Les financiers veulent mettre au vert les entreprises
Des projets d’investissement qui s’inscrivent dans la RSE, en particulier la responsabilité environnementale, peuvent accéder plus facilement à des financement et à de meilleures conditions. Une tendance mondiale dont l’océan Indien pourrait profiter davantage.
La transition vers demain sera accélérée par l’accès des entreprises au financement « vert » et à impact. À ce chapitre, les institutions internationales et les programmes d’aide jouent un rôle crucial. Parmi eux, le programme Sunref de l’Agence française de développement (AFD) qui a mobilisé 250 acteurs à Maurice et dans l’océan Indien. Cent millions d’euros de crédit ont été accordés au financement de projets d’énergies renouvelables, d’efficacité énergétique et de protection de l’environnement. Pour Maurice, 85 millions d’euros sont à nouveau disponibles à travers trois banques commerciales : Mauritius Commercial Bank (MCB), State Bank of Mauritius (SBM) et AfrAsia Bank. N’importe quelle entreprise peut en bénéficier à condition de remplir les critères d’éligibilité.
Les fonds accordés par les institutions financières internationales transitent par les banques locales. Mais lorsqu’il s’agit de financer les projets durables, la règlementation en vigueur peut constituer un obstacle de taille. Manisha Dookhony, est une économiste mauricienne chargée de mission à l’Union européenne dans le cadre du mécanisme régional d’assistance technique Africa RISE. Intervenant au 13ème forum économique de l’océan Indien organisé par Cap Business OI, elle a pris l’exemple des épaves de voitures abandonnées dans la nature : « Pour résoudre ce problème, une modification de la loi est urgente mais tarde à venir », regrette-t-elle. Elle déplore ainsi le fait que malgré des capacités de financement des organismes internationaux importantes, les capacités d’absorption des pays sont faibles, notamment dans la zone océan Indien.
Le « greenwashing » dans le collimateur
Dans les îles de notre région, l’enjeu reste le partenariat public-privé qui ne fonctionne pas toujours à plein régime. Il y a tout un travail à réaliser pour mettre en place un cadre légal efficace et le dialogue entre le régulateur (l’État) et les opérateurs (les entreprises) se révèle crucial.
À Maurice, on est dans l’attente d’un cadre légal pour l’utilisation optimale de la biomasse, un Biomass Framework qui va permettre d’avancer vers l’utilisation de technologies « vertes » et dont on attend avec impatience la mise en œuvre.
Les institutions financières sont vigilantes par rapport à ce qu’elles appellent le greenwashing (écoblanchiment). C’est le cas chez CIM Finance qui a introduit une charte baptisée Green Bond Framework. Afin de faciliter le financement de projets qui contribuent à une économie neutre en carbone. Le produit Green Lease de CIM Finance vise à encourager l’adoption de véhicules hybrides et électriques, mais également à soutenir tout autre projet écologique porté par ses clients. Les Green Bonds (obligations vertes) ont aussi été créées pour répondre à la demande pour des opportunités d’investissements socialement responsables. Le Green Bond Framework identifie les cinq catégories de projets ayant le potentiel de fournir des résultats positifs et durables pour le pays et étant donc susceptibles d’être financés par le produit de ces obligations vertes. Ces catégories sont : les énergies renouvelables (achat, installation et entretien de technologies telles que les panneaux solaires) ; l’efficacité énergétique (projets qui réduisent la consommation d’énergie ou atténuent les émissions de gaz à effets de serre dans toute construction immobilière) ; les moyens de transport propres (achat de voitures électriques et hybrides dont le niveau d’émissions de CO2 est inférieur à 79 g, mais aussi projets de transports en commun) ; la gestion durable de l’eau et des eaux usées (des projets qui améliorent la qualité, l’efficacité et la conservation de l’eau) et le bâtiment écologique (construction ou rénovation de bâtiments certifiés durables).
Les institutions ont ainsi la possibilité de se positionner comme agents du changement. De son côté la Mauritius Commercial Bank (MCB) collabore avec l’AFD depuis 2009 pour financer des projets « verts ». La banque commerciale joue aussi le rôle de conseiller auprès d’une clientèle désireuse de se mettre au vert. Recyclage des déchets, gestion de l’énergie/l’eau, industrie de substitution pour réduire les importations.
Comment évaluer l’impact « vert » d’un projet ? Il y a des informations incontournables à fournir pour qu’une banque puisse financer un projet : gouvernance, impact climatique, innovation. Attention cependant au greenwashing ! Au bluff, comme le signale Xavier Bathfield, chef du département de coopération régionale à la MCB.