Tony Lee Luen Len, président du Green Building Council : « La construction durable est une question fondamentale pour l’Afrique »
Maurice a accueilli la dernière édition de l’« Africa Green Building Summit » (AGBS), un événement dédié au développement durable. Tony Lee Luen Len, président du Green Building Council de Maurice (GBCM), initiateur de ce sommet, en dresse le bilan.
L’Eco austral : Quels principaux enseignements peut-on tirer de cette dernière édition de l’Africa Green Building Summit (AGBS) ?
Tony Lee Luen Len : Ce sommet a été un franc succès. Il a réuni 28 intervenants internationaux et locaux, 100 participants dont 20 venus de l’étranger. Nous avons pu assister à plusieurs présentations et ateliers de travail portant sur le métro vert, la culture et le patrimoine, le financement vert et les Smart City (villes intelligentes), entre autres. On peut tirer trois leçons de cette rencontre. Primo, il devient de plus en plus important de mettre l’humain au centre de tout développement, surtout en Afrique, où les impacts socio-économiques sont plus importants encore que les impacts environnementaux. Secundo, l’Afrique est encore loin de la Smart City de Dubaï qui a notoirement réduit son impact sur l’environnement avec son programme ambitieux de paperless government (bureaucratie sans papier), autrement dit la possibilité de faire ses démarches administratives sans bouger de chez soi. Les économies en matière de temps et d’énergie sont considérables ! Dubaï a même créé un Happiness Index (indice de bonheur) qui en dit beaucoup sur ses priorités. Tertio, les bâtiments net-zéro ou à énergie positive sont à notre portée. Il en existe déjà plusieurs à La Réunion. Encore une fois, nous devons nous inspirer de nos voisins.
Justement, pourquoi la problématique de la construction durable est-elle un thème important pour les pays africains ?
Cette question est fondamentale car on prévoit que l’Afrique aura, en 2050, 2,4 milliards de personnes. Parallèlement, en 2030, sa population urbaine aura atteint 350 millions d’habitants. Or 80 % des logements ne sont pas encore construits ! C’est donc à la fois un défi et une opportunité considérables. Nous pouvons surtout apprendre des erreurs des pays développés et faire (beaucoup) mieux. S’appuyer sur la construction durable est un bon outil pour soutenir la croissance économique en créant des emplois verts qui réduisent la pauvreté. Construire durablement, c’est aussi l’une des solutions clés au changement climatique.
Mais existe-t-il aujourd’hui un marché de la construction durable dans nos États ?
Le marché n’est pas encore mûr. Il y a beaucoup d’obstacles : un manque de professionnels, un manque de produits adaptés malgré, parfois, et paradoxalement, l’abondance de matériaux locaux renouvelables. Mais notre mouvement ne cesse de croître et surtout d’influencer. Nous collaborons avec des organisations comme UN Habitat, agence onusienne dont le but est de promouvoir des villes de développement durable, ou l’ICLEI (Conseil international pour les initiatives écologiques locales), association chargée de soutenir des projets de développement durable au niveau des communes, à travers la planète. Il y a une croissance du marché et plusieurs cadres légaux se mettent en place dans les différents pays africains.