Les taux de crédit dans une tendance haussière
En baisse depuis 20 ans, malgré quelques secousses épisodiques, les taux de crédit sont désormais dans une tendance haussière. Dans le même temps, les coûts de construction flambent. De quoi se poser quelques questions sur l’avenir du marché…
« En six mois, les taux de crédit ont plus que doublé », reconnaît Fabien de Toledo, directeur général de la Sofider, qui ajoute qu’on se situe actuellement dans les 2,5 %. Pour mieux comprendre, il faut savoir qu’on en était arrivé à des taux proches de 0, disons entre 0 et 1 %, les prêteurs bénéficiant de refinancements à taux négatifs. L’inversion de la courbe descendante, pressentie dès la fin de l’année 2021, ne semble pas conjoncturelle, mais plutôt dans une tendance lourde. Et ce n’est pas sans conséquence pour les acquéreurs puisque 1 % en plus, cela se traduit par « 8 % de capacité d’investissement en moins ».
Une situation qui s’explique évidemment par l’inflation. Inéluctable quand on injecte beaucoup d’argent dans l’économie, comme cela a été le cas avec la crise de la covid-19. Il faut y ajouter l’explosion des coûts du fret en 2021, mais aussi l’incidence de la crise en Ukraine qui a renchéri le coût de l’énergie. Le secteur de la construction est évidemment impacté et même s’il est difficile de chiffrer avec précision l’augmentation des coûts, on peut estimer la hausse à +20 %. « L’inflation est très forte, reconnaît André Auzet, directeur adjoint en charge des marchés spécialisés à la Caisse d’Épargne Cepac, mais il y a aussi de la spéculation. Et à La Réunion, on subit à la fois l’inflation sur le coût des matériaux et sur le transport. Sur le béton, on se situe à +30 % sur douze mois ; sur l’acier, c’est encore plus. »
Avec des emprunteurs ayant moins de capacité financière et des coûts en hausse, comment le marché réunionnais de l’immobilier va-t-il réagir ? Va-t-on enregistrer une baisse des prix de vente alors que le prix du foncier est dans une tendance haussière depuis belle lurette ? Les derniers chiffres publiés par Olivier Paris, dans le cadre de son Observatoire de l’immobilier, établi sur la période du 1er juillet au 31 octobre (avec cependant des taux encore très bas), indiquent des hausses, à l’exception du nord de l’île. Ce qui n’étonne pas André Auzet qui ne croit pas à une baisse des prix, « pas énorme en tout cas car il n’y a jamais eu beaucoup d’offres à La Réunion ».
L’analyse de Fabien de Toledo diverge quelque peu. Tout en soulignant que la tendance haussière des taux va continuer au moins jusqu’à mi-2023 et que le gros du marché concerne la vente de l’ancien, il considère que la variable d’ajustement pourrait être le prix de vente. Mais cela reste au conditionnel. Si le prix du foncier reste élevé, que les capacités d’emprunt baissent et que les coûts de la construction s’envolent, on se demande comment le marché pourrait ne pas être impacté. Et comme toujours, la différence se fera entre ceux qui sont pressés de vendre et devront revoir leur prix et ceux qui peuvent attendre.
Le taux d’usure : Le taux d’usure correspond au taux d’intérêt maximum légal que les établissements de crédit sont autorisés à pratiquer lorsqu’ils accordent un prêt. C’est la Banque de France qui est en charge du calcul, pour l’heure trimestriel, de ce taux au-delà duquel il est interdit de prêter de l’argent en France. Celle-ci l’a relevé en octobre 2022. Il est à 3,05 % pour les prêts d’une durée de 20 ans et plus… Ce qui prend en compte le taux d’intérêt du crédit, l’assurance et tous les frais annexes. La prochaine révision du taux d’usure aura lieu le 1er janvier 2023.