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PATRICK LEBRETON VICE-PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL, EN CHARGE DE L’ÉCONOMIE « L’année 2022 sera une année charnière »

Révision du Schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation, toilettage du Schéma d’aménagement touristique de La Réunion et de l’octroi de mer, redéploiement du programme opérationnel européen 2021-2027… Patrick Lebreton, vice-président du Conseil régional, en charge de l’Économie, explique pourquoi cette première année de mandature va être décisive.

Pour Patrick Lebreton, pas d’ambiguïté : « À la mi-mars notre premier budget sera voté : 2022 ne sera pas une année de maîtrise totale de la dépense, mais ce sera une année charnière. Plusieurs dispositifs arrivent à échéance et seront révisés. Ainsi du Schéma régional de développement économique d’innovation et d’internationalisation (SRDEII) qui arrive à terme. Nous allons procéder à une révision complète de celui- ci. Aides aux entreprises, investissement immobilier, attractivité du territoire, innovation, soutien à l’internationalisation, égalité hommes femmes, autant de thèmes qui seront révisés. Fin 2022, le nouveau SRDEII doit être opéré avec, entre autres, l’identification de nouveaux comités de filières comme, par exemple, l’aéronautique. » 

Un outil d’autonomie fiscale

En ce qui concerne le Schéma directeur d’aménagement touristique de la Réunion, mis en place en 2004, il reconnaît que c’est un « gros chantier d’autant plus impératif suite à la crise sanitaire ». Mais pour cela, la question des finances est évidemment centrale et l’équipe régionale entend s’attaquer à un sujet lourd, celui de l’octroi de mer. 
« L’octroi de mer est le deuxième axe fort de notre politique économique. L’octroi de mer vise à contribuer à la création, au maintien et au développement d’activités. Or les chefs d’entreprises nous disent bien combien l’industrialisation est possible, mais avec un plus fort soutien régional à la production locale. Simplement, il faut avoir la main. L’octroi de mer le permet. Par exemple, quand il y a eu la pandémie, il y a bien eu la mise à taux zéro des masques. Le taux zéro sur les véhicules électriques en matière de développement durable se pratique aussi. Même chose en matière de culture avec le taux zéro sur les livres. On peut très bien imaginer la même chose pour une entreprise qui démarre. Mais cet octroi de mer est aussi un outil d’autonomie fiscale pour les collectivités locales qui pèse lourd dans leurs finances, il faut donc faire attention. »
Au côté de ces deux chantiers prioritaires, la Région va s’atteler au déploiement du programme opérationnel européen 2021-2027 avec la finalisation des fiches actions : « C’est un rendez-vous qui marquera de manière très forte les orientations des années à venir et fera de 2022 une année charnière. » « Nous voulons également ouvrir de nouveaux horizons pour notre économie. C’est pourquoi nous soutenons le projet de création d’une compagnie maritime régionale. Pour réussir le développement économique régional il nous faut maîtriser les outils de désenclavement, qu’ils soient aériens, maritimes ou numériques. C’est pourquoi on ne peut pas concevoir qu’Air Austral soit abandonnée, mais on ne peut pas soutenir quoiqu’il en coûte. »
 

« Nous voulons ouvrir de nouveaux horizons pour notre économie. C’est pourquoi nous soutenons le projet de création d’une compagnie maritime régionale. »  ©Droits réservés
 

Maîtriser les outils de désenclavement 

Mais la Région a-t-elle encore les moyens de ses ambitions, notamment avec le chantier de la Nouvelle route du littoral qui pèse sur ses comptes ? Pour Patrick Lebreton : « Nous ne voulons pas être à la Région pour payer les ardoises inconséquentes de l’équipe précédente, même si la gestion de la collectivité est aussi la poursuite des actions engagées auparavant en plus de nos propres projets. Nous voulons d’abord connecter la partie réalisée de cette route. Il y a ensuite un plan de règlement et de médiation qui est en cours et il faut que ceux qui le peuvent fassent des efforts. C’est un chantier fortement poussé par l’État et nous pensons qu’il ne peut pas faire moins qu’il ne l’a fait sous l’ancienne majorité. Mais il nous faudra aussi une politique avec un certain nombre d’économies. Nous devons retrouver très vite des moyens et des marges pour agir : 2022 sera une année charnière, une année vérité. » 

