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THIERRY LALOI EN GUERRE CONTRE LE CHÔMAGE DES JEUNES DIPLÔMÉS « Il nous faut plus de mentors ! »

Depuis 2017, Thierry Laloi anime l’antenne réunionnaise de Nos quartiers ont des talents (NQT) qui vise à mieux intégrer les jeunes diplômés dans le monde professionnel. Il s’appuie pour cela sur un réseau de cadres et dirigeants d’entreprise qui interviennent comme mentors. Un réseau qu’il veut développer…

« Selon les chiffres officiels, il y aurait quelque 2 000 jeunes diplômés inscrits à Pôle Emploi à La Réunion. Personnellement, j’estime ce nombre à 1 500 car certains ne se désinscrivent pas. Mais ça fait beaucoup trop. » Thierry Laloi, qui a pérégriné dans le monde de l’entreprise et dans celui de l’insertion, a été recruté en 2017 par Nos Quartiers ont des talents (NQT) comme chargé de mission. Cette association d’intérêt général à caractère social a vu le jour dans l’Hexagone en 2005 sous l’impulsion de Yazid Chir, jeune entrepreneur d’origine algérienne, impliqué dans le Medef en Seine Saint-Denis, le fameux 9-3. 

« Pour l’égalité vers l’emploi »

Le constat est simple : de nombreux jeunes diplômés Bac+3 et plus éprouvent des difficultés pour accéder à un emploi parce qu’il ne sont pas armés pour cela, contrairement à d’autres. « Pour l’égalité vers l’emploi » est d’ailleurs la signature de NQT qui est soutenue par la plupart des grandes entreprises françaises. Trois raisons principales expliquent les difficultés de ces jeunes diplômés à dénicher un emploi : leur manque de confiance et de méthodologie dans sa recherche, leur inexpérience du marché du travail, du monde de l’entreprise et de ses codes, et leur absence de réseau professionnel. Et l’on constate bien sûr des disparités territoriales en matière d’emploi, de formation et d’orientation que NQT s’efforce d’atténuer en étant présente dans 13 régions dont La Réunion. Les entreprises adhérentes s’impliquent financièrement – à partir de 350 euros l’adhésion pour les moins de 10 salariés et jusqu’à 23 920 euros pour celles qui emploient plus de 20 000 salariés (comme Orange, par exemple) – et elles peuvent défiscaliser 60 % de ce montant jusqu’à la limite de 5 % de leur chiffre d’affaires, de même que les partenaires mécènes. Mais leur implication peut être bien plus que financière puisqu’elles fournissent les 13 000 mentors qui forment à l’heure actuelle le réseau NQT. 
À La Réunion, on compte 145 mentors, 700 entreprises adhérentes et 40 partenaires. Il faut signaler également que 324 entreprises versent à l’association leur taxe d’apprentissage. Le mentorat : une bonne réponse « Auparavant, on parlait de parrains, mais désormais on préfère le terme de mentor qui traduit mieux le travail accompli par les dirigeants, cadres ou salariés occupant une fonction d’encadrement qui travaillent au sein des entreprises adhérentes, qu’elles soient privées ou publiques, y compris des collectivités. Nous avons aussi des mentors qui interviennent à titre personnel sans que leur entreprise ne soit adhérente », précise Thierry Laloi. Leur engagement est de consacrer au moins une heure par mois à leur « mentoré » même s’il n’y a rien de contractuel. 
NQT est le premier réseau français d’entreprises impliquées dans l’égalité des chances. Ce qui lui donne  quelques moyens et lui permet de s’autofinancer aux deux tiers, le reste provenant d’appels à projets financés par de l’argent public. À La Réunion comme dans l’Hexagone, le public visé est celui des jeunes diplômés (Bac+3 et plus) âgés de moins de 30 ans et répondant à certains critères d’éligibilité comme d’être issu d’un milieu social modeste. Épaulé depuis août 2021 par Anne Guichard, Thierry Laloi veut mettre les bouchées doubles même si les chiffres se révèlent déjà encourageants. En 2020, année difficile avec les contraintes sanitaires, 156 jeunes diplômés ont été accompagnés dont 78 ont continué à l’être après le 31 décembre. En moyenne, les jeunes diplômés sortent du chômage au bout de huit mois. « Cela peut se faire au bout deux mois et ça peut aussi être beaucoup plus long, précise le chargé de mission. En plus du suivi mensuel, nous dressons un bilan au bout de six mois. » 

