Eco Austral

Découvrez tous nos articles en illimité. Je m’abonne

n

Eco Austral

Réunion

NXSE 2017 : le pari gagnant de l’ouverture

Pour sa deuxième édition, le forum NxSE avait choisi de s’ouvrir à d’autres filières économiques que les TIC afin d’élargir son champ d’action et ainsi démontrer sa capacité à fédérer autour des enjeux de la transformation digitale du territoire.

« La première édition avait réuni 300 participants. Cette année nous avons dépassé la barre des 700, ce qui valide clairement notre choix d'avoir voulu ouvrir nos thématiques à d'autres filières. » Philippe Arnaud est un organisateur heureux. Le président de l'association Digital Réunion, qui porte l'événement, a été, comme à son habitude, au four et au moulin durant les trois jours (3, 4, et 5 octobre) intenses du Forum. « La première année, c'était une bonne chose de fédérer les acteurs du numérique, poursuit-il, mais cette année, nous avons souhaité discuter avec ceux qui, finalement, sont nos clients, et se focaliser sur des domaines importants. » Il est vrai que les cinq thématiques de ce NxSE 2017 ratissaient large. Industrie, tourisme, agriculture, santé et Smart City, de quoi concerner beaucoup d'acteurs économiques, et pas des moindres. La Cinor (Communauté intercommunale du nord de La Réunion), principal partenaire, s'y retrouve parfaitement. « Le succès de ce forum prouve que les thématiques que nous avons proposées ont du sens », explique Jean-Paul Lefèvre, directeur général adjoint de la collectivité. Le numérique est au centre de toutes ces filières et les entraîne dans son développement. « Qu'il s'agisse de l'agriculture connectée, de l'industrie du future ou de Smart City, dans tous ces domaines, la Cinor développe des équipements et se trouve donc à l'écoute des solutions existantes. »

UNE MINISTRE ET DES ANNONCES

L’enthousiasme est partagé par la ministre des Outre-mer. Annick Girardin, alors en déplacement à La Réunion, a clôturé NxSE par un discours mobilisateur. « Ce forum international de la transformation numérique à la confluence de l’Afrique et de l’océan Indien, ici à La Réunion, ne peut que m’interpeller. Nous partageons des valeurs communes, celles de l’espoir, de l’audace et de l’innovation. Vous êtes l’illustration concrète de l’Outre-mer des solutions que j’appelle de mes vœux. » Au-delà des compliments de rigueur, la ministre en a profité pour faire des annonces. À commencer par le déplafonnement en Outre-mer du crédit d’impôt recherche majoré « pour inciter les grands centres de recherche à s’installer dans les territoires ultramarins ». Elle s'est également engagée à permettre chaque année à 100 jeunes d’Outre-mer porteurs de projets d’entreprise innovante de venir dans l’Hexagone, pendant six mois, le temps pour eux de tisser leur réseau et de rencontrer les acteurs de l’innovation. 
Un ministre et des annonces, difficile de faire mieux pour installer un événement. Du moins médiatiquement. Car à côté, il y a le travail de fourmis pour développer le réseau et le business. 85 partenaires institutionnels et privés, 78 speakers et intervenants de La Réunion, Madagascar, Maurice, Tunisie, Sénégal, Côte d’Ivoire, Ghana, Nigéria, Kenya, Afrique du Sud, Nouvelle-Zélande, Luxembourg, France hexagonale et ultramarine, cinq conférences plénières, 14 tables rondes, voilà pour les chiffres bruts. Et puis, il y a ce qu'on ne voit pas. « L'an dernier, plus de 50 accords ou partenariats futurs sont nés durant NxSE, assure Philippe Arnaud. Un fonds mauricien a par exemple fortement investi dans une start-up réunionnaise de l'énergie. Cette année, au moins deux grandes entreprises métropolitaines étaient présentes à NxSE et envisagent de délocaliser une partie de leur R&D à La Réunion. » Localement, des acteurs comme Le Club du Tourisme, la FRBTP (Fédération réunionnaise du BTP), Qualitropic (pôle de compétitivité), l’ADIR (l’association des industriels) et La French Tech Reunion se sont croisés et ont pu échanger sur d'éventuels futurs partenariats.

