Eco Austral – Actualités économiques et entreprises de l'Océan Indien

Réunion

Quatre questions à Joël Personné

L’Éco austral : Penser la ville réunionnaise de demain, n’est-ce pas avant tout organiser l’arrivée de 100 000 habitants supplémentaires dans la prochaine décennie ?
Joël Personné
 : Cette question est au cœur de la réflexion que le Club entend mener dans ses ateliers. Il est évident que l’île ne pourra pas absorber cette croissance démographique en construisant des « cases à terre », l’aspiration légitime des Réunionnais. L’habitat individuel va devenir un luxe. Les aires urbaines actuelles sont constituées d’habitat individuel ou diffus sur plus de la moitié de leur surface. Leurs densité est très inférieure à celle des villes métropolitaines. Leur densification est inévitable.

Comment la faire accepter ?

Il ne s’agit pas de construire Hong-Kong à Saint-Denis et à Saint-Pierre, seulement de se rapprocher d’une densité de 35 à 40 logements à l’hectare. Mais pour que cette ville de demain soit acceptée, il faut qu’elle soit aimable. Il faut rapprocher l’offre de travail, de culture, de loisirs, construire la « ville du quart d’heure », où l’on trouve tout à moins de 15 minutes de chez soi.

Les plans d’aménagement actuels répondent-ils à ces enjeux ?

La ville réunionnaise s’est étalée sans réflexion suffisante. Maintenant, il faut faire avec ce qui existe. Les plans et les schémas d’aménagement courent après la ville. Le Schéma d’aménagement régional (SAR), en cours de révision, devra être très clair sur les stratégies de renouvellement urbain à mettre en place, en sachant que sur une tache urbaine couvrant au total 2 500 hectares, il y aurait 1 000 hectares de « dents creuses » ou de foncier mal utilisé.

La ville de demain peut-elle ressembler à celle d’aujourd’hui ?

Si l’on ne fait que reproduire ce que l’on a fait, on ne répondra pas aux enjeux de l’avenir, ce qui implique notamment de prendre en compte à la fois les besoins de foncier économique, le vieillissement de la population et de ne pas oublier qu’il y a toujours autant de jeunes sans travail ou à faibles revenus, obligés de cohabiter avec leurs parents. Il y a déjà des évolutions positives, notamment en matière de construction. La qualité du logement social produit aujourd’hui à La Réunion, on ne la rencontre pas souvent sur d’autres territoires. D’autres initiatives, d’autres réflexions vont se développer, notamment dictées par l’urgence climatique.