Gillot, la plaine de tous les enjeux
Le nord de l’île veut continuer à accueillir de nouvelles activités économiques mais manque de place. Tous les regards sont aujourd’hui tournés vers les terrains « Payet-Lagourgue », à Gillot, idéalement placés.
« Il ne faut pas que cette zone cannière, qui est un joyau foncier, devienne un vaste lotisse-ment. » Christian Annette, élu de la Cinor et conseiller régional délégué à la politique foncière et aux opérations d’aménagement, résume la position qui prévaut aujourd’hui au sein des deux collectivités au sujet de la « plaine de Gillot ». Ces 70 hectares sont toujours la propriété des familles Lagourgue et Payet, mais le Schéma d’aménagement régional (SAR) comme le Schéma de cohérence territoriale de la Cinor donne à cet espace une vocation d’accueil de l’activité économique.
L’« alignement des planètes politiques » actuel dans le Nord, après l’alternance à la mairie de Sainte-Marie, incite les élus à aller vite pour trouver un accord avec les propriétaires et engager les travaux d’aménagement. En octobre 2019, un projet de cession d’une cinquantaine d’hectares au groupe Opale-Alsei a été annoncé, puis ce dernier s’est retiré quand la crise sanitaire a bouleversé toutes les prévisions.
Christian Annette, opposant « historique » de Jean-Louis Lagourgue à la mairie de Sainte- Marie, est particulièrement actif sur ce dossier, comme sur celui de la Zone d’activités aéroportuaires (voir notre hors-texte). « Les logiques de spéculation foncière sont un frein aux projets de la puissance publique, relève-t-il. À La Réunion, ce conflit est de très forte intensité. Sur la plaine de Gillot, l’État doit jouer son rôle. Le préfet pourrait signer une déclaration d’utilité publique qui placerait le dossier entre les mains du juge aux expropriations. »
Président de la Cinor, Maurice Gironcel souhaiterait éviter une telle issue, synonyme de longues années de procédures. L’enjeu réside évidemment dans le prix de vente des terrains, dans un secteur où le mètre carré atteint des niveaux incompatibles avec ceux que peuvent accepter les acteurs publics.
Le statu quo peut difficilement durer, il reste à savoir comment la situation se débloquera : accords à l’amiable ou bras de fer ?
ZAA Pierre-Lagourgue : la Région rebat les cartes : Une décision prise par la commission permanente du Conseil régional le 22 avril rebat les cartes de l’attribution des parcelles encore disponibles sur la zone d’activités aéroportuaires (ZAA) Pierre-Lagourgue. À la fin de la mandature précédente, le 18 août 2020, la même commission permanente avait donné son feu vert à l’implantation de 11 projets sur environ un quart de la superficie de la zone : la construction du nouveau siège d’Orange par Ocidim, d’entrepôts et de bureaux pour Bolloré et Isautier, d’un restaurant, d’une pépinière d’entreprises par la Sémir, l’implantation de la Piroi (Plateforme d’intervention régionale de la Croix-Rouge)…
« Il y avait manifestement un décalage avec la vocation initiale de la ZAA », commente-t-on à la pyramide inversée, mais aussi avec les nouvelles ambitions de la collectivité en matière de développement économique, « axées sur l’ouverture de nouveaux horizons et l’innovation » et la structuration de la filière aéronautique réunionnaise. « La ZAA doit pouvoir accueillir des entreprises innovantes pour des activités tertiaires à forte valeur ajoutée mobilisant la voie aérienne, indique le rapport de la commission permanente. La zone, en tant que porte d’entrée touristique et d’affaires, doit être la vitrine des savoir-faire et des talents locaux. »
Aucun bail à construction n’avait encore été signé avec les attributaires de 2020 ; le 22 avril dernier, la commission permanente a donc décidé d’un abandon de cette procédure – seul le projet de la Piroi a été maintenu – , de la redéfinition du positionnement de la ZAA et du lancement d’un nouvel appel à manifestation d’intérêt. « Les entreprises écartées qui estimeront satisfaire à ses critères pourront de nouveau y répondre », fait-on remarquer à la Région.