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La fourchette des salaires déclarés par les expatriés souhaitant revenir se situe entre 100 000 à 900 000 roupies, soit entre 2 000 et 18 000 euros.
Maurice

Les cadres de la diaspora peinent à rentrer

Le dispositif Mauritian Diaspora Scheme (MDS), qui incite les Mauriciens qualifiés, évoluant à l’étranger dans des secteurs pointus, à revenir travailler au pays, ne semble pas porter ses fruits. Des salaires peu attractifs expliquent le médiocre bilan du MDS, mais aussi le fait qu’il demeure méconnu.

La fourchette des salaires déclarés par les expatriés souhaitant revenir se situe entre 100 000 à 900 000 roupies, soit entre 2 000 et 18 000 euros.
La fourchette des salaires déclarés par les expatriés souhaitant revenir se situe entre 100 000 à 900 000 roupies, soit entre 2 000 et 18 000 euros.  
 

Alors que la question du rebond économique passera, sans aucun doute, par un renforcement de l’expertise, des compétences et de l’expérience de la main d’oeuvre locale, ils ne sont que 389 expatriés à avoir profité du Mauritian Diaspora Scheme (MDS) depuis son lancement en 2015. Soit en moyenne 64 retours par an ! Plus inquiétant et sans doute preuve de la perte d’attractivité de l’ile, après un pic en 2017 avec 84 retours, le nombre d’arrivées est en baisse constante avec un plancher à 53 en 2020. 
Annoncé lors de la présentation du Budget 2015-2016, le MDS a été créé pour inciter les nombreux cadres mauriciens ou d’origine mauricienne expatriés à rentrer au pays. Il s’agit de viser un retour des cerveaux pour permettre à Maurice de devenir une économie à revenu élevé et donc de réaliser un « second miracle économique ». Aujourd’hui, face à la situation économique extrêmement compliquée, cet apport de compétences devient encore plus stratégique. 

Des avantages fiscaux 

Officiellement, le MDS vise en priorité les Mauriciens évoluant dans des secteurs pointus comme ceux des technologies de l’information et de la communication (TIC), de l’ingénierie, des services financiers, des énergies fossiles et renouvelables, de la recherche et développement, de l’hôtellerie et de l’éducation. En retour, ces cadres bénéficient de 10 ans d’exemption fiscale et d’exemptions de droits de douane sur les biens qui seront rapatriés. 
Au vu des statistiques disponibles à l’agence mauricienne de développement économique en charge de ce programme, l’Economic Development Board, on peut avoir une idée du profil de ces « rapatriés ». 
Le premier constat est que les pays d’où ils viennent sont logiquement les États d’immigration traditionnels et historiques de la diaspora mauricienne. On retrouve donc dans le trio de tête : la France et la Grande-Bretagne, suivies de l’Australie. À noter que le Canada, les Émirats arabes unis et même les États-Unis, où l’immigration mauricienne est plus récente (et plus économique), apparaissent aussi dans le classement. 
Autre enseignement, la tranche d’âge des 40-49 ans constitue la majorité des « retournants » (43 %). Au plan sociologique, ces quadragénaires bénéficient en général d’un niveau d’expertise, de compétences et d’expérience assez élevé. Ce sont des seniors dans leur profession. En outre, leurs enfants sont de (grands) adolescents encore à leur charge (et donc à inscrire dans des écoles ou universités mauriciennes) ou bien ils ont quitté le foyer familial pour travailler ou poursuivre leurs études dans les pays où ils résident. Derrière les quadragénaires, on trouve les trentenaires (30 % des retours). On peut imaginer qu’une bonne part de ces 28-39 ans sont des enfants, voire des petits-enfants, de Mauriciens qui ont émigré dans les « années de braise » (1970-1980). 
Concernant les secteurs d’activité dans lesquels évoluent les bénéficiaires, on retrouve en premier les services financiers et bancaires, puis les TIC avec l’e-commerce, suivis des services publics. En queue de liste, paradoxalement, on trouve la recherche. 

Un dispositif clivant 

Concernant les métiers exercés, on recense des médecins spécialistes, des architectes, des experts-comptables et des avocats. Il est à noter que les trois dernières professions sont déjà sous tension avec un excédent de professionnels dans ces domaines sur le marché local. 
Enfin, au vu des salaires mensuels déclarés par ces émigrés, on s’aperçoit qu’ils sont en général bien supérieurs à ceux pratiqués à Maurice. En effet la fourchette se situe entre 100 000 à 900 000 roupies soit entre 2 000 et 18 000 euros. Rappelons que le salaire moyen à Maurice est de 21 320 roupies (426 euros). 
Le Mauritian Diaspora Scheme bénéficie d’un site internet dédié (en anglais). Il est possible d’y évaluer sa candidature, de télécharger et de remplir des demandes en ligne. Le MDS s’appuie sur un système de points. Pour être éligible, il faut au minimum répondre à 60 % des critères établis. 
Malgré tout, le MDS est très mal connu de la diaspora car il est peu mis en avant par les autorités mauriciennes. Une des explications est que le package proposé suscite beaucoup de grincements de dents parmi les cadres mauriciens locaux et la population en général. D’ailleurs, un haut cadre d’un cabinet international de chasseurs de tête très connu soufflait en off que, selon ses informations recueillies à l’EDB, « de façon arbitraire et quasi systématiquement, la moitié des demandes est rejetée d’office ». 
Bien entendu, des retours peuvent se faire, et se font certainement, en dehors du MDS, mais leur nombre reste difficile à évaluer.