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Maurice

Emmanuelle Coquet : Le goût d’entreprendre

Avec The Gourmet Emporium elle a fait le pari de la gastronomie et des solutions culinaires, permettant à l’hôtellerie mauricienne de figurer parmi les meilleures du monde. Grâce à ses trois épiceries fines et à son service traiteur, elle propose aux Mauriciens comme aux résidents de nouveaux horizons gourmands.

Rendez-vous est pris au siège de l’entreprise. Et là, c’est le choc. Un va-et-vient incessant. Des livraisons viennent d’arriver. À droite, en attente pour partir dans la réserve sèche, des boîtes de caviar d’Aquitaine. Là, des caisses de champagne Billecart-Salmon qui iront dans la cave. De l’autre côté encore, d’autres « delicatessen » venus d’Australie et d’ailleurs. Au milieu de ce tumulte, la voici donnant ses instructions, telle une cheffe d’orchestre… ou de cuisine. Son nom : Emmanuelle Coquet, directrice de The Gourmet Emporium. Cette société, créée en 2010, importe et fournit en produits gastronomiques les principaux établissements hôteliers de l’île. Et grâce à ses trois épiceries fines et à son service traiteur, elle ouvre aux Mauriciens et résidents d’autres horizons gourmands.
Emmanuelle Coquet nous reçoit dans un salon aux murs de verre, avec vue imprenable sur l’entrée et le passage des fournisseurs.
Elle reconnaît qu’elle est une hyperactive « ou plutôt une passionnée », rectifie-t-elle avec un léger accent sud-africain, « tombée comme Obélix dans la marmite de la gastronomie ». Son père, Norbert, n’est autre que l’homme qui a implanté la célèbre enseigne d’épicerie fine Hédiard dans l’île…
Née à Maurice en 1976, Emmanuelle, fille unique, est partie à 6 ans avec ses parents en Afrique du Sud. « Je me rappelle de mon arrivée dans ce couvent catholique où moi, la petite francophone je me suis retrouvée dans un milieu lingustique incompréhensible ! » Elle effectuera toutes ses études dans ce pays. Elle rentre à Maurice en 1997 pour travailler avec son père dans l’importation et la distribution de produits alimentaires de luxe. « Je suis entrée au bas de l’échelle, c’est essentiel pour comprendre les contraintes des salariés. » 

Les plus grands noms du secteur

En 2005, elle accepte une offre pour promouvoir à Dubaï des produits australiens. De retour à Maurice, en 2009, elle décide de créer son entreprise : The Gourmet Emporium. Pour cela, elle souscrit un emprunt personnel de 250 000 roupies (6 250 euros) mais utilise un capital de 50 000 roupies (1 250 euros) pour la création de la société. C’est un vrai pari car le contexte économique local est morose, et surtout il y a de la concurrence. Mais pourquoi ce nom ? « Il m’est venu en un éclair dans l’ Eurostar (train à grande vitesse) qui m’emmenait de Londres à Bruxelles », confie-t-elle sans se départir de son sourire. Dès le début, elle a fait le choix de viser les produits gastronomiques et les solutions culinaires prêtes à l’emploi. Pour cela, elle s’appuie sur des accords exclusifs signés avec de grands noms du secteur, en particulier avec des marques australiennes. Le fait qu’elle était déjà connue du milieu a sans doute été un atout. Mais c’est surtout son expérience, sa connaissance technique des produits et son sérieux qui lui ont permis de s’imposer comme une interlocutrice crédible auprès de ses clients, en particulier les chefs de cuisine. Et il faut une bonne dose de confiance en soi, à tout moins du culot, pour venir proposer à un grand « toqué » de renouveler sa carte qu’elle juge vieillotte ! 
« Beaucoup de mes produits, qui sont choisis chez des distributeurs reconnus, sont importés non pas par bateau mais par avion. C’est le cas du bœuf Harvey, Angus ou Wagyu. C’est clairement un gage de qualité. » Consciente que le temps dans les cuisines est précieux, elle propose aussi aux chefs des viandes prédécoupées et préportionnées. Ce travail est effectué dans un  « atelier de cuisine » dirigé par un boucher-charcutier normand. Dernière trouvaille, elle revient de Madagascar où elle a assisté au lancement d’un site de production de caviar ! « C’est une première dans l’océan Indien ! », assure-t-elle. Elle va d’ailleurs représenter à Maurice ce caviar labellisé Rova Caviar Madagascar.

Faire et se faire plaisir

À la tête d’une équipe de 75 personnes – ou comme elle dit « responsable de 75 familles » -, la jeune femme récolte les fruits de sa stratégie ga gnante avec un chiffre d’affaires qui a progressé 71 % de 2013 à 2017 ! Il a atteint 202 millions de roupies (plus de 5 millions d’euros) l’an dernier. Outre l’importation de produits, elle développe d’autres activités, à savoir trois magasins d’épicerie fine, à l’enseigne L’Épicerie, et un service traiteur qui représentent aujourd’hui 40 % de son chiffre d’affaires. Ces bons résultats sont d’autant plus remarquables qu’Emmanuelle Coquet a fait des choix de management audacieux. Travailler dans un environnement à forte connotation masculine et très exigeant en termes de réactivité est parfois déstabilisant. « J’ai la chance de travailler en binôme avec mon mari. C’est une force supplémentaire pour prendre des décisions stratégiques », clame cette mère de deux enfants, qui aime aussi à rappeler que « le secteur de la gastronomie et de la restauration est l’un des rares métiers où un simple serveur peut, à force de travail, devenir directeur ». Quel appétit ! 

Progression
The Gourmet Emporium a été créée en 2010 avec un capital de 50 000 roupies (1 250 euros). Spécialisée dans l’importation et la fourniture aux hôtels de produits alimentaires gastronomique et solutions culinaires, l’entreprise possède un réseau de trois magasins d’épicerie fine « L’Épicerie » et un service traiteur. Son chiffre d’affaires a progressé de 71 % de 2013 à 2017 où il était de 202 millions de roupies (plus de 5 millions d’euros).

Innovation
The Gourmet Emporium se pose comme une force de proposition pour les professionnels de la gastronomie. Outre la découverte, la présentation et l’importation de nouveaux produits, son implication permet au secteur d’être au courant des dernières tendances culinaires. Elle propose aux chefs des morceaux de viande prédécoupés et préportionnés, plus efficients et plus économiques. L’entreprise va représenter la marque de caviar Rova Caviar Madagascar à Maurice, une première dans l’océan Indien.

Dynamisme à l’extérieur
Principalement importatrice, l’entreprise soutient la production locale proposant à ses contacts extérieurs de découvrir la gastronomie et les produits mauriciens, par exemple en exportant des « currys » locaux. Emmanuelle est en phase de franchisation de son modèle d’épicerie fine, « en Afrique du Sud, voire en Inde ».

Engagement citoyen
Emmanuelle Coquet a aidé à lancer les Chefs du Cœur, une association de chefs et de personnalités de l’hôtellerie, qui organise des soirées gastronomiques pour lever des fonds pour soutenir de bonnes causes. Elle gère aussi dans la région de Riambel (sud de l’île) le programme « Foot for the future » qui associe soutien sportif (achat de chaussures, de ballon et recherche de sponsors) et programme d’alphabétisation pour des enfants défavorisés. Elle est également présidente honoraire de l’association Ailes (Aides, infos, liberté, espoir et solidarité) qui soutient les malades et les personnes atteintes du VIH.