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Ridha Tekaïa
Réunion

Ridha Tekaïa Le banquier qui a une âme d’entrepreneur

À la tête de la BFC, banque de plein exercice, depuis avril 2017, Ridha Tekaïa avoue sa passion pour l’entrepreneuriat. Une passion qu’il a pu assouvir dans le secteur bancaire avec une belle carrière à l’international et de nombreux challenges…

Ridha Tekaïa
« Cela a vraiment du sens d’être une banque de plein exercice. »    ©Droits réservés
 

À 58 ans, Ridha Tekaïa affiche un profil qu’on n’a pas l’habitude de croiser sur la place bancaire de La Réunion. Son parcours au sein de la Société Générale ressemble à un livre d’aventure. Avec l’Hexagone et des tas de pays plus différents les uns que les autres. On se demande comment il a posé ses valises à La Réunion, petit territoire insulaire où l’économie est plutôt centrée sur elle-même. Lui qui est conseiller du Commerce extérieur de la France (CCEF) depuis une dizaine d’années. « C’est simple, explique-t-il. Après avoir passé cinq ans en Moldavie comme directeur général d’une banque du groupe Société Générale, on me proposait de retourner au siège à Paris, mais ça ne m’intéressait pas. J’aime le terrain. » Aussi, quand on lui propose La Réunion, où, une fois de plus, de gros challenges devaient être relevés, notamment la transformation informatique, il saisit cette opportunité. « La BFC est une filiale atypique. Banque de plein exercice arrimée à l’euro, avec tout un arsenal de réglementations, et deux actionnaires à 50/50, la MCB et la Société Générale qui en assure la gouvernance. Ce qui est passionnant également, c’est que la banque couvre deux territoires très différents, La Réunion et Mayotte, et qu’elle dispose d’une agence à Paris. » 

Le Cameroun, cette Afrique en miniature 

Ridha Tekaïa voit alors la BFC comme une « belle endormie », en retard sur la digitalisation, mais bien ancrée chez les entrepreneurs. De quoi satisfaire ce passionné d’entrepreneuriat qui a commencé sa vie professionnelle dans la grande distribution et l’industrie. Avec déjà de gros challenges comme la création d’une vingtaine de restaurants pour Auchan et la refonte de process pour l’industrie hospitalière. Mais en 1987, juste avant sa privatisation, la Société Générale recherche des profils plus commerciaux et à la fibre entrepreneuriale. Il choisit donc le secteur bancaire sans avoir vraiment l’intention d’y rester. « Je voulais créer mon entreprise, mais je me disais qu’avec cette expérience je serai mieux armé. » Finalement, le destin en décidera autrement et il restera dans le groupe Société Générale, avouant prendre toujours autant de plaisir dans l’exercice de son métier. Il faut dire qu’il vivra plusieurs vies au sein du groupe, devenant un véritable globe-trotter. 

L’international est dans l’ADN de Ridha Tekaïa dont le père, tunisien, et la mère, parisienne pure souche, ont vécu l’expatriation dans le secteur médical. Il partage son enfance et son adolescence entre Tunis et Paris, mais toujours dans des écoles et lycées français, avant de passer une licence en mathématiques appliquées aux sciences sociales à l’université Paris-Descartes. Des études qui seront complétées par un MBA. 

Son parcours à la Société Générale commence par l’Hexagone, durant une dizaine d’années, avec tout d’abord de la gestion de patrimoine dans les belles banlieues de l’ouest de Paris, suivie d’une expérience dans l’immobilier à une époque où des villes nouvelles voyaient le jour. Ensuite, c’est le sud de la France avec une aventure très enrichissante à Sophia Antipolis, la première et plus importante technopole d’Europe. L’occasion de connaître toutes les grosses SSII, les labos pharmaceutiques et des start-up qui allaient devenir des géants. Après Sophia Antipolis, de 1995 à 1998, il travaillera sur le projet Euromed à Marseille avec de grandes réalisations comme la tour CMA CGM. Le port de Marseille lui donne le goût du grand large et il demande à partir à l’international.

Ce nouveau virage professionnel commence par le Cameroun, « un pays fascinant car c’est l’Afrique en miniature. Chaque région de ce pays a son propre climat et on y trouve toutes sortes de produits : le café, le coton, l’hévéa (qui donne le caoutchouc), le cacao, l’huile de palme, les bananes et même l’ananas Victoria… » C’est l’occasion de côtoyer et de suivre des entrepreneurs qui innovent et de participer à de gros projets comme celui d’un pipeline qui relie le Cameroun au Tchad. Ridha Tekaïa couvre en effet le Cameroun et d’autres pays environnants. Concessions de bois, barrage hydroélectrique, arrivée de la téléphonie mobile… L’expérience de trois ans et demi sera intensive. 