Le projet régional se dessine
 

Le Conseil régional a présenté le 26 janvier dernier son projet de mandature qui donne quelques premières indications sur les orientations que la collectivité entend donner à son action de soutien aux entreprises et à l’activité économique. La nouvelle majorité régionale, ancrée à gauche, annonce sa volonté de soutenir l’économie sociale et solidaire, en accompagnant financièrement une centaine de projets par an et en créant une « banque régionale solidaire ». Également en projet, un « fonds réunionnais d’investissement stratégique », société d’investissement à laquelle tous les Réunionnais pourraient contribuer, un fonds d’amorçage des projets innovants et une prime régionale à l’emploi numérique. Au chapitre du soutien à l’innovation, la création d’une « agence régionale de l’innovation » fait s’interroger sur l’avenir de Nexa, tout au moins sous sa forme actuelle. Pour le reste, les orientations régionales semblent s’inscrire dans la continuité, avec des variantes dont les détails restent à préciser : fonds d’investissement pour consolider les fonds propres des TPE-PME, poursuite du projet de marketing territorial…
La collectivité confirme également son soutien au projet de compagnie maritime régionale, qui semble toutefois avoir du mal à se dessiner, et affirme sa volonté de poursuivre l’aménagement de la zone d’activités Pierre-Lagourgue, à Gillot, tout en la connectant avec le projet « plaine de Gillot » porté par la Communauté intercommunale du nord de La Réunion (Cinor) sur les terrains Payet. Huguette Bello, Patrick Lebreton et leurs équipes ont jusqu’à 2028 pour concrétiser ces ambitions, dans un contexte budgétaire particulièrement tendu.
Bernard Grollier

 

« L’agroalimentaire est une compétence régionale »
 

La Région Réunion a cédé la compétence agricole au Département en 2012. C’est la seule Région de France à l’avoir fait, selon Patrick Lebreton. Il souhaite aujourd’hui revenir sur cet état de fait. « À la mi-2022 auront lieu les assises régionales de l’alimentation. C’est la chambre d’agriculture qui en est le fer de lance, mais la Région sera très présente. Car se pose la question de l’autonomie alimentaire, mais aussi celle de la place de l’agriculture dans une stratégie de développement économique. Pour cela, il faut une mobilisation de tous les acteurs privés comme publics. Il faut qu’il y ait une coordination des moyens sur l’aménagement du territoire, mais aussi sur le cadre financier à mettre en place », explique Patrick Lebreton. 
Pour lui : « On ne peut pas parler de l’agroalimentaire sans la Région. L’agroalimentaire est une compétence de la Région et l’élément structurant du développement économique du territoire. Et ça pose la question de l’exercice de la compétence agricole. Quand on parle d’autonomie alimentaire, c’est le Département qui est mis en avant. Mais nous sommes la seule région de France à ne pas exercer cette compétence agricole. Je ne dis pas que la Région va faire la guerre avec le Département, mais c’est important de poser la question. Nous sommes aujourd’hui dans une démarche de concertation avec le Département. En 2012, l’ancienne majorité lui a cédé cette compétence agricole. Sauf que les lois ont évolué et les pouvoirs régionaux ne peuvent pas être au-dessus des lois. Nous ne sommes pas des révolutionnaires. Nous avons de bons rapports avec Cyrille Melchior, le président du Département, et Serge Hoareau, son vice-président en charge de l’Agriculture, mais c’est un sujet important à mettre sur la table. »