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Réunion

Mayeul Dalleau, docteur en biologie marine au CEDTM : « Réhabiliter les sites de ponte pour les tortues »

Mayeul Dalleau, ingénieur et docteur en biologie marine, est formel : les récifs à hauteur de la Grande Chaloupe et de la baie de La Possession sont des habitats pour les tortues et l’impact du chantier sur l’environnement doit être compensé.

Le Centre d’étude et de découverte des tortues marines (CEDTM) a géré le site de Kélonia jusqu’en 2013, date à laquelle le musée a été intégré au sein de la société publique locale (SPL) Réunion des Musées Régionaux : « Nous travaillons en étroite collaboration avec Kélonia, dont les activités principales sont le musée et le centre de soins. La recherche scientifique est notre mission première, c’est pourquoi nous nous occupons des mesures de compensation marine n° 3 et 5 dans le cadre du chantier de la NRL : la première concerne les tortues et la seconde les cétacés », explique Mayeul Dalleau. Il est tout d’abord question de réhabiliter des sites de ponte pour les tortues sur les plages de l’Ouest, c’est-à-dire principalement les végétaliser.

Combattre les végétaux invasifs

La ponte des tortues marines sur nos plages est une préoccupation relativement récente. Il y a moins de 30 ans qu’elles ont été à nouveau observées, juste devant ce qui s’appelait encore la Ferme Corail : « Dans des documents des XVIe et XVIIe siècles, on lit qu’on marchait sur les carapaces de tortues tellement il y en avait sur la plage. Ensuite, du fait de leur exploitation et au fur et à mesure de l’urbanisation, les pontes ont été réduites presque à néant dans les années 1960, pour être à nouveau observées de façon très ponctuelle à Saint-Leu, et il faut le souligner, quelques années après la revégétalisation de la plage. On ne sait pas si c’est directement lié, mais on peut raisonnablement penser que c’est un des facteurs déterminants. »
Fort de ce retour d’expérience, la mesure n° 3 prévoit la revégétalisation de cinq hectares de plages. Les plages réhabilitées s’étendent du cap Lahoussaye jusqu’à l’Étang-Salé ! Concrètement, quatre plages font l’objet de toutes les attentions : Cap Champagne (au nord de Boucan Canot, commune de Saint-Paul), Souris Blanche-Souris Chaude (commune de Trois-Bassins), celle du cimetière de Saint-Leu et Ravine Mulat (commune d’Étang Salé).
En remplaçant les végétaux invasifs par des espèces endémiques (patate à Duran, liane cochon, veloutier, latanier rouge, etc. ), on va pouvoir retenir le sable, mais aussi contrôler la température au sol en apportant de l’ombrage, restaurer l’ambiance olfactive de la plage (qui attire les femelles), et enfin la protéger des nuisances humaines. Il est également question de surveiller l’éclairage, les déchets et les rejets d’eaux usées : « Il n’est cependant pas question de fermer les plages aux touristes, car les pontes ont lieu la nuit », souligne Mayeul Dalleau qui se veut foncièrement optimiste. Selon lui, la cause écologique avance et on peut encore faire évoluer les choses de façon spontanée, en responsabilisant les gens, sans qu’il soit nécessaire de prendre des mesures d’interdiction. Il en veut pour preuve le succès des ateliers : « On est une association, nos moyens sont limités, donc on fait appel au bénévolat. On a mis sur pied des ateliers de revégétalisation pour les scolaires mais aussi pour tous ceux qui le veulent, même les touristes, par groupes de trente. C’est d’ailleurs une activité proposée par certaines agences de voyages, comme RéuniTours ! » Pour participer à une replantation, il suffit de s’inscrire en ligne sur: http://cedtm-asso.org/vegetation/inscription/

Observer les baleines

La mesure n°5 concerne l’observation des cétacés : « On dispose d’un bateau semi-rigide et, tous les jours, on va au-devant des bateaux qui font du whale watching pour rappeler les règles à respecter. C’est notre action "Quiétude". Le problème, c’est la mode des selfies : les gens veulent se photographier avec les baleines, donc très près, oubliant totalement qu’il s’agit d’un animal sauvage. Quand ils vont visiter le Kruger Park en Afrique du Sud, il restent à bonne distance des éléphants mais, curieusement, ils n’ont pas conscience que cela peut être dangereux de s’approcher des baleines. »
Il semblerait que Moby Dick, la fameuse baleine tueuse, ne soit plus au programme de l’Éducation nationale ! La Réunion est l’un des endroits où l’on peut encore s’approcher d’aussi près des baleines : 100 mètres en bateau, 15 mètres en PMT (palmes, masque et tuba). Dans presque tous les autres pays, il faut se tenir bien plus loin. Le danger est que si les gens ne respectent pas les règles actuelles, la législation va se durcir et tout le monde en pâtira. Mais Mayeul Dalleau croit à la pédagogie : « L’interdit ne responsabilise pas. » Pour vous renseigner sur les bonnes méthodes d’observation des baleines : http://cedtm-asso.org/quietude/