 

Le BFC Lab, mis en place par Ridha Tekaïa, est à la fois un centre de formation interne et un lieu où s’exerce l’intelligence collective.
Le BFC Lab, mis en place par Ridha Tekaïa, est à la fois un centre de formation interne et un lieu où s’exerce l’intelligence collective.   ©Droits réservés
 

Le banquier polyglotte 

Changement complet avec un poste à Prague en 2001, dans un contexte de privatisation des banques. Il en profite pour apprendre le tchèque. Doué pour les langues, il a l’habitude de les apprendre dans le pays où il se trouve. « C’est important pour bien s’intégrer et mieux communiquer. » Il apprendra aussi le Russe quand il sera en Moldavie. Sans oublier qu’il parle l’arabe de par son origine familiale. 

Ses trois ans et demi à Prague lui permettent de se familiariser avec les montages en partenariat public-privé (PPP) et avec l’industrie automobile. Après plusieurs missions de courte durée, notamment en Libye, il se retrouve en Algérie, « un pays extraordinaire que je ne connaissais pas. Mais je l’ai parcouru dans tous les sens car la banque dont j’étais le directeur commercial disposait d’un gros réseau d’agences qui est d’ailleurs passé de 40 à 90. En Algérie, je me suis aperçu que tout ce que j’avais appris à l’Université ne tenait pas la route. Dans ce pays, le problème n’est pas de vendre et d’avoir des consommateurs, mais d’avoir les marchandises ». 

Ses pérégrinations à travers deux continents finiront par la Moldavie, son plus long séjour (cinq ans) et son premier poste de directeur général. « Ce petit pays de 5 millions d’habitants, ex-république soviétique, est passionnant et cultive les paradoxes. Par exemple, sa langue officielle est le roumain, mais 80 % de ses habitants parlent plutôt le russe. On y trouve une principauté, où l’on parle aussi le turc, et un sous-État, la Transnistrie, qui dispose de sa propre monnaie et de son armée, mais il n’est pas reconnu par la communauté internationale. On y trouve un excellent cognac et l’un des meilleurs caviars du monde, le Golden Caviar. » 

Ridha Tekaïa s’est passionné pour chaque pays, chaque territoire où il a eu l’occasion de travailler. « Sinon, ça ne vaut pas le coup. » 

L’humain fait la différence 

Il en est de même aujourd'hui pour La Réunion. De plus, la BFC étant une banque de plein exercice, une quasi exception sur l'île, son poste de directeur général n'en est que plus intéressant. Mais c’est aussi un gros challenge car les charges fixes sont plus élevées. C'est pourquoi il a programmé en plusieurs étapes, sur trois ans, la réorganisation, la transformation et la digitalisation, aboutissant à un plan de migration informatique qui démarre. Pour se donner une idée de l’importance du service informatique, il faut savoir qu’il emploie pas moins de 32 personnes. La BFC dispose aussi d’un service marketing et d’un véritable centre de formation interne. 

La transformation informatique, qui s’avérait indispensable, représente un investissement total de 10 millions d’euros. Mais ses deux actionnaires l’ont soutenu en allégeant leurs dividendes. À propos de chiffres justement, la BFC a plutôt bien traversé la crise en 2020 en réalisant un produit net bancaire de 76 millions d’euros et un résultat net de 14,4 millions d’euros. 

La « belle endormie » se réveille, à la grande satisfaction de Ridha Tekaïa qui est convaincu depuis longtemps que c’est l’humain qui fait la différence. C’est pourquoi il est très impliqué dans la RSE., en interne comme en externe. 

« Nous avons des collaborateurs très attachés à leur banque et les entrepreneurs apprécient que nous soyons une banque de proximité. Pour moi, cela a vraiment du sens d’être une banque de plein exercice. »

Une forte politique de RSE

Outre des actions en externe, et notamment une participation active dans la mise en place à La Réunion d’une antenne de l’association nationale Apesa (Aide psychologique aux entrepreneurs en souffrance aiguë), la BFC implique ses salariés dans la RSE. 
Un comité trimestriel réunit plusieurs services pour définir les priorités et mener à bien les projets. Un nouvel accord d’intéressement intégrant des indicateurs RSE a d’ailleurs été lancé. Le recyclage et le tri sélectif sont en place pour les consommables et matériels. Du mobilier bien-être a été distribué et un portique vélo au siège de Saint-Denis a été installé. 
D’ici la fin de l’année, des panneaux photovoltaïques seront installés sur l’un des bâtiments du siège de Saint-Denis. En visitant le nouveau centre névralgique, avec ses espaces de détente, mais aussi le BFC Lab, dédié à la formation et à l’innovation, on peut constater que la qualité de vie au travail est une priorité de la banque.