Des mentors très satisfaits 

La mission du mentor est claire : permettre au jeune diplômé de réaliser un projet professionnel, que ce soit l’obtention d’un emploi, la création d’une entreprise ou la poursuite de nouvelles études. L’expérience peut être stoppée si le courant ne passe pas, mais, « c’est très rare », précise le représentant de NQT tout en ajoutant que le suivi du jeune est important. « Il arrive qu’il n’appelle pas son mentor. » 
À La Réunion, le taux de sorties réussies (vers un emploi, un contrat d’alternance, une formation qualifiante ou une création d’activité) s’élève à 60 %. En comparaison, il est de 70 % en France métropolitaine. L’insularité, qui limite la mobilité professionnelle, pourrait peut-être expliquer cette différence. 
Thierry Laloi apprécie la très bonne implication des entreprises réunionnaises, notamment dans les adhésions, mais il voudrait augmenter de manière significative le nombre de mentors et de jeunes à accompagner. Pour mieux « sourcer » ces derniers, il dispose de partenaires comme Pôle Emploi, l’Université, le campus de Tétranergy, l’école d’informatique Epitech, le réseau Simplon, qui vise l’insertion par l’informatique, Ladom (l’agence de l’Outre-Mer pour la mobilité), le Centre régional d’information jeunesse (CRIJ), l’Association régionale des missions locales (ARML) et l’Association pour l’emploi des cadres (Apec). Pour promouvoir le réseau, il compte aussi développer les ateliers collectifs avec certaines entreprises et des partenaires. 
En parallèle, il faudra étoffer le réseau de mentors, en prêchant notamment la bonne parole auprès des cadres de la fonction publique. Tout en sachant que beaucoup de cadres et dirigeants de TPE et PME sont souvent débordés. Mais le jeu en vaut la chandelle. L’étude menée par NQT sur le plan national montre que le « retour sur investissement » n’est pas négligeable : 97 % des mentors se sentent utiles, 70 % développent de nouvelles compétences, 66 % ont un nouveau regard sur les jeunes et leurs difficultés, 40 % élargissent leur réseau grâce au mentorat, 55 % déclarent garder des liens avec le jeune qu’ils ont accompagné et un tiers contribuent à faire évoluer les pratiques de recrutement.

Thierry Laloi : un parcours atypique
 
​Le profil de Thierry Laloi, représentant de NQT à La Réunion, est quelque peu atypique mais lui permet de mieux coller à la réalité de l’entreprise. Originaire du Guillaume Saint-Paul par sa mère, il s’est installé à La Réunion en 2002 où son BTS en maintenance industrielle lui a permis d’intervenir dans différents secteurs et notamment sur de grands sites industriels. Rien de satisfaisant cependant sur le long terme. il évolue alors dans les travaux spéciaux, ayant effectué son service militaire dans les chasseurs alpins. Quatre années intenses physiquement. Un contrat à durée déterminée (CDD) à la Chambre de commerce et d’industrie (pour suivre l’apprentissage) et des missions d’intérim à Pôle Emploi l’amènent à oeuvrer dans le monde de l’insertion professionnelle. Cet inconditionnel de l’alternance, qu’il a lui-même pratiquée, se découvre une passion pour ce métier d’accompagnateur. Et il soumet sa candidature à NQT lorsque l’association décide en 2017 d’ouvrir une antenne à La  Réunion. Seul salarié jusqu’à l’arrivé d’Anne Guichard en août 2021, il a pu mettre en place un véritable réseau local en faveur de l’employabilité des jeunes diplômés.
Le directeur général adjoint du Crédit Agricole de La Réunion a été mis en avant lors d’un « Job Booster Day » au Stade de France. ©Droits réservés

Trophée du « mentor d’exception régional » pour Didier Estèbe

Didier Estèbe, directeur général adjoint du Crédit Agricole de La Réunion, figurait parmi les 14 « mentors d’exception » des régions où est implantée NQT à être récompensés lors d’un « Job Booster Day » organisé en virtuel et en présentiel au Stade de France le 8 décembre dernier. Il est en effet le mentor qui a accompagné le plus grand nombre de jeunes diplômés à La Réunion depuis 2014. S’il n’a pu être présent physiquement, Didier Estèbe a pu adresser un mot aux participants à ce grand forum dédié aux jeunes diplômés. Le Crédit Agricole de La Réunion est l’un des partenaires de NQT et, outre l’accompagnement des jeunes diplômés dans un projet professionnel, la banque mutualiste propose différents dispositifs de soutien aux jeunes en général : plan d’urgence, « Passerelle Jeunes », appel à projets (voir la plateforme j’aime mon territoire)… 
Le « Job Booster Day » est une initiative de NQT, associée à Atlas (Opco, opérateur de compétences, des services financiers et du conseil), l’Association pour l’emploi des cadres (Apec), la Ligue des jeunes talents et l’association Au-delà de nos limites. 
Durant l’événement du 8 décembre au Stade de France, plusieurs centaines d’offres d’emploi et d’alternance, du coaching avec des professionnels, des tables rondes, des ateliers ainsi que de nombreuses animations ont été proposés. La journée s’est terminée avec la finale du concours de l’éloquence organisé par NQT et la Ligue des jeunes talents autour de la thématique de l’engagement personnel et du projet professionnel.