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Réunion

Bilan du premier Forum international de l’économie circulaire

Premier rendez-vous de ce type dans l’Outre-mer français, cet événement à l’initiative de Nexa, l’agence régionale de développement, a rassemblé près de 400 personnes, du 26 au 30 septembre, et a permis de s’ouvrir à des réseaux d’experts pour déployer de nouvelles ambitions.

«Ce premier Forum avait pour ambition de mettre en avant les talents de notre territoire et de montrer que l’économie circulaire est déjà riche en activités et en initiatives. » Gaston Bigey, directeur général de Nexa, l’agence régionale de développement, d’investissement et d’innovation, veut faire de La Réunion une île exemplaire par ses solutions durables et la placer sur la carte mondiale de l’innovation en matière d’économie circulaire. Avec l’éclairage du « benchmarking » apporté par d’autres territoires, de nombreux acteurs privés et publics ont participé à des ateliers de réflexion sur des stratégies territoriales ou des projets d’entreprise. Une cession d’échanges B to B a permis d’initier des projets de partenariat entre des entreprises locales et des opérateurs africains ou européens. « La connexion entre ceux qui font et ceux qui accompagnent est souvent déterminante pour la réussite et l’expansion d’un projet », témoigne Jordan Junge, gestionnaire de programmes chez SIX, réseau mondial pour l’innovation sociale basé à Londres. Par la mise en relation avec d’autres projets et solutions connexes à travers le monde, SIX a facilité le développement de nombreux projets d’économie circulaire en Afrique. 

POUVOIR INFLUENCER L’ÉVOLUTION DES LOIS 

Laboratoire du développement durable en milieu insulaire tropical, La Réunion inscrit la transition écologique au cœur d’un nouveau modèle de développement économique. L’économie circulaire constitue désormais un levier opérationnel de sa Stratégie de spécialisation intelligente (S3) pour la recherche et l’innovation. « L’économie circulaire, c’est facile, c’est moderne, c’est de l’innovation, de la valeur ajoutée et cela fonctionne », décline Nicolas Imbert, directeur exécutif de Green Cross France & Territoires et administrateur de l’Institut français pour l’économie circulaire. Cette ONG à but environnemental, fondée par Mikhaïl Gorbatchev en 1993, dispose de 250 experts contributeurs et accompagne une vingtaine de projets en France. « Nous menons des actions de plaidoyer, de l’échelon local à l’échelon international, et nous y associons le milieu bancaire pour envisager un développement à grande échelle. L’économie circulaire est un projet de transformation à moyen et à long termes et il est indispensable de s’y impliquer tous ensemble pour échanger des expériences, trouver des solutions et peser d’un point de vue législatif. » En présentant, en commun, les retours d’expérience de petites entreprises, de collectivités, d’éco-organismes, d’associations et de multinationales, Green Cross a pu impulser des programmes de recherche et influer sur l’exercice législatif qui a conduit, en 2015, à inscrire l’économie circulaire comme priorité au sein de la Loi sur la transition énergétique. Ce savoir-faire organisationnel pourrait être valorisé à La Réunion. 

INSPIRER DES AMBITIONS EN INDIANOCÉANIE 

Un territoire insulaire comme La Réunion atteint difficilement le volume critique de matières recyclables nécessaire à la création d’activités industrielles de recyclage. « Il faudrait deux fois plus de polyéthylène téréphtalate pour envisager la fabrication de bouteilles plastiques en PET », informe Olivier Wagner, directeur du centre de tri et de valorisation Cycléa. Une capacité opérationnelle ne pourra se trouver que dans une dimension de coopération régionale. « Au-delà de La Réunion, nous devons inspirer des ambitions dans le bassin indianocéanique, autour de la dimension de coopération. Qu’elle soit financière, dans le cadre de l’utilisation de fonds européens, ou constituée d’échanges technologiques, ou dans le cadre d’institutions qui œuvrent déjà à cette collaboration dans le développement », appuie Philippe Jean-Pierre, directeur du CRI (Comité régional d’innovation). 

