements que j’en tire est que cette notion de temps est plus que fondamentale. L’accompagnement est non seulement une formation, mais aussi « une éducation », il fait « grandir » les personnes. La croissance d’une personne ne s’arrête pas à l’adolescence ! Elle se poursuit toute la vie ! Pour moi, l’éducation devrait être un processus permanent. Nous avons à gagner en maturité et en sagesse toute la vie durant ! La maturité ou la sagesse nous évitent bien des erreurs et nous fait prendre de meilleures décisions. Nul doute que tout ceci a un impact économique important.
Je vois parfois des managers hostiles à l’accompagnement « faute de temps, faute d’argent, etc. » et qui enchaînent action sur action se terminant toutes par des échecs rapidement oubliés ou transformés en pseudo-succès grâce à la magie de la communication. Si ces personnes prenaient le temps de s’arrêter un instant pour prendre de la hauteur sur leurs événements, notamment avec l’aide d’un expert qu’est l’accompagnateur, alors elles s’éviteraient bien des déboires et gagneraient en résultat. Cette notion de résultat est souvent mise en avant pour justifier des décisions au couperet qui se font sans regarder les contextes et donc les dommages collatéraux qu’elles vont engendrer. Tout se passe comme si « voir plus large » était politiquement incorrect !

« On ne change pas pour changer, mais pour parvenir à des niveaux supérieurs d’efficacité personnelle et collective. »

FAIRE RIMER DÉVELOPPEMENT PERSONNEL AVEC DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE

Pour en revenir aux accompagnements, mon expérience me fait dire que, non seulement il ne faut pas les raccourcir, mais qu’il faut même envisager des « rallonges de temps ». Quand une personne a engagé un processus de changement ou d’accélération du changement, il faut parfois un certain temps pour qu’il soit bien intégré. Plus le changement est important et plus cette réflexion a de l’importance. On ne change pas pour changer, mais pour parvenir à des niveaux supérieurs d’efficacité personnelle et collective. Pour moi, l’efficacité rime avec valeur ajoutée économique car progresser dans sa vie professionnelle sans que cela se voit au niveau économique m’apparaît toujours incongru. Ma philosophie de l’accompagnement consiste à faire rimer développement personnel avec développement économique. On pourra me rétorquer que je milite à fond pour la progression de la société de consommation vu les propos que je tiens, pourtant ce n’est pas le cas. Je constate que les personnes que j’accompagne orientent leurs projets de façon plus humaine, plus sociétale. Car la croissance peut être « écologique » dans le sens d’une prise en compte des intérêts premiers de l’homme et de sa nature. Mes travaux permettent souvent à mes clients d’être plus innovants et l’innovation peut permettre d’assurer un développement plus en rapport avec les intérêts supérieurs de l’être humain. Si demain l’innovation débouche sur l’invention du moteur à eau non polluant, ce progrès pourra être labellisé « écologique ». Mais je n’irai pas plus loin dans ce débat « écologique » car ce n’est pas mon expertise ni ma vocation de parler de cela, ce qui ne m’empêche pas d’avoir une certaine vision que j’intègre dans mes travaux. Le concept de « développement durable » est à la mode, mais dans la pratique, c’est plus souvent une mode qu’une vraie réalité. Le monde économique est ainsi fait, il vit souvent au rythme des modes…

L’ACCOMPAGNATEUR NE DOIT PAS ÊTRE UN GOUROU

S’il y a bien une activité à forts potentiels de développement durable », c’est précisément l’accompagnement des hommes dans le temps. Je milite pour que les décideurs des entreprises, non seulement intègrent toujours plus l’importance de l’accompagnement, mais qu’en plus ils intègrent l’importance de rallonger les temps d’accompagnement. Cela peut se faire de différentes façons, par exemple avec ces fameuses « piqûres de rappel », avec des « rallonges » ou par un travail sur soi par intermittence… Certains managers me rétorquent qu’on produit ainsi une certaine « dépendance » à l’accompagnement et à l’accompagnateur. J’entends bien ce risque qui peut être réel, néanmoins tant que la personne « grandit », s’élève, se développe et se responsabilise, je ne vois pas bien où est le problème. Faut il fixer une limite aux potentiels humains ? À la liberté ? À la communication ? À l’éducation ? À l’élévation des hommes ? La notion de dépendance renvoie à celles de secte, de sectarisme et de gourou. Mais il ne me semble pas que les gens grandissent personnellement dans les sectes. De toute façon, ce travail reste basé sur la volonté et la liberté totale de chacun. Je n’ai encore jamais « obligé » un manager à se faire coacher ou à coacher quelqu’un ! Qu’on m’arrête si une telle idée m’habitait un jour !
On me pose parfois également la question des « mauvais coachs ». Il en existe, c’est vrai, mais connaissez-vous une profession où il n’y ait que des « top performants » ? Ce n’est pas parce qu’il y a quelques « amateurs » dans un métier qu’il faut jeter le métier !
 

INSUFFLER UN VENT D’OPTIMISME

Il est de coutume de dire que l’être humain n’exploite que 1% ou 5% de ses capacités ou potentiels, mon expérience me fait penser que ce score est même trop optimiste. Dans le sport, on dit qu’on ne change pas une équipe qui gagne, alors pourquoi faudrait-il procéder autrement en ne renouvelant pas la confiance dans une méthode ou dans un expert qui gagne ou fait gagner ? Dans ces temps de grand pessimisme ambiant, ne serait-il pas bon d’insuffler un vent nouveau d’optimisme ? L’accompagnement durable m’apparaît justement comme un excellent vecteur d’optimisme ! Il ne s’agit pas d’un optimisme béat mais d’un optimisme réfléchi, en un mot « une sagesse ». Souvent, j’observe qu’on représente les sages avec un visage reposé, serein et souriant.
Pour en revenir à la comparaison avec le sport, a-t-on déjà vu un sportif gagner une épreuve ou une compétition avec l’air triste ? À observer ce qui s’est passé au Maracana pendant la Coupe du monde de football, sur le terrain ou dans les tribunes, les vainqueurs étaient plutôt en liesse. Si « le travail, c’est la santé », comme le chantait Henri Salvador, alors l’accompagnement durable, c’est pour moi la voie du bonheur. Et le bonheur, c’est encore mieux que la santé.

bernard.alvin.conseil@wanadoo.fr


Bernard Alvin est à la tête de son propre cabinet, Bernard Alvin Conseil, fondé en 1995 et spécialisé dans l’accompagnement des hommes dans le domaine du développement des potentiels. Bernard Alvin a « coaché » ses premiers cadres et dirigeants dès 1991, faisant figure de pionnier avant que n’arrive la mode du coaching. Cherchant à aller plus loin, il fera émerger le concept de « management vocationnel » à partir de 2005. Il a pratiqué son métier en France métropolitaine, dans les DOM-TOM et dans plusieurs pays dans le monde, dont le Brésil. Il intervient en effet en français, en anglais et en portugais.