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L’or repart mais l’argent a le plus fort potentiel de hausse

En ces temps d’incertitudes, les métaux précieux apparaissent plus que jamais comme des valeurs refuges. Une analyse de Pierre Leconte, fondateur du Forum monétaire de Genève.



Bien qu’il n’y ait toujours pas d’inflation dans la plupart des pays du monde et que la déflation empire, que le dollar US se soit plus ou moins stabilisé contre la plupart des monnaies (entre 1,07 et 1,15 euros) et que les actions US et le pétrole soient en forte reprise, l’or est monté de 1 060 à 1 350 dollars l’once cette année après avoir chuté de façon quasi ininterrompue depuis son plus haut de 1 925 atteint en 2011, il y a cinq ans. Chute qui a été essentiellement due à la hausse du dollar US pendant la période 2011-2015, mais aussi à toutes sortes de manipulations que les « bullion banks » ont effectuées pour pousser à la baisse le métal jaune qu’elles vendent à découvert aux fins de « carry trade » comme pour rentabiliser les « gold loans » qu’elles reçoivent des banques centrales.

LA FUITE DES INVESTISSEURS VERS DES ACTIFS RÉELS

Le motif de la reprise de cette année s’explique par le fait que les taux d’intérêt zéro ou négatifs poussent l’or à la hausse en raison de la fuite des investisseurs vers les actifs réels puisque les instruments à revenu fixe ne rapportent plus rien. Quant aux achats d’or des banques centrales de Chine, de Russie et d’ailleurs, ils n’ont pas d’impact sur le prix de l’or dans la mesure où lorsqu’il y a un acheteur, il y a aussi un vendeur, ce qui s’équilibre. C’est un jeu à somme nulle. Le problème de l’or est que les stocks disponibles sont énormes par rapport à la demande et qu’il n’y a pas non plus de déficit de l’offre physique par rapport à la demande physique. Ce qui n’est pas le cas de l’argent-métal, dont la chute de 50 à 13,50 dollars l’once de 2011 à 2015 a été encore plus forte que celle de l’or. Métal blanc qui est en déficit chronique depuis plusieurs années, la demande physique excédant l’offre physique et les stocks étant détenus par quelques opérateurs (comme JP.Morgan) qui ne les lâchent pas parce ce qu’il s’en servent comme collatéral pour certaines affaires. Étant donné, par ailleurs, que les ratios or/argent métal et or/pétrole ont atteint des niveaux stratosphériques et qu’ils ont commencé leur retournement, nous avons acheté l’argent-métal (sous la forme de deux ETF : USLV et AGQ) et le pétrole mais pas l’or.
 

L’or est monté de 1 060 à 1 350 dollars l’once cette année après avoir chuté de façon quasi ininterrompue depuis son plus haut de 1 925 atteint en 2011, il y a cinq ans.
L’or est monté de 1 060 à 1 350 dollars l’once cette année après avoir chuté de façon quasi ininterrompue depuis son plus haut de 1 925 atteint en 2011, il y a cinq ans.  
 

LA MACHINE À CRÉER DES BULLES EST REPARTIE

La raison principale de la poussée récente de l’or, et plus encore de l’argent-métal, à la hausse tient à la création monétaire massive que les banques centrales viennent de reprendre (ce qui entraîne leurs bil ans largement pourris à des niveaux ahurissants et donc les fragilise), en prétextant un risque consubstantiel au Brexit. En réalité, c’est pour sauver les banques privées qui croulent sous les mauvaises créances et les États surendettés, eux aussi en difficulté, ce qui incite les investisseurs à « se protéger » en allant vers les métaux. En même temps que la Fed a repoussé à beaucoup plus tard toute normalisation monétaire, ce qui ne soutient pas que les métaux mais aussi les marchés d’actions US. La machine à créer des bulles est repartie…
Tout cela ne veut pas dire que l’économie s’en trouvera finalement améliorée, ni que l’inflation reviendra rapidement, mais sert à gagner du temps en évitant que la situation à court terme n’empire. Sans du tout que soit efficacement traité le problème du Système monétaire international qui ne repose plus que sur des zombies, alors que la plupart des banques centrales sont engagées dans des dévaluations compétitives pour faire chuter le plus possible leurs monnaies dont le pouvoir d’achat s’évanouit.

LES ÉVÉNEMENTS POLITIQUES ACTUELS POUSSENT LES INVESTISSEURS VERS LES MÉTAUX PRÉCIEUX

On notera que, dans le cas de l’argent-métal, les positions shorts des producteurs et des utilisateurs aux fins de « hedging » sont à leur record historique, ce qui signifie que lorsqu’ils renverseront ou cesseront leurs couvertures, l’argent-métal pourrait exploser à la hausse ; l’argent est donc le marché des métaux et des matières premières qui, encore plus que le pétrole, a le potentiel de hausse le plus fort… Notre objectif se situe vers 35/37 dollars l’once.
On peut aussi penser que les évènements politiques actuels, comme le Brexit et la désintégration politique de l’Union européenne, ou à venir bientôt, comme l’élection présidentielle américaine toujours aussi incertaine quant à son résultat, poussent les investisseurs vers les métaux précieux qui, à tort ou à raison, leur paraissent offrir une protection adaptée.
L’Union européenne est dans l’impasse et sa réforme n’est plus possible : il paraît que le ministre allemand Sigmar Gabriel veut réduire la taille de la Commission européenne. Quant à l’élection présidentielle américaine, le (mauvais) choix est entre la candidate la plus corrompue et la plus incompétente de toute l’histoire des Etats-Unis et un démagogue incertain et fantasque dont on ne sait pas ce qu’il produirait s’il était élu.

Pierre Leconte
(*) Pierre Leconte

Fondateur et dirigeant de plusieurs sociétés financières, de gestion et de courtage, en Suisse, en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis, en Argentine, au Chili et Pérou, il a été aussi conseiller de plusieurs banques nationales de développement et de banques centrales. Depuis mi-avril 2015, compte tenu de sa vaste expérience financière personnelle et du soutien de plusieurs enseignants universitaires et économistes vraiment libéraux qui lui apportent leurs réflexions originales, Pierre Leconte s’est établi comme gérant de fortune indépendant à Genève en créant le Forum Monétaire de Genève dont le but principal est de conseiller des clients privés, entre-prises et institutions, et/ou de gérer leurs comptes déjà ouverts ou à ouvrir auprès de plusieurs banques. On lui doit aussi neuf livres sur les questions monétaires et géopolitiques.