La vanille malgache s’effondre à l’exportation
Deux mois après le début de la campagne d’exportation de la vanille commencée mi-novembre, Madagascar n’avait écoulé, fin janvier, que 150 tonnes de vanille Bourbon, contre 1 000 tonnes l’année précédente à la même période. À ce rythme, la filière vanille qui avait généré 590 millions de dollars en 2021-2022, pour 3 200 tonnes récoltées, pourrait bien en rapporter dix fois moins cette saison, en termes de rentrée de devises. Un problème de taille, sachant que la vanille figure en deuxième position, après le nickel, dans la liste des filières pourvoyeuses de devises.
Si cette contre-performance est à mettre en relation avec le ralentissement des échanges commerciaux sur fond de guerre russo-ukrainienne, pour les exportateurs elle est aussi la conséquence directe de la cherté du prix de vente minimum de la vanille gourmet, fixé depuis 2020 par l’État à 250 dollars le kilo. Ce prix est bien supérieur à ce que la concurrence propose et dissuade les acheteurs qui proviennent à 70 % du marché américain. Le risque au final est de faire perdre au pays sa position de premier producteur et exportateur mondial de vanille, au bénéfice notamment de l’Ouganda.
En réalité, sur le terrain, le prix officiel n’est presque jamais appliqué. Dans plus de la moitié des cas, quantité de fraudes, fausses déclarations et maquillages financiers ont lieu, conduisant à vendre la gousse à 180 dollars, plutôt qu’à 250 dollars le kilo. Ce phénomène en occasionne un autre, le non-rapatriement des devises vers le pays exportateur. Pour lutter contre ce marché parallèle, les pouvoirs publics ont décidé d’intensifier les contrôles sur les volumes de vanille attribués à chaque exportateur. Lors d’une réunion de tous les acteurs de la filière, notamment les 88 exportateurs agréés représentés par le Groupement des exportateurs de vanille, en février dernier au palais présidentiel d’Iavoloha, il a été décidé que désormais les quantités non vendues seront reprises par l’État et réattribuées à d’autres exportateurs agréés, cela afin de les avoir toujours sous contrôle. De même, une des conditions d’obtention de l’agrément d’exportation devient l’engagement à rapatrier les devises dans le pays.
Pour contrebalancer l’effet négatif des 250 dollars, les exportateurs sont toutefois autorisés à écouler désormais de la vanille dite cuts ou courte, vendue 140 dollars le kilo. Il s’agit de plus petites gousses (moins de 12 cm), récoltées plus tôt et présentant une teneur en vanilline plus faible que la Bourbon. Principalement destinée au marché américain, la vanille cuts est essentiellement utilisée pour la fabrication industrielle de poudre de vanille. Elle pourrait être le moyen de contrecarrer le développement de la vanille artificielle qui se présente, à terme, comme le principal danger pesant sur la vanille malgache.