Belle résilience de l’économie, mais des nuages à l’horizon
« Amélioration surprise du climat des affaires » au premier trimestre 2023, selon l’Institut d’émission des départements d’Outre-mer (Iédom) ; « Malgré une forte inflation, l’économie réunionnaise résiste », selon l’analyse annuelle des Comptes économiques rapides pour l’Outre-mer (Cerom). Avec une inflation moins forte qu’en Métropole et des prévisions d’investissements qui restent bien orientées, la conjoncture économique réunionnaise présente peu de sujets d’inquiétude, au premier abord. De plus, le tourisme se porte bien et, au premier semestre, l’aéroport Roland Garros a accueilli 7,4 % de passagers de plus qu’en 2019.
À y regarder de plus près, des signes de dégradation apparaissent. Il en a beaucoup été question le 19 juillet dernier, lors du deuxième Café Eco de l’agence régionale de développement Nexa, organisé dans les locaux de l’Adir (l’association des industriels) au Port puisqu’un focus était consacré à l’industrie.
« L’économie réunionnaise entre menaces et ouvertures », analyse l’agence régionale dans son dernier bulletin de conjoncture, qui évalue à 2 % le taux de croissance pour 2022 (2,7 % selon l’Insee). Les indicateurs du début de l’année 2023 sont à analyser avec précaution en raison de divers biais statistiques. La baisse des importations constatée au premier trimestre provient en partie de la grève des dockers mobilisés contre la réforme des retraites et si les importations de biens d’équipement et intermédiaires reculent, il faut sans doute y voir avant tout un effet de rattrapage après un début d’année 2022 pendant lequel les entreprises de production ont surstocké, par crainte de pénuries et d’explosion des prix. En revanche, la baisse de la consommation de biens destinés aux ménages au premier trimestre confirme d’autre signaux de fléchissement de la consommation. Même si les mesures politiques d’amortissement des effets de l’inflation, dont la revalorisation du Smic, a permis d’éviter une chute du pouvoir d’achat, les ménages réunionnais sont de plus en plus nombreux à faire des arbitrages. L’Iédom a ainsi enregistré une baisse de 2,7 % des paiements par carte bancaire au premier trimestre 2023 par rapport à 2022.
Quant au secteur du BTP, encore porté actuellement par les chantiers routiers, il pourrait connaître bientôt un profond trou d’air, au vu de la chute des mises en chantiers de logements et des délivrances de permis de construire. Le secteur pourrait venir grossir la tendance à la hausse des défaillances d’entreprises amorcée depuis le début de l’année.
Sans prédire un scénario « à la 2008 », quand la crise américaine des subprimes avait contaminé la finance mondiale et, par effet domino, provoqué une crise économique qui avait fini par toucher La Réunion, les observateurs de la conjoncture locale sont sur leur garde. La croissance 2023 devrait être une des plus faibles de ces dernières décennies.