Rabin Apavou, directeur associé d’Alena : « Malgré la concurrence du Portugal, Maurice demeure attractive »
Implanté à Maurice, aux Émirats arabes unis et au Portugal, ce Réunionnais spécialisé dans le conseil et la vente en immobilier a une vision à 180°. Ce qui rend plus fine son analyse des marchés émergents.
L’Eco austral : En matière d’immobilier à Maurice, comment s’est passée l’année 2017 pour vous et quelles sont les perspectives pour 2018 ? Est-ce que le segment du luxe s’impose toujours ?
Rabin Apavou : Pour nous, l’année 2017 a été une année de veille à Maurice ; en revanche, 2018 est placée sous le signe de la relance sur plusieurs fronts. La veille en 2017 s’explique par une étude minutieuse des différents segments du marché, mais aussi par notre présence soutenue dans d’autres pays. Je ne peux pas être partout à la fois et il a bien fallu faire des choix. En tous cas, je ne pense pas que le segment du luxe s’impose plus qu’un autre à Maurice. Nous travaillons sur des programmes multipolaires avec une minorité de programmes haut de gamme. Nous sommes sur 15 à 20 unités sur des programmes de luxe, alors que les programmes qui sortiront à partir de 175 000 euros se comptent en centaines de logements. Nous constatons une demande soutenue pour le milieu de gamme. C’est sur ce segment que nous concentrons nos efforts en essayant de rester accessibles car les prix du foncier ont tendance à flamber ces dernières années.
Quels sont vos clients et d’où viennent-ils ?
Notre clientèle est essentiellement composée de Français, y compris les Réunionnais, ainsi que quelques Sud-Africains. Il s’agit d’une majorité de gens de 40 à 50 ans qui achètent en prévision de leur retraite à mi-temps à Maurice. Le nouveau visa pour retraités à partir de 50 ans lancé par le gouvernement est une bonne chose pour le pays qui profite d’une qualité d’accueil exceptionnelle et de la proximité de la France et tous ses services sanitaires et administratifs avec La Réunion juste à côté. Beaucoup passent en effet quatre à six mois dans le pays et le reste de l’année près de leur famille. En attendant, ils profitent d’une bonne rentabilité et d’une belle plus-value. Sur nos programmes, nous visons au moins 5 % de rentabilité et même 10 %sur certains. Nous disposons d’un bon réseau pour les commercialiser, avec de solides partenaires financiers français et des prestataires sérieux pour la maîtrise d’œuvre. En résumé, l’île Maurice reste attractive pour les gros investisseurs car il y a un bon retour sur investissement.
Votre enseigne est surtout connue pour le programme « Real Estate Scheme » (RES) de Choisy les Bains. Quels sont les autres projets en cours et leurs positionnements respectifs ?
La phase 2 du programme à succès de Choisy-les-Bains devrait démarrer bientôt (voir notre encadré à ce sujet – NDLR). À Grand-Baie, deux petits programmes sont lancés, avec 17 et 20 villas, en même temps qu’un projet plus ambitieux de 150 appartements. Ces programmes ciblent la clientèle réunionnaise mais aussi mauricienne qui n’a pas assez profité de nos précédents programmes. Par exemple, à Choisy-les-Bains, beaucoup de Mauriciens ont regretté de n’avoir pas investi à temps. Nous en comptons seulement trois sur les 120 lots. Aussi, le programme des 150 appartements de Grand-Baie, pour des tarifs entre 8 et 10 millions de roupies (200 à 250 000 euros – NDLR) devrait les satisfaire. Alena sera également exécutif sur trois programmes PDS (Property Development Scheme), dont deux à vocation haut de gamme à plus de 500 000 euros dans le nord et un PDS dans l’ouest, à Carlos précisément (Tamarin – NDLR) avec des prix variant de 600 000 à 1,2 million d’euros. Pour cela, nous travaillons avec un important promoteur français, Fontanel, qui est établi dans la région lyonnaise.
On parle aussi d’un centre d’affaires dans la Cybercity ?
C’est exact et c’est une autre cible que nous visons pour la Cybercity, à Ebène, où Alena vient d’aménager son nouveau siège. Autre cible également avec un programme à Albion pour des unités proposées à des tarifs variant entre 7 et 10 millions de roupies (de 175 à 250 000 euros). Sur tous ces projets destinés à un retour sur investissement rapide, nous travaillons avec un bail commercial de neuf ans avec le client. Néanmoins, il faut relativiser tout cela car les RES à Maurice ne constituent que 350 à 400 ventes par an, ce n’est pas l’Eldorado comme certains le croient. C’est la raison pour laquelle nous intervenons sur des marchés plus porteurs comme le Portugal.
Justement, comment évolue le marché du Portugal, grand concurrent de Maurice dans l’accueil de résidents français, le plus souvent retraités ?
Le Portugal est un marché qui ressemble à celui de Maurice, mais il est beaucoup plus important grâce à sa proximité avec la France et l’Europe en général. Il y a d’ailleurs là-bas un grand boom de l’immobilier. Un indicateur est bien révélateur : voici cinq ans à peine, le marché de l’immobilier n’était pas structuré avec presque pas d’agences immobilières dignes de ce nom. Aujourd’hui, leur nombre a été multiplié par 400 ! Le Portugal reste la destination privilégiée des Français, leur installation est facile car ce pays appartient à l’Union européenne, donc nul besoin de critères précis qui nécessitent des cabinets conseils comme à Maurice. Le coût de la vie et la fiscalité y sont également très attractifs.
