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photo d'I Issa
Réunion

Imraan Issa : Le premier Réunionnais à la tête de BNP Paribas Réunion

À 42 ans, le Bénédictin Imraan Issa est, depuis février, directeur général de BNP Paribas Réunion, filiale à 100 % du groupe BNP Paribas. Une première pour un natif de l’île. Une fierté pour lui qui entend accompagner la transition de La Réunion.

« Je suis extrêmement fier évidemment ! » Imraan Issa est, depuis le 1er février, directeur général de BNP Paribas Réunion. C’est la première fois qu’un natif de l’île accède à une telle responsabilité. Six mois après avoir pris ses nouvelles fonctions, il ne cache pas son plaisir d’être revenu après une vingtaine d’année d’un parcours effectué entièrement dans cette banque. « Mes premières impressions sont très positives. C’est une grande fierté personnelle de servir le pays, mais aussi, par rapport aux clients, de montrer qu’on peut y arriver, qu’un Réunionnais peut être à la tête d’une filiale d’une banque. C’est une très belle reconnaissance, c’est un exemple qu’on donne. On peut y arriver, mais il faut aller chercher la formation ailleurs, c’est comme cela qu’on s’enrichit, qu’on apprend. »

« Bluffé » par La Réunion

Imraan Issa a tout d’abord fréquenté l’université du Moufia après son bac. Après un diplôme en économie-gestion, il met le cap sur l’Université de Bordeaux où il validera un magistère en économie et finance internationale et un master en management financier.

Dès sa sortie de l’Université, il intègre BNP Paribas à Poitiers avant d’évoluer à Paris pendant dix-huit ans. Il occupera différentes fonctions, tout d’abord à l’inspection générale du groupe, en tant qu’auditeur, avant de prendre la responsabilité des politiques d’octroi de crédits. Mais lui, le fils de commerçants de Saint-Benoît, voulait faire du commerce : « La banque, c’est surtout du commerce et je suis devenu directeur commercial en charge de l’animation des PME en Île de France. J’ai accompagné avec mes équipes le développement des PME sur les sujets de cash management, de trade, de croissance externe, de financements structurés, etc. »

Ce riche parcours va se poursuivre avec la création d’un nouveau poste, particulièrement prémonitoire : « J’étais directeur de la cellule de gestion de crise pour la banque commerciale France en termes d’animation des incidents… Ce poste a été créé juste avant la crise covid, sans savoir combien on allait en avoir besoin ! L’idée, c’était de coordonner les incidents en cas de crise majeure. Il y a eu la fin de la crise des Gilets jaunes, puis celle de la covid, sans oublier quelques incidents informatiques. »

Depuis un certain temps, il songeait à revenir à La Réunion, non sans se poser beaucoup de questions sur la pertinence d’un tel choix : « Au fond de moi, j’avais l’appel du pays de plus en plus fort. Mais lorsqu’on part, on a une image de La Réunion un peu déformée. On se demande si l’on revient ou pas, si l’on ne va pas s’y ennuyer professionnellement, si ce n’est pas trop petit, etc. Quand bien même, je ne me suis jamais déconnecté de l’île en revenant deux fois par an. L’opportunité s’est présentée et, en moins d’une minute, j’ai accepté la proposition. »

Un tout nouveau « Green Desk »

Il le reconnaît aujourd’hui, il a été littéralement « bluffé » par la situation de l’île. « La Réunion est un territoire extrêmement dynamique, c’est une vraie opportunité. On a des chefs d’entreprise qui tirent l’île vers le haut et c’est vraiment incroyable. J’ai aujourd’hui une vision extrêmement positive et je me dis que j’aurai dû le faire plus tôt. L’île est en train de prendre le virage de la RSE et les entreprises de faire leur transition. »

Imraan Issa entend bien accompagner cette transition avec ses équipes. Pour cela, il peut compter sur une filiale forte de 200 collaborateurs à La Réunion avec 15 agences et un pôle professionnel au siège à Saint-Denis, un centre d’affaires avec des pôles spécialisés autour de l’immobilier ou de l’innovation, par exemple. Une organisation complétée depuis peu par un tout nouveau « Green Desk » marquant la volonté de la banque d’accompagner l’île dans sa transition énergétique. « C’est un point majeur de notre plan stratégique baptisé GTS pour Growth Technologic Sustainability. Dans ce plan, l’un des piliers, on vient de le réaliser, c’était la modernisation, l’amélioration de notre système informatique (voir notre hors-texte). »

