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L’Inde va-t-elle être ruinée par son propre gouvernement ?

Le gouvernement indien a décidé de faire la guerre au cash pour lutter contre la corruption. Face au refuge de la population dans l’or, il envisagerait aussi d’interdire les importations de ce métal. Un cas d’école de la « parasitocratie ».

LA CORRUPTION N’A RIEN À VOIR AVEC LES MOYENS DE PAIEMENT

La corruption existe et a toujours existé. La monnaie, le cash existe et a toujours existé. La corruption utilise la monnaie mais a aussi besoin de réseaux, de téléphones, d’informatique, de papier, etc.. La corruption est un des dommages collatéraux des gouvernements et non pas une conséquence de l’existence de la monnaie. Plus les gouvernements sont gros, plus il y a de bureaucrates, plus les points d’entrée de corruption sont nombreux. Cela n’a rien avoir avec les moyens de paiements. Et les activités légales qui souhaitent échapper à l’impôt en utilisant le cash, les espèces, me direz-vous ? Les gouvernements devraient voir « le noir » comme un indicateur fiable de l’efficacité de leur politique fiscale. Si de plus en plus de gens souhaitent échapper à l’impôt, n’est-ce pas parce que la pression deviendrait trop forte par rapport aux services rendus par le gouvernement ?

S’ATTAQUER À LA MONNAIE : UNE FAUSSE SOLUTION

Un moyen simple de lutter contre la corruption est, pour un gouvernement, de se limiter à promulguer des lois prévoyant l’égalité stricte des individus en droits, des lois s’adressant à tout individu et non à des groupes, des collectivités, etc.. Ainsi, pas de passe-droit, de rente, d’achat de privilèges, de lobbies. Un autre moyen simple est de limiter la bureaucratie, ce qui est d’autant plus facile que les lois et règlements sont simples. Ce n’est pas cette méthode de lutte contre la corruption qu’a choisi le gouvernement indien mais celle de s’attaquer aux espèces, à la monnaie, et de façon brutale, en démonétisant les coupures les plus utilisées. L’économie en est déstabilisée. La roupie s’effondre. L’or s’envole et se paye deux fois le cours officiel en dollars. Mais le gouvernement a la solution à la catastrophe qu’il a lui-même provoquée : interdire les importations d’or, selon une information de l’Indian Bullion & Jewellers Association.
En moyenne, l’Inde importe 700 tonnes d’or par an. D’où, en dehors des frontières de l’Inde, le recul de l’or sous 1 200 dollars l’once, le marché anticipant une baisse de la demande. Mais en Inde, l’or se négocie toujours avec une énorme prime par rapport à son cours officiel en dollar.

UNE MESURE QUI VA FAIRE AUGMENTER LE PRIX DE L’OR

Lorsque votre pays pratique la dévaluation sauvage (10% en trois jours), brade votre travail à l’export et renchérit les biens importés, il est normal que votre réflexe soit d’acheter quelque chose qui conserve sa valeur pour vous défendre. Les Indiens ont choisi l’or et le gouvernement songe à interdire les importations d’or. Conséquence immédiate : l’or va augmenter. Il est probable que cette mesure ne fera qu’accélérer la hausse de l’or sur le marché noir et rendre la contrebande florissante. 
Les gouvernements haïssent l’or et l’idée qu’une monnaie alternative puisse subsister sans eux. C’est exactement pour cette raison que nous pensons que l’or a un rôle à jouer, du fait de la mauvaise gestion des finances publiques dans les démocraties des pays avancés où la corruption règne aussi. Nous achetons de l’or dans des occasions comme celles-ci, lorsqu’il est bas. Ce n’est pas dans l’esprit d’une spéculation sur sa hausse en dollar ou en quelque monnaie étatique que ce soit. Nous le voyons comme une assurance contre l’impéritie de la « parasitocratie ».

(*) Simone Wapler
Elle est directrice éditoriale des publications Agora, spécialisées dans les analyses et conseils financiers. Ingénieur de formation, elle a quitté les laboratoires pour les marchés financiers et vécu l’éclatement de la bulle internet. Grâce à son expertise, elle sert aujourd’hui, non pas la cause des multinationales ou des banquiers, mais celle des particuliers. Elle a publié « Pourquoi la France va faire faillite » (2012), « Comment l’État va faire main basse sur votre argent » (2013), « Pouvez-vous faire confiance à votre banque ? » (2014) et « La fabrique de pauvres » (2015) aux Éditions Ixelles.