UN PROJET DE SOCIÉTÉ 

L’économie circulaire est aussi un projet de société intuitif pour lequel la dimension culturelle est fondamentale. « La dimension de la transformation de nos comportements, notre capacité à donner de l’enthousiasme, à apprendre à apprendre et à donner envie sont également déterminantes », pense Nicolas Imbert. Les volontés individuelles et la volonté collective doivent converger pour mener à bien le projet Réunion. « Ce projet doit être mené avec une dimension didactique. Il y a bien un enjeu de sécurisation de la trajectoire de développement de La Réunion, dans le cours de l’organisation de la société elle.même », ajoute Philippe Jean-Pierre. « Notre but est de développer une économie nouvelle où chacun trouve sa place et, surtout, une économie où nous nous inscrivons tous ensemble », définit Gaston Bigey. 

DES PROJETS INNOVANTS PRÉSENTÉS AU VILLAGE DES INITIATIVES

Alexandra Defaud-Grac
Alexandra Defaud-Grac, gérante de Blue Deer : « Notre activité de recyclage s’exprime dans la création d’articles de luxe, à Maurice et désormais à La Réunion. » – Guillaume Foulon
 

Le Village des Initiatives, qui s’est tenu le 27 septembre, accompagnant la session plénière du Forum international de l’économie circulaire, a permis de découvrir une quinzaine d’activités innovantes de l’économie circulaire et de l’innovation sociale. Parmi lesquelles Blue Deer, une activité de commerce équitable qui confie à des femmes en situation précaire la fabrication d’articles de luxe à partir de matériaux de réemploi. L’occasion de découvrir également le projet de chauffe-eau solaire low-cost Can’Heat et le nouveau concept d’habitat HomeRun Container. 

LES BOUES D’ÉPURATION DU GRAND PRADO POUR LA FERTILISATION DE LA CANNE

e gauche à droite : Gérald Maillot, président de la Cinor (Communauté intercommunale du nord de La Réunion), Geoffroy Mercier, directeur régional de Veolia Eau Réunion et Frédéric Feder, responsable scientifique du SOERE-PRO Réunion auprès du Cirad. DR
e gauche à droite : Gérald Maillot, président de la Cinor (Communauté intercommunale du nord de La Réunion), Geoffroy Mercier, directeur régional de Veolia Eau Réunion et Frédéric Feder, responsable scientifique du SOERE-PRO Réunion auprès du Cirad. DR

Le procédé de traitement spécifique des boues de la station d’épuration du Grand Prado, gérée par le groupe Veolia à Sainte-Marie, permet de produire des fertilisants organiques adaptés aux sols et aux besoins de la canne à sucre. Ce sont les premières conclusions d’une expérimentation menée, depuis 2013, par le Cirad (Centre de coopération internationale pour la recherche agronomique et le développement) pour un suivi des impacts agro-environnementaux de l’épandage agricole des boues produites par la filière de séchage du Grand Prado. Ces boues présentent un réel intérêt économique et agronomique pour l’azote, le phosphore, le potassium et la chaux qu’elles contiennent. Cette expérimentation, unique en Outre-mer, utilise les moyens d’un programme national de recherche en environnement, le SOERE-PRO. 

AVIFERME LANCE SON ENGRAIS À BASE DE FIENTES DE POULES

Jean-Sébastien Perret, directeur commercial et Olivier Chong-Fah-Shen, gérant de Terla qui a été lancée par Aviferme. DR
Jean-Sébastien Perret, directeur commercial et Olivier Chong-Fah-Shen, gérant de Terla qui a été lancée par Aviferme. DR

Appartenant au groupe familial Chong-Fah-Shen, présent dans la grande distribution, le BTP et l’élevage, la société Aviferme produit environ 30% des œufs de La Réunion. Lancé en septembre, son nouveau produit Terla est un engrais naturel et organique élaboré à partir de fientes de poules. Premier engrais produit localement de façon industrielle, Terla s’inscrit dans une démarche d’économie circulaire. Par son aspect économique, provenant d’un élevage local utilisant des aliments produits localement. Par son aspect environnemental d’engrais non polluant à faible empreinte carbone et par son aspect sociétal illustré par la création de trois emplois. Le process industriel, qui utilise l’air chaud de la ventilation de l’élevage, représente 4 millions d’euros d’investissements, accompagnés d’aides européennes et régionales. La production actuelle peut atteindre 2 500 tonnes.