Eco Austral – Actualités économiques et entreprises de l'Océan Indien

Réunion

Murs végétaux : Inexence et Greenskin se rapprochent

EVE, l’une des sociétés du groupe français Inexence, a acheté la licence d’exploitation du brevet du Réunionnais Greenskin et fabrique désormais les modules de façades et toitures végétales imaginées par Benoît Dumortier.

Si Greenskin n’est pas encore une licorne créole (*), l’entreprise de toitures et de façades végétalisées créée par Benoît Dumortier – d’abord sous le nom de Dharmatech – fait beaucoup parler d’elle ces derniers temps. Elle a été invitée par la Région au salon Vivatech en juin dernier avec six autres fleurons de l’innovation réunionnaise et fait partie des réussites citées en exemple parmi les sociétés soutenues par le dispositif de renforcement de haut de bilan du fonds Financière Région Réunion. On sait moins qu’elle s’est rapprochée d’Inexence, le groupe de Thierry Renard, pour accélérer son développement. Il y a quelques mois, elle a vendu la licence d’exploitation de son brevet à EVE (Espace vert environnement), une des composantes du groupe. « Nous avions été mis en relation par le pôle de compétitivité Qualitropic il y a deux ans, retrace Thierry Renard. EVE est ainsi devenu le poseur des installations fabriquées par Dharmatech. Nous sommes allés jusqu’au bout de la logique et nous fabriquons maintenant les supports végétalisés sous licence Greenskin. » L’accord couvre La Réunion, mais aussi les autres territoires où Inexence a développé des activités : Mayotte, Maurice, la Côte d’Ivoire et le Sénégal.

Déposé à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), le brevet de Greenskin porte sur la conception d’une structure modulaire de toiture et de mur végétalisés, fait de panneaux juxtaposables d’un mètre sur 1,25 m, préparés en atelier. Cette organisation permet un gain de temps de pose considérable et des tarifs très compétitifs. À l’argument commercial s’est ajouté la qualité et la durabilité de la réalisation finale, qu’on peut apprécier au Village by CA de la Technopole ou à l’aéroport Roland-Garros, qui furent les premiers clients publics de l’entreprise.

Rafraîchir les écoles

Benoît Dumortier a mis au point son dispositif le temps d’une incubation à la Technopole, entre 2017 et 2019. Au Bernica, où il avait basé sa préfabrication, il était en mesure de livrer jusqu’à 300 m² par mois de supports végétalisés.

En septembre, l’atelier a été transféré au Domaine de l’Hermitage, la pépinière qui produit les plants pour les aménagements paysagers d’EVE, dans le secteur du piton Defaud, à Saint-Paul. La capacité de fabrication de modules a quasiment doublé, à l’échelle des ambitions du tandem. EVE et Greenskin misent sur un énorme marché potentiel, celui de la rénovation thermique des bâtiments publics, subventionnée à hauteur de 75 % par le Fonds européen de développement régional (Feder). De nombreuses communes se préparent à solliciter l’aide européenne pour rénover leurs écoles primaires, dont les factures d’électricité et d’entretien de la climatisation, quand il y en a, sont particulièrement budgétivores. Toitures et façades végétales leur offrent une solution pour rafraîchir les salles de classe à moindre coût. D’autre part, huit écoles de l’île sont engagées dans le projet « écoles durables », consistant à expérimenter des méthodes d’amélioration du confort thermique sans recourir à la climatisation. « Nous avons déjà fait le tour des bâtiments scolaires et préparé un dossier pour chaque commune, annonce Benoît Du-mortier. La Possession est la plus avancée dans cette démarche et EVE équipe actuellement plu-sieurs de ses écoles ».

Le fondateur de Greenskin se concentre désormais sur la R&D pour faire encore évoluer son invention en y associant de la production d’électricité solaire. Sa participation au salon Vivatech lui a permis de nouer des premiers contacts avec des clients potentiels en Métropole. « Notre solution peut être transposée en climat tempéré, précise-t-il. Nous devons seulement adapter notre système et notre palette végétale pour tenir compte du gel. »

(*) La « licorne » est un start-up dont la valorisation atteint un milliard de dollars, sans être cotée en bourse.