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Maurice

La canne à sucre a encore de l’avenir

Après avoir réussi sa mutation en industrie cannière, Maurice fait face à de nouveaux challenges. Et alors que la culture de la canne à sucre apparaissait comme un reliquat historique de l’économie locale, elle retrouve clairement de son intérêt.

Avec la fin du protocole sucre en 2008, l’industrie sucrière mauricienne s’est métamorphosée en industrie cannière en se diversifiant. Elle a misé sur une mécanisation massive, une centralisation des usines (de 12 à 4 aujourd’hui), avec des ajustements sociaux qui ont sabré ses effectifs.
L’industrie s’est de plus en plus intégrée verticalement, délaissant la production du sucre roux au profit de sucres raffinés et spéciaux à plus forte valeur ajoutée. 
Autre diversification : les groupes sucriers sont devenus des Independant Power Producers (IPP), des producteurs indépendants d’énergie. Ils produisent aujourd’hui plus de la moitié (55 %) de la puissance électrique nationale en brûlant dans leurs centrales thermiques un mix énergétique fait de bagasse, le résidu fibreux de la canne, et de (beaucoup) de charbon.

DEVENIR DES PROMOTEURS IMMOBILIERS

Depuis peu, ces IPP ont introduit la paille de canne. Preuve que cette activité est de plus en plus stratégique pour ces groupes, Alteo, la première société sucrière du pays en termes de production de sucre et de capitalisation boursière, va créer une centrale à très haute efficience. Elle produira 420 gigawatts (GW) dont 210 en énergie renouvelable et 24 provenant de la paille. L’investissement est de 150 millions d’euros avec un retour sur investissement sur 20 ans. Ces groupes sucriers ont aussi transformé une partie de leurs terres en programmes immobiliers réservés aux étrangers : l’Integrated Resort Scheme (IRS) et le Real Estate Scheme (RES). Cette stratégie a (très) bien fonctionné, puisque malgré une forte concurrence internationale, l’immobilier à Maurice a capté, selon la Banque centrale, 59,4 % des 12,3 milliards de roupies (307,5 millions d’euros) d’investissements directs étrangers (IDE) reçus par Maurice de janvier à septembre 2017.
 

Maurice a développé localement, depuis 1978, 17 types différents de sucres spéciaux non raffinés à plus forte valeur ajoutée, pour des usages domestiques et industriels.
Maurice a développé localement, depuis 1978, 17 types différents de sucres spéciaux non raffinés à plus forte valeur ajoutée, pour des usages domestiques et industriels.  Alteo
 

Pour valoriser des terres anciennement dédiées à la canne à sucre et abandonnées, certains grands groupes se sont lancés dans le maraîchage. Ils sont même devenus les principaux acteurs du marché. C’est le cas de Médine Agriculture, la filiale agricole du groupe éponyme. S’appuyant sur la modernisation de son outil de production, avec une mécanisation accrue, et la reconversion de terres dédiées à la canne, elle a su appliquer les techniques de production sucrière aux cultures vivrières. Résultat : Médine a récolté 4 296 tonnes de fruits et légumes en 2016, soit 4 % de la production nationale : la récolte totale de fruits et légumes était de 107 457 tonnes contre 102 663 tonnes en 2015. Malgré la diversification agricole, on s’aperçoit que la canne à sucre a encore un bel avenir à Maurice. La réduction des parcelles de terre dédiées à la canne a fait baisser drastiquement les entrants pour la production de bagasse, de mélasse, de sucres spéciaux, de rhum et d’énergie, augmentant les coûts de production et donc baissant la compétitivité de l’île. Pour répondre à cela, l’État a dédié 50 millions de roupies (1,25 million d’euros) dans le dernier Budget pour replanter des terres avec de la canne à sucre.