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« Aucun des candidats à l’élection présidentielle n’a une énergie d’impulsion »

Rencontre avec un expert en ressources humaines qui a commencé comme officier parachutiste à la Légion étrangère avant d’accompagner des cadres et dirigeants d’entreprise. Un parcours qui l’a conduit à écrire un livre très pertinent : Le temps des chefs est venu, autopsie de la personnalité présidentielle & solutions pour l’avenir (Amazon, 2016). Son blog est disponible ici.

L’Eco austral : Votre démarche est originale puisque vous n’abordez pas la politique par les programmes mais par la personnalité de ceux qui les conduisent. Cela vaut-il pour l’élection présidentielle à laquelle se prépare actuellement la France ?
 
François Bert : Je crois précisément qu’elle en est la meilleure démonstration. Cette élection incroyable de légèreté et de variabilité nous a montré en effet à quel point le programme était à la marge des débats et que, bien davantage que de crédibilité des mesures proposées, il était question avant tout de la personnalité des candidats. Les médias ont voulu aborder cette question sous l’angle moral en concentrant tous leurs efforts ou presque sur les « affaires ». Mais le sujet n’est pas là. Il est, si j’ose dire, « fonctionnel » : un président ne doit pas d’abord être irréprochable mais être en capacité de « faire le job », de traverser les épreuves à venir et les transformer en décisions. Le programme, aussi solide soit-il, reste une aide à la vente beaucoup plus qu’un canal d’exercice du pouvoir : le président sera surtout accaparé par l’inconnu qui se prépare et c’est en le gérant qu’il montrera sa valeur.
 
On connaît la remarque de Charles Pasqua selon laquelle « les promesses électorales n’engagent que ceux qui les croient ». Est-ce que les vrais chefs tiennent leurs promesses ?
 
Les vrais chefs s’abstiennent surtout d’en faire trop… Ils savent précisément que les tourments qui les attendent obligent à la retenue et à l’humilité. Ils ne vendent pas un plan d’action exhaustif mais une capacité à décider dans l’incertitude et à rebondir contexte après contexte. Un programme crédible (et tenable) devrait se réduire à des orientations générales. Promettre, puis se dédire ou justifier son reniement par les revirements de situation, c’est agir dès le départ en vendeur inconséquent ou en expert déconnecté. Tenir sa parole est une qualité indispensable pour un chef qui veut durer et honorer sa fonction. Il ne faut pas l’engager par conséquent à la légère. Le général de Gaulle a fait sur ce sujet beaucoup de mal.
 
Dans votre livre, vous distinguez les figures du prêtre, du prophète et du roi, ce dernier étant le chef par excellence. Qu’est-ce qui les caractérise et parmi les onze candidats à la présidence de la République, quels sont les prêtres, les prophètes et les rois ?
 
Nous sommes effectivement, selon l’image biblique, tous « prêtres, prophètes et rois », mais il y a bien des « prêtres », des « prophètes » et des « rois ». Les prêtres sont les « relationnels », ceux qui ont d’abord l’intelligence des personnes et produisent du lien ; les « prophètes » sont les « cérébraux », ceux qui ont d’abord l’intelligence du fond et produisent du contenu (idées, avis, expertise) ; les « rois » sont les « chefs naturels », ceux qui ont d’abord l’intelligence des contextes et produisent de la décision. J’ajoute à la vision de ces figures celle de l’énergie fondamentale des gens : il y a ceux qui sont d’abord en « impulsion » (capacité d’initiative, auto génération de la vision) et ceux qui sont plutôt en « réaction » (génération d’une vision au contact et en complément d’un chef ou d’un groupe). Un fait est notable : aucun des candidats actuels n’a une énergie d’impulsion ; tous dépendent de leur environnement pour générer et faire évoluer leur vision.

  • Dans la famille des « prêtres » nous trouvons Marine Le Pen, Jean Lassalle, Nicolas Dupont-Aignan et Philippe Poutou.

  • Dans la famille des « prophètes », nous trouvons Benoît Hamon, Emmanuel Macron, Jean-Luc Mélenchon, Jacques Cheminade, François Asselineau et Nathalie Arthaud.

  • Dans la famille des « rois » : François Fillon (notons que l’énergie de « réaction » fait de lui un « chef en second », c’est-à-dire davantage un premier ministre qu’un président).

 
L’intégralité de cet entretien sera publié dans le numéro d’avril de L’Eco austral.