Eco Austral – Actualités économiques et entreprises de l'Océan Indien

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STÉPHANE HENRY, DIRECTEUR DE GAVEKAL WEALTH (MAURICE) : « Nous sommes dans une décennie inflationniste »

L’Éco austral  : Comment analysez-vous le contexte économique et géopolitique mondial et ses perspectives ?

Stéphane Henry : Nous sommes dans une décennie inflationniste. Au cours des trente dernières années, l’inflation aux États-Unis et en Europe avait comme plafond le taux de 2 %. Aujourd’hui, 2 % est le plancher, ce qui veut dire que les taux d’intérêt vont rester élