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Ramalingum Maistry, président de la Mauritius Ports Authority : « Maurice est l’escale idéale sur l’axe Afrique-Asie »

Élément majeur de la stratégie visant à faire de l’océan un nouveau pilier économique, le port de Maurice va recevoir des investissements considérables pour être un vrai hub régional.

L’Eco austral : La « Mauritius Maritime Week » vient de s’achever. Quel bilan en tirez-vous ?
Ramalingum Maistry
: La première édition de la Mauritius Maritime Week a connu un franc succès. Des délégations venues de 36 pays et de nombreux experts internationaux spécialisés dans différentes activités portuaires étaient présents. Une conférence sur la logistique dans les ports de l’océan Indien a mis en place une plate-forme de réseautage à l’intention des professionnels du secteur portuaire. 

Maurice mise énormément sur l’économie bleue. Quel est le rôle de la Mauritius Ports Authority (MPA) dans cette stratégie ?
Si la terre a été pendant des siècles le pilier du développement à Maurice, l’avenir de notre nation insulaire va dépendre de plus en plus de notre vaste territoire océanique. La Zone économique exclusive (ZEE) de Maurice est de 1,9 million de km2 et, suite à un accord de cogestion avec les Seychelles, elle a été étendue de 396 000 km2 sur le plateau continental. Le succès du seafood hub s’explique aussi par le fait que la MPA a fourni aux opérateurs les facilités nécessaires pour charger, décharger et transformer le poisson dans les meilleures conditions possibles. Et nous nous préparons déjà à accueillir tous ces bateaux de pêche qui utiliseront bientôt les infrastructures modernes du futur Fishing Village de Bain-des-Dames, conçu par la MPA. Maurice, en tant qu’étoile et clé de la mer des Indes, est l’escale idéale sur l’axe maritime Afrique-Asie. Le Premier ministre mauricien, Pravind Jugnauth, a d’ailleurs annoncé lors de cette conférence des investissements considérables dans les infrastructures portuaires, estimés à 23 milliards de roupies (575 millions d’euros – NDLR).

L’un des points importants soulevés lors de la conférence est l’émergence d’une activité de « bunkering » (soutage). Pouvez-vous nous en dire plus ?
Le corridor maritime Asie-Afrique est fréquenté par quelque 35 000 bateaux qui passent, chaque année, d’un continent à l’autre. L’International Bunkering Industry Association (IBIA) a émis des prévisions sur la croissance du trafic et, encore une fois, l’avenir s’annonce brillant. Selon Robin Meech, président de l’IBIA, Maurice peut augmenter sa capacité à un million de tonnes en quatre ans. Singapour et Durban sont les acteurs principaux du secteur du « bunkering ». Cependant, l’approvisionnement des navires en carburants d’un nouveau type en conformité avec l’Organisation maritime internationale (OMI) prendra effet en 2020. Maurice a donc une carte à jouer.
 

«  L’International Bunkering Industry Association (Ibia) a émis des prévisions sur la croissance du trafic maritime et, encore une fois, l’avenir s’annonce brillant. »
«  L’International Bunkering Industry Association (Ibia) a émis des prévisions sur la croissance du trafic maritime et, encore une fois, l’avenir s’annonce brillant. »
 

Quels sont les autres projets majeurs qui ont été réalisés et ceux qui sont prévus par la MPA en vue de faire du port mauricien le hub de la région ?
La MPA a investi 6,5 milliards de roupies (162,5 millions d’euros –NDLR) dans l’agrandissement du terminal à conteneurs, le Mauritius Container Terminal (MCT). La profondeur du quai est passée de 14,5 mètres à 16,5 mètres, faisant de Port-Louis le port le plus profond du sud-ouest de l’océan Indien, tout en augmentant sa capacité d’environ 1 million de TEU (twenty-foot equivalent units, en français équivalent vingt pieds, EVP). De plus, en prévision du boom dans le trafic de porte-conteneurs, la MPA a lancé une étude pour la construction d’un autre terminal en face du MCT. Ces infrastructures permettront à Port-Louis de devenir l’un des plus importants ports de conteneurs de la région avec une capacité totale de plus de 2,5 millions EVP.

Maurice a l’ambition d’être un vrai hub régional. On peut donc parler de concurrence entre les ports. Quelles sont vos relations avec eux et notamment avec celui de La Réunion voisine ?
Les coûts élevés du fret aérien et la faible fréquence du service font que le transport maritime a encore de beaux jours devant lui. Mais nous devons améliorer notre efficience et continuer de planifier, planifier sans cesse, afin de nous adapter à un environnement maritime international qui change rapidement. Il est normal qu’il y ait une concurrence entre les ports de l’océan Indien. 
Cependant, je pense que sur l’axe Asie-Afrique, chaque port peut se trouver un marché de niche afin de générer des revenus et s’attirer une nouvelle clientèle. La Réunion est un partenaire qui a beaucoup à offrir, par exemple, concernant les possibilités de formation et d’approfondissement de compétences pour les Mauriciens s’y rendant. Port-Louis, lui, peut offrir sa capacité d’entreposage, de stockage, sa plate-forme de transformation ainsi que les mesures incitatives disponibles dans son port-franc et surtout à des coûts réduits.

Vous venez d’être élu à la tête de l’Association des ports des îles de l’océan Indien (APIOI), qui regroupe les ports de Madagascar, de Maurice, de Mayotte, des Seychelles, des Comores et de La Réunion. Quels sont vos objectifs durant ce mandat ?
Je veux fédérer les énergies et trouver un modèle régional plus performant. L’association a décidé lors de sa dernière assemblée générale de poursuivre ses actions prioritaires. Il s’agit du tourisme de croisière, de la formation et de la problématique de la mixité entre villes et ports de l’océan Indien. Concernant le tourisme de croisière, il n’aurait pas connu un tel succès s’il s’était limité à Maurice. Il a fallu unir les forces de tous les ports de la région pour mettre en place l’infrastructure et l’encadrement nécessaires pour faire du circuit océan Indien un produit performant et attractif. Et l’APIOI réfléchit à une optimisation et une homogénéisation des conditions d’accueil des navires dans nos ports. Elle va proposer un cahier des charges et recruter un cabinet d’étude pour étudier l’accueil des bateaux de croisière dans chaque port. 
L’APIOI compte aussi s’associer aux Îles Vanille pour développer et promouvoir les croisières dans notre région.  Sur la question de la valorisation du capital humain, nous avons, avec l’aide du cabinet réunionnais Isodom, identifié deux thématiques : la sûreté portuaire et l’approche commerciale. Un budget de 150 000 euros, prévu par l’Agence française de développement (AFD), est disponible dans le cadre du Plan de renforcement des capacités commerciales (PRCC), piloté par l’Union des chambres de commerce et d’industrie de l’océan Indien. Enfin, l’APIOI compte promouvoir la mixité entre les villes et les ports avec la création d’une antenne de l’Association internationale villes et ports (AIVP) dans l’océan Indien.

APIOI, UNE ASSOCIATION ENCORE MÉCONNUE
L’Association des ports des îles de l’océan Indien (APIOI), qui a vu le jour à Toamasina (Tamatave) en 2007, est le groupement d’intérêt des ports de Madagascar, de Maurice, de Mayotte, des Seychelles, des Comores et de La Réunion. Son siège social se trouve à La Réunion. Reconnue comme le bras maritime de la Commission de l’océan Indien, elle est appelée à jouer un rôle moteur dans la promotion d’une coopération dynamique entre les autorités portuaires de chacune des îles.