« La RSE va devenir de plus en plus une contrainte. Prenons l’exemple des appels d’offres : s’il manque un certain nombre de critères RSE, c’est un motif de refus… » Photo : Guillaume Foulon

Le deuxième pilier est donc celui de la responsabilité sociale, qui passe d’abord par une politique de formation des équipes, pour devenir des « banquiers engagés » pour pouvoir avoir le niveau de conseil approprié. Un préalable qui se complète par une organisation spécifique pour les projets avec la création de ce Green Desk. « Concrètement, nous avons un chargé d’affaires référent Green. Il est connecté à l’ensemble des Green Desk de BNP Paribas Métropole. Il y a une communauté et une expertise qui se développent. On peut faire appel à un spécialiste de tel ou tel type de financement ou de secteurs. On accompagne ici des producteurs d’énergie et eux aussi sont dans la transition énergétique, que ce soit dans des projets photovoltaïques, hydrauliques, la reconversion de centrales ou le transport. En matière d’épargne aussi, nous avons des fonds RSE et nous proposons aux clients de réallouer leur épargne. Au-delà, la RSE va de toute façon devenir de plus en plus une contrainte. Prenons l’exemple des appels d’offres : s’il manque un certain nombre de critères RSE, c’est un motif de refus. Il ne faut pas sous-estimer cette évolution. C’est nouveau pour tout le monde et chacun doit jouer son rôle, et nous entendons jouer le nôtre pleinement. »

Une volonté qui se traduit également par l’ambition de s’ancrer encore plus localement : « Je suis en train de renouveler mon comité de direction du fait des départs et ma nouvelle directrice de la banque privée est une locale que je viens de nommer ; Dominique Rizzo, le directeur du centre d’affaires est un Réunionnais, Daniel Narayanin. L’idée est de promouvoir la diversité et d’accompagner le développement de l’île avec des Réunionnais qui ont fait leurs preuves et donc méritent totalement de pouvoir s’exprimer pleinement. Après, il faut avoir la compétence ! Je ne le fais pas parce qu’il faut le faire. Cela n’aurait pas d’intérêt. Il faut que les conditions soient réunies en termes de compétences, d’expertise. »

En conquête de PME et TPE

Dans un marché réunionnais très concurrentiel dominé par le Crédit Agricole, qui détient au-tour de 30 % de parts de marché, suivi de la Caisse d’Épargne Cepac, BNP Paribas se situerait, selon Imraan Issa, entre la BFC et la BRED, aux alentours de 10 %. Pour lui c’est clair : « Nous avons un très fort taux de pénétration dans le corporate, mais l’idée est de poursuivre encore plus sur les PME et TPE. Nous avons encore une image élitiste et mon challenge est de faire comprendre à tous que ce n’est pas le cas. » Une volonté traduite par un geste fort en juin : l’alignement de tous les tarifs de la banque sur ceux de l’Hexagone afin de participer à la lutte contre la vie chère. Convaincu que « l’humain et le conseil doivent rester au cœur de l’activité d’une banque », le patron de BNP Paribas Réunion entend bien incarner une nouvelle page dans l’histoire de la banque implantée dans l’île depuis 1927.

Passionné par l’histoire et les origines des Réunionnais du fait de son ascendance indienne, il n’aime rien tant que marcher, découvrir ce pays qu’il n’a pas eu le temps d’explorer en étant sous d’autres horizons. Et de savourer encore et toujours ce retour auprès des siens, de son père de 82 ans toujours commerçant dans l’ameublement à Saint-Benoît, sa mère et sa sœur travaillant au conseil départemental. En ne désespérant pas de convaincre son frère, psychologue à Montréal, et son autre sœur, exerçant en réanimation à Bordeaux, de suivre son exemple et de revenir…

Une informatique modernisée : Après un an de préparation, BNP Paribas a basculé sur un système informatique et une nouvelle application bancaire plus évolutifs. Une offre moderne qui va peu à peu s’enrichir de nouvelles fonctionnalités. En fait, La Réunion a ouvert le bal de cette migration puisque c’est un système qui va être commun à l’ensemble des sites d’Outre-mer, en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane et en Nouvelle-Calédonie. Imraan Issa est satisfait : « Nous avons fait beaucoup de préparation, avec des répétitions en conditions réelles, des équipes et rajouté des collaborateurs dédiés pour accompagner les clients. Cela a payé puisque ce chantier majeur s’est déroulé avez zéro incident majeur. »