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Nigeria

Première économie africaine devant l’Afrique du sud

Le Nigeria a provoqué un véritable séisme en devenant, le dimanche 6 avril, la première économie du continent. En changeant ses calculs statistiques, le pays le plus peuplé d'Afrique et le premier producteur de pétrole africain, est passé devant l'Afrique du Sud.

Le Nigeria a enregistré un PIB (produit intérieur brut) de 510 milliards de dollars en 2013 a annoncé le chef du Bureau national des statistiques, Yemi Kale. En 2012, le PIB du pays était de 453,9 milliards de dollars, selon cette même méthode, alors qu'il était de 384 milliards de dollars pour l'Afrique du Sud la même année.
 Des statisticiens des Nations unies recommandent aux pays de modifier tous les cinq ans le mode de calcul de leur produit intérieur brut pour prendre en compte les évolutions dans la production et la consommation, mais le Nigeria n'avait pas modifié sa méthode de calcul depuis 1990. 
Les nouveaux chiffres, qui prennent en compte l'apparition et le développement rapide de nouveaux secteurs et de nouvelles industries, notamment les télécommunications et l'industrie locale du cinéma, Nollywood, donnent aux investisseurs étrangers une vision plus réaliste de l'économie du pays. Mais, selon les experts, ces chiffres ne doivent pas être interprétés comme un signe de développement, l'Afrique du Sud étant largement devant le Nigeria en termes de PIB par habitant, d'infrastructures et de gouvernance.
 Si une petite partie de la population est extrêmement riche, la grande majorité des quelque 170 millions de Nigérians vit avec moins de deux dollars par jour, dans un pays — le plus peuplé d'Afrique — qui manque cruellement d'infrastructures, où tous n'ont pas accès à l'eau potable, où les coupures d'électricité sont quotidiennes et la corruption endémique.
 Pour Dawie Rodt, de l'Efficient Group, basé en Afrique du Sud, « en termes d'infrastructures et de systèmes de gestion l'Afrique du Sud reste un géant, loin devant le Nigeria ».

«Le changement de méthode de calcul est plus cosmétique qu'autre chose. Mais nous pensons que cela va augmenter les opportunités d'investissement au Nigeria », a estimé de son côté Chuba Ezekwesili, un économiste du centre de recherche Nigeria Economic Summit.



Nollywood et téléphonie mobile



Le Nigeria, principal producteur et exportateur de pétrole africain, a enregistré de forts taux de croissance ces dernières années, devenant de plus en plus attractif pour les investissements des entreprises étrangères, malgré la corruption rampante, les problèmes de vol de pétrole à grande échelle et l'insurrection islamiste qui sévit dans le Nord. 
Le taux de croissance annuel a atteint en moyenne 6,8% entre 2005 et 2013 et les prévisions de croissance pour cette année sont de 7,4%, selon les chiffres du Fonds monétaire international (FMI).
 En comparaison, l'Afrique du Sud a connu un taux de croissance légèrement supérieur à 5% entre 2005 et 2008-9, et peine depuis à dépasser les 3,5%.
 Les télécoms et l'industrie du cinéma comptent parmi les secteurs qui ont le plus évolué au Nigeria depuis 1990.

À cette époque, le Nigeria comptait peu de lignes de téléphone fixe alors qu'aujourd'hui, il s'agit du plus important marché de téléphonie mobile d'Afrique, avec environ 167 millions de lignes en service selon la commission nigériane des communications. 
La très prolifique industrie du film de Nollywood génère quant à elle jusqu'à 590 millions de dollars de chiffre d'affaires annuel, selon Robert Orya, à la tête de la banque nigériane de l'import-export.


Effet psychologique


Certains experts, comme Roelof Horne, de l'Investec Asset Management, attendent de cette révision un « effet psychologique » sur la perception du continent africain par les étrangers.
 Mais pour Pat Utomi, professeur d'économie politique à l'école de commerce de Lagos, ces nouveaux chiffres vont servir les intérêts des décideurs nigérians, alors que « pour l'homme moyen, dans la rue, cela ne veut rien dire ». 
« On devrait s'affairer à transformer l'énorme capital humain disponible dans ce pays en ressources pour aider à réduire la pauvreté et à créer de l'emploi », ajoute-t-il.


Ola AWONIYI