Climatisation moins énergivore : des expérimentations concluantes
En adaptant le débit d’eau glacée du circuit aux besoins du moment, la consommation d’électricité liée à la climatisation peut être fortement réduite.
À défaut de se passer de climatisation – une option difficilement concevable dans les hôpitaux, les hôtels et de nombreux bâtiments techniques -, comment rendre moins énergivore ce premier poste de consommation d’électricité dans l’immobilier tertiaire en climat tropical ? Dans la cadre du projet Ombree (programme inter Outre-mer pour des bâtiments résilients et économes en énergie) de l’Agence qualité construction, le bureau d’études Inset a apporté une réponse, démonstration à l’appui. « La consommation d’énergie peut être diminuée par deux dans l’immobilier de bureau localisé sur le littoral, en faisant varier le débit de l’eau glacée en fonction de l’occupation des bureaux, explique , directeur général d’Inset. Les systèmes de climatisation classiques fonctionnent inutilement à débit constant. » Entre 2020 et 2022, Inset a mené à bien le projet ClimaTer (Climatisation dans le tertiaire), fondé sur une expérimentation dans le bâtiment qui abrite le siège de CBo Territoria, dans la zone de La Mare.
« Inset est venu nous proposer sa solution au bon moment, précise Fabien Louise, responsable du patrimoine tertiaire de CBo Territoria. Le groupe de production de froid de notre siège était en fin de vie ; le bureau d’études nous proposait de remplacer les vannes trois voies de nos cassettes de climatisation par des vannes deux voies, qui évitent des échanges thermiques, donc des consommations inutiles. Mais pour que les vannes deux voies fonctionnent, il faut un groupe de production de froid à débit variable. Nous avons décidé d’en prendre un en leasing, qu’on rachètera dans sept ans pour l’euro symbolique. La consommation de notre siège, qui abrite 1 155 m² de bureaux, est passé de 134 mégawatts/heure annuel à 48, en partie grâce au projet ClimaTer. »
CBo Territoria a accepté d’autant plus facilement l’expérimentation proposée par Inset qu’elle venait d’explorer la même voie avec succès dans un autre immeuble de sa zone de La Mare. « Nous avons commencé à transformer le système de climatisation, avec groupes à débit variable et vannes deux voies, en 2019, relate Fabien Louise. Dans ce bâtiment, la consommation d’électricité pour les besoins de la clim s’élevait à 231 mégawatts/heure en 2015. En 2022 elle est tombée à 86 MW/h. Cette consommation est à la charge des locataires : leurs factures ont baissé d’un tiers depuis 2019, alors qu’elles auraient fortement augmenté, à cause de la hausse des tarifs d’EDF, si nous n’avions pas fait cet investissement. »
CBo Territoria ne va bien sûr pas s’arrêter en si bon chemin. La transformation du système de climatisation des Cuves de La Mare est en cours, elle se poursuivra sur les autres immeubles tertiaires de la société au rythme du remplacement des groupes de production de froid – 60 000 euros l’unité – et la même configuration sera adoptée sur ses nouvelles réalisations.
« Décret tertiaire » : encore des zones à éclairer : Le « décret tertiaire » de la loi de Transition énergétique impose d’améliorer les performances énergétiques des bâtiments de plus de 1 000 m² accueillant des activités tertiaires, avec des objectifs ambitieux : réduction des consommations de 40 % à l’horizon 2030, de 50 % en 2040 et 60 % en 2050. Par rapport à quelle année de référence ? Les départements d’Outre-mer attendent toujours le texte qui précisera la méthode de calcul, laquelle doit être adaptée aux réalités des consommations en milieu tropical. D’autre points restent à éclaircir, comme la prise en compte ou pas de la consommation des bornes de recharge des véhicules électriques, appelées à se multiplier au pied des bâtiments. Les cas particuliers s’annoncent nombreux, notamment pour les bâtiments scolaires. « Dans nos écoles, ni chauffées ni climatisées, la consommation est basse, fait remarquer Cyril Hoareau (SPL Horizon Réunion). Il est impossible de la réduire encore de 40 % par des actions de maîtrise de l’énergie. Celles qui sont dotées d’une cuisine ont des consommations importantes le matin : dans ce cas, le photovoltaïque ne serait pas une réponse adaptée. »