L’économie, c’est de l’énergie transformée
Ceux qui pensent que le charbon et le pétrole vont disparaître de la surface de la terre sont mal informés ou bien ce sont des écolos français qui n’ont pas d’autre horizon que les berges de la Seine. Ils devraient regarder un peu plus loin. En Afrique du Sud, par exemple, où le ministre des Ressources minérales et de l’Énergie, Gwede Mantashe, dans un discours télévisé du 11 août, s’est fermement opposé aux efforts déployés par les groupes écologistes pour bloquer la production de pétrole et de gaz dans son pays. Il a défendu le principe d’une intensification de la production de pétrole et de gaz en Afrique du Sud, où plusieurs découvertes majeures ont été faites ces dernières années. La production cumulée des découvertes de gaz naturel Brulpadda et Luiperd de TotalEnergies, une fois exploitées, est estimée à 50 000 barils par jour (bpj) de liquides et à 125 000 barils équivalent pétrole par jour (boepd). Ces découvertes offrent à l’Afrique du Sud d’immenses possibilités de renforcer son économie et sa sécurité énergétique.
La Chine en pointe dans les voitures électriques
Le mot magique est lancé : sécurité énergétique. L’énergie abondante et bon marché, c’est la clé du développement économique. On pourrait d’ailleurs dire que l’économie, c’est de l’énergie transformée. Ce qu’a répété Louis-Vincent Gave lors d’une conférence donnée à Maurice le 1er août dernier (voir notre article). Pendant que l’Union européenne s’ap-prête à bannir les voitures thermiques à compter de 2035, faisant un « pont en or » aux fabricants chinois de voitures électriques, partout en Afrique des usines vont s’édifier, d’où sortiront… des voitures thermiques.
Dans l’océan Indien, La Réunion et Maurice font figure d’exception sur le continent africain. La marque chinoise BYD, principal concurrent de Tesla sur le marché mondial de la voiture électrique, est déjà représentée par le Groupe Bernard Hayot à La Réunion et par le Groupe Leal à Maurice. Mais que va-t-on faire des batteries au lithium en fin de vie ? À La Réunion, qui a pris une longueur d’avance dans l’électrique, elles commencent à s’entasser. On ne peut pas les recycler localement et les compagnies maritimes ne veulent pas les exporter en raison de risques d’incendie. Les coûts d’assurance seraient trop élevés. Disons alors que si l’on veut développer les véhicules électriques, il faudrait commencer par savoir quoi faire avec ces batteries. Il faudrait réfléchir à leur recyclage avant de sauter sur sa chaise comme un cabris en répétant « vive l’électrique, vive l’électrique ! ». Autre question : que va donner la transition énergétique qu’on veut nous imposer à marche forcée ? Le solaire et l’éolien, énergies intermittentes, ne pourront jamais se substituer à elles seules au charbon et au fioul. À La Réunion, le groupe Albioma est en train de dépenser des fortunes pour remplacer le charbon de ses centrales bagasse-charbon (dans lesquelles la bagasse demeure marginale et saisonnière) par des billes de bois importées des États-Unis. Pour cette biomasse, il y aurait apparemment peu de fournisseurs dans le monde. Ce qui n’est pas fait pour garantir la sécurité énergétique.
Pendant longtemps, la France avait l’électricité la moins chère d’Europe grâce au nucléaire (dont l’empreinte carbone est nulle) et elle se permettait même d’en exporter. Sous la pression des écolos et, plus globalement, de l’Allemagne, elle a revu sa stratégie et déstabilisé ce bel outil industriel qu’était EDF. L’Allemagne, de son côté, s’approvisionnait en gaz peu cher auprès de la Russie. Mais la guerre en Ukraine a entraîné le boycott de ce fournisseur. Une façon de se tirer une balle dans le pied pour le plus grand plaisir des Américains, producteurs de gaz de schiste qui, tout en étant désastreux pour l’environnement, se révèle beaucoup plus cher que le gaz russe. Dans ces conditions, ne nous étonnons pas de subir une inflation désormais structurelle !
Nous vivons déjà dans un nouveau monde
Pendant ce temps, de grands bouleversements géopolitiques sont en train de se produire, dans une certaine indifférence des médias d’Europe de l’Ouest. Pendant que se tenait en Afrique du Sud, du 22 au 24 août, le sommet des BRICS, la presse française consacrait plus de place à un baiser sur la bouche, volé à une joueuse de foot de l’équipe nationale d’Espagne par son entraîneur. Mais que se passait-il à Johannesburg ? Les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Sud-Afrique), dont le PIB dépasse celui du G7, validaient l’adhésion de six pays : l’Iran, l’Argentine, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Au total, 23 pays avait adressé une demande officielle à l’organisation, mais ils seraient une quarantaine à manifester leur intérêt. L’Occident n’inspire plus confiance et le reste du monde ne supporte plus son arrogance. Le mouvement était déjà en cours. Mais on peut dire que Vladimir Poutine, avec son intervention en Ukraine, l’a fortement accéléré. Nous vivons déjà dans un nouveau monde.