La forte demande pour le Portugal ne va-t-elle pas faire grimper les prix dans ce pays ?
C’est déjà le cas dans certaines régions et le boom commence à montrer des signes d’essoufflement. À Lisbonne, par exemple, nous avons rénové deux immeubles avant d’en revendre un et d’en restituer un autre à son propriétaire. Les prix ont flambé de 25 % ces dernières années et nous avons opté pour d’autres régions émergentes comme Nazaré. Dans cette station balnéaire, nous sommes au cœur d’un ambitieux projet venant d’un fonds d’investissement chinois, la mairie pour la partie foncière et la vente en l’état futur d’achèvement (Vefa) en bout de chaîne. Nous nourrissons également là-bas un beau projet d’aménagement de zone industrielle sur 16 hectares avec des investisseurs de Dubaï. Toutefois, nous ne sommes que des intermédiaires, nous ne construisons pas. Sauf si la demande se précise, nous pourrons le faire en garantissant un niveau de qualité comme nos réalisations mauriciennes le prouvent.
En résumé, on peut dire que le Portugal a toujours de l’avenir en matière d’immobilier ?
Oui, il y a de belles perspectives pour les prochaines années grâce aux golden visas qui ciblent les citoyens du monde entier. Dans ce sens, nous sommes très actifs du côté de la Chine grâce à notre statut de membre du Chinese Business Club de Paris. L’idée est d’attirer d’importants investisseurs chinois au Portugal comme c’est déjà le cas sur Nazaré.
Pour en revenir à Maurice, explorez-vous de nouvelles pistes pour votre activité ?
Comme indiqué précédemment, nous essayons de répondre aux marchés en fonction d’études bien établies. Il ne s’agit pas de foncer dans toutes les directions les yeux fermés. Mais nous sommes engagés sur plusieurs fronts simultanés car ils correspondent à des demandes bien spécifiques. Au-delà des programmes immobiliers annoncés, nous avons un sympathique projet de Guest House à Péreybère.
Il y a une vraie demande pour des chambres à une cinquantaine d’euros la nuit et nous venons d’acquérir un petit hôtel de 27 chambres dans ce sens. Il sera aménagé progressivement jusqu’en 2020, date à laquelle il devrait proposer une centaine de chambres, un restaurant de type Beach Club et un programme immobilier R+2 pour répondre à la nouvelle offre d’accessibilité aux étrangers.
Alena s’est distingué sur le marché mauricien avec le programme RES (Real Estate Scheme) Choisy Les Bains. Situé à 100 mètres de la plage de Choisy les Bains, ce programme résidentiel, organisé autour d’une immense piscine à l’aspect de lagon, a proposé des appartements à partir de 195 000 euros (taxes, notaire et mobilier inclus). « Ce produit a connu le succès et il correspond à notre positionnement sur le créneau moyenne gamme, souligne Rabin Apavou. Il doit être suivi d’une deuxième phase qui sera uniquement composée de 54 villas, cela quand le foncier sera libéré. En effet, les prix ont tendance à flamber de manière un peu artificielle et nous sommes toujours en phase de négociation pour l’acquisition du terrain. Nous tenons à rester sur notre positionnement qui est de proposer des tarifs 15 % à 20 % inférieurs à ceux de la concurrence… »
DU GRAND LUXE SUR L’ÎLE PLATE AVEC CORAIL HÉLICOPTÈRE
C’est un aménagement très haut de gamme que Rabin Apavou annonce en exclusivité dans nos colonnes sur la merveilleuse île Plate, dans les îles du Nord, à une heure de vedette rapide de Grand-Baie. « Sur les 257 hectares de l’île, 4 sont la concession de FGI (Fanchette Group Investissement) avec lequel nous venons de fusionner (*). L’idée est de lancer un nouveau type d’excursions de luxe dans un environnement naturel exceptionnel. Le site du seul restaurant de l’île, le Governor’s House, actuellement exploité par l’hôtel 20° Sud, labellisé Relais et Châteaux, va être totalement réaménagé dans un concept où la nature sera privilégiée et protégée. »
L’aménagement d’un héliport sur l’île Plate permet déjà de déposer de riches clients en provenance de l’hôtel Shandrani qui dispose lui aussi d’un héliport. Un aménagement qui cible notamment les mariages et qui se fera en partenariat avec Corail Hélicoptères. Le projet se réalisera en synergie avec celui des « îles flottantes » de la baie de Mont Choisy, constituées de catamarans de luxe ancrés en permanence dans cette baie qui jouxte celle de Grand-Baie. Alena sera associé dans la holding FGI qui exploite le site sous l’enseigne Blue Zest et Rabin Apavou en sera le nouveau directeur général. Une première ouverture est prévue en octobre 2018.
(*) FGI a démarré ses activités en 2011 avec un service de croisières lancé sous le nom de Lebounty Boat Easy Cruise, puis a diversifié ses activités dans le marketing, la restauration et les chambres d’hôte.