NXSE, C’EST AVANT TOUT DU RÉSEAUTAGE

La Cinor, qui cette année avait un stand, reconnaît également avoir noué des contacts fructueux, listés sans filtre par Jean-Paul Lefèvre. « On a rencontré le CIRBAT, avec qui l'on souhaite travailler depuis un moment sur la thématique des artisans du futur. Mais aussi la Caisse des dépôts pour un éventuel partenariat, Outre-mer Network qui est implanté à la Station F, ou encore Simplon et la Grande école du numérique pour créer une formation sur le territoire. Ce forum sert vraiment de catalyseur. » Le réseau c'est, en quelque sorte, la thématique de fond de NxSE. Et si le forum est né en 2016, année où La Réunion a intégré le réseau French Tech, ce n'est pas un hasard. Il fait clairement partie du cahier des charges que Digital Réunion doit remplir pour conserver le précieux label. Les connexions à d'autres membres du réseau French Tech sont en ce sens une nécessité et l'ouverture vers l'Afrique un choix payant. Sur le forum, étaient présentes, en plus de la French Tech Réunion, la French Tech Cap Town et Abidjan ainsi que Martin Obuya, en charge du dossier de candidature de Nairobi au réseau. L'occasion de travailler sur des objectifs de collaboration entre les écosystèmes, le financement de start-ups et l’accès au marché africain des entreprises réunionnaises. Tout ce petit monde devait d'ailleurs se revoir dès novembre, à l'Africarena 2017, en Afrique du Sud. Dans son discours de clôture, Philippe Arnaud ne s'y est d'ailleurs pas trompé. « La Réunion saisit cette opportunité unique dans son histoire insulaire de pouvoir jouer sa propre partition dans les échanges entre Nord et Sud, marchés continentaux et océaniques, entre régions francophones et anglophones, entre Europe et Afrique. Ce grand marché régional qui englobe l’Afrique de l’Est et australe et les régions insulaires de l’océan Indien et qui totalise plus de 450 millions d’habitants est parfaitement à la portée de cette part de France attachée au continent africain. » 

EN 2018, LA BANQUE ET LA FINANCE À L’HONNEUR

C'est toujours dans cette optique d'ouverture aux autres filières mais également aux pays de la zone et à l'Afrique que sera organisé NxSE 2018. Il se tiendra au quatrième trimestre et Philippe Arnaud a déjà une petite idée des futures thématiques. « Finetech, blockchain, je pense que tout ce qui se rapporte à l'univers bancaire et que nous n'avons pas abordé cette année sera au cœur de NxSE 2018. » Il peut en tout cas déjà compter sur la fidélité de la Cinor. « On sera plus que jamais partenaire premium », assure Jean-Paul Lefèvre. Financé aux deux tiers par le secteur privé, NxSE 2017 a été monté avec un budget de 345 000 euros. « En 2016, nous avions un budget de 315 000 euros que nous avions réussi à équilibrer. Cette année, nous sommes même bénéficiaires », se félicite Philippe Arnaud.
Annualiser NxSE pour en faire, à moyen terme, un rendez-vous incontournable, c'est l'objectif de Digital Réunion et de son président. En 2017, nous avons passé un cap, on commence à mettre en place une communauté de vues. Mais on aura vraiment réussi quand les entreprises de la zone océan Indien et d'Afrique mettront NxSE comme point de passage obligé dans leur planning. » 

DES ÉVÉNEMENTS DANS L’ÉVÉNEMENT
– Un village de 25 exposants au cœur du forum. Une évolution par rapport à l'édition 2016 où les stands étaient plus à l'écart.
– Un BarCamp « industrie du future » sous la forme d'un atelier participatif d'intelligence collective qui a réuni 170 participants.
– Un concours du « Best Idea Pitch » avec huit participants. C'est le projet Dr. Smart, d'Anthony Mader, qui a remporté le premier prix.
– Un Hackathon en partenariat avec l'ARS (Agence régionale de santé) et la French Tech qui a rassemblé 31 participants. L'équipe lauréate, Actizombi, a remporté 5 000 euros de lots offerts par la DIECCTE (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi).
CANAL NUMÉRIQUE JEUNESSE DE L'OCÉAN INDIEN
Le CNJ OI est une chaîne de télévision diffusée sur la canal 978 du bouquet Zeop. « Notre volonté est de promouvoir la jeunesse dans l'océan Indien, explique la présidente de l'association, Yasmine Moutien. C'est une chaîne faite par et pour les jeunes. » Une dizaine de jeunes reporters réalisent des reportages à La Réunion, à Maurice et à Madagascar sur des thématiques larges comme la santé, l'insertion, l'emploi, la culture et le sport. Soutenu par différents partenaires publics comme l’État, l'ARS OI (Agence régionale de santé) et le Département de Mayotte, la chaîne souhaite montrer une image positive de la jeunesse. « Nous sommes tous bénévoles et motivés par ce projet, assure la présidente. Nous souhaitons vraiment y mettre du cœur. » Du cœur… et des idées. Le CNJ OI développe actuellement une plateforme numérique destinée aux recruteurs avec des CV en vidéo. Ces CV, c'est l'association qui les réalise pour les jeunes candidats. « On lutte ainsi contre l'illettrisme et la discrimination », précise Yasmine Moutien.

Au cœur du village des exposants du Forum NxSE, le stand de CNJ OI attirait l’œil.
Au cœur du village des exposants du Forum NxSE, le stand de CNJ OI attirait l’œil.  Guillaume Foulon
Fabien Degieux porte ce projet qui a remporté, en juillet dernier, le prix « coup de cœur du jury » lors du Challenge national #DigitAg soutenu par le ministère français de l'Agriculture.
Fabien Degieux porte ce projet qui a remporté, en juillet dernier, le prix « coup de cœur du jury » lors du Challenge national #DigitAg soutenu par le ministère français de l'Agriculture.  Guillaume Foulon

ELOLÉO POUR DIGITALISER LES CIRCUITS COURTS AGRICOLES
« Cette belle aventure a été rendue possible par le soutien de Qualitropic qui continue de nous accompagner dans notre développement. » Fabien Degieux, l’entrepreneur à l’origine de cette application, tient à souligner le rôle du pôle de compétitivité alors que le projet n’en est qu'à ses balbutiements. L'ambition d’Eloléo est de digitaliser les circuits courts dans l'agriculture pour permettre aux producteurs de proposer leurs produits directement aux consommateurs. « Ses deux principales qualités sont l’instantanéité et la proximité », précise Fabien Degieux. Maintenant que l'application est fonctionnelle et que son intérêt n'est plus à démontrer, reste à lever des fonds. « Nous souhaitons nous orienter vers des fonds privés. L'objectif est de lancer l'application à La Réunion en 2018 puis de l'exporter ensuite. » D'autant qu'Eloléo n'est qu'une des applications développées par All Over App, la start-up de Fabien Degieux. Son premier projet, Use by now, est une application qui permet de digitaliser des circuits courts directement avec les commerces qui ont besoin d'écouler des produits en fin de vie. « Là aussi, c'est la proximité qui est au cœur du service. » Testée en version bêta durant deux mois à Saint-Pierre, Use by now est également amenée à se développer. « C'est en créant cette application que nous avons réalisé que ce concept de circuit court pouvait s'appliquer à de très nombreux domaines comme l'agriculture, mais aussi le tourisme et le BTP. Une fois que notre process est en place, nous n'avons plus qu'à le décliner. On appelle ce concept la scalabilité. »