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Publicité en ligne : un marché bidon en folle croissance

Le marché de la publicité en ligne est secoué par un scandale car il apparaît que les trafics sont faussés par des robots. Simone Wapler expose les risques qui en découlent pour un secteur survalorisé en bourse.

Si vous naviguez sur internet, vous expérimentez sans doute les rouages de la publicité sur ce média. Lorsque vous effectuez une recherche, des liens commerciaux se présentent d’abord à vous. Les commerçants achètent leur visibilité en payant des mots clés. Si vous allez sur un site précis, des publicités se présentent à vous. Si nous nous rendons simultanément au même endroit, vous ne verrez pas les mêmes annonceurs que moi grâce à la magie des cookies emmagasinés par votre navigateur. Toute cette belle mécanique sollicitant notre portefeuille se paie. Une myriade de prestataires, grands et petits, surfe sur cette vague. Les annonceurs de leur côté se sont laissés séduire par des assurances de retour sur investissement. 

UN SCANDALE QUI TOUCHE UN SECTEUR SURVALORISÉ

En revanche, un geek leur garantit des taux de clic, du trafic, etc. Enfin… c’est ce qu’ils croyaient jusqu’à présent. Car un scandale couve concernant la publicité sur Internet et ses conséquences risquent d’être très importantes sur le secteur des valeurs technologiques gonflé à bloc après dix ans de création monétaire. Amazon (AMZN) se négocie selon un ratio cours/bénéfices de 248 ; Nvidia (NVDA) se négocie selon un ratio cours/bénéfices de 49 ; Facebook (FB) se négocie selon un ratio cours/bénéfices de 37 ; Alphabet (GOOGL) se négocie selon un ratio cours/bénéfices de 34. Dit autrement, il faudra plus de 30 ans de bénéfices, en l’état actuel des choses, pour que votre « investissement » Facebook ou Alphabet soit rentabilisé. Acheter revient à spéculer sur un triplement ou un quadruplement des bénéfices actuels. Beaucoup de ces entreprises font une part considérable de leur chiffre d’affaires avec la publicité en ligne. Par exemple, les clients payent Facebook en échange d’un espace publicitaire en ligne, espace payé sur la base du trafic Internet. C’est un marché en forte croissance. Toutefois, il apparaît désormais que des robots, et non des humains, sont à l’origine de ce trafic internet. Par conséquent, ce que Facebook et les autres facturent à leurs clients en échange de l’espace publicitaire est fondé sur une tromperie. Le directeur marketing d’Unilever, dont le budget pour la publicité en ligne est de 8,4 milliards de dollars, a indiqué que 60% du trafic reposait sur des robots.

DES SURESTIMATIONS DE 60% À 80%

En septembre 2016, on avait appris que Facebook surestimait d’au moins 60% à 80% la durée de visionnage des vidéos publicitaires. Le 27 juillet dernier, le directeur opérationnel de Procter & Gamble, David Taylor, annonçait au « Wall Street Journal » avoir coupé les budgets de certaines publicités en ligne et ne constater aucune différence. Puis le site Zerohedge indiquait que Google allait rembourser les annonceurs dans certains cas avérés de trafic artificiel. Enfin, le 7 septembre se tenait une conférence organisée par Goldman Sachs sur le thème du commerce de détail mondial. Le président de Restoration Hardware, Gary Friedman, y faisait cette savoureuse confidence : « Nous avons découvert que 98% de notre chiffre d’affaires provenait de 22 mots. Attendez… nous achetons 3 200 mots et 98% du chiffre vient de 22 mots. Quels sont ces 22 mots ? Ils ont dit, eh bien, c’est ‘Restoration Hardware’ et les 21 orthographes incorrectes, d’accord ? »

(*) Simone Wapler
Elle est directrice éditoriale des publications Agora, spécialisées dans les analyses et conseils financiers. Elle a publié « Pourquoi la France va faire faillite » (2012), « Comment l'État va faire main basse sur votre argent » (2013), « Pouvez-vous faire confiance à votre banque ? » (2014) et « La fabrique de pauvres » (2015) aux Éditions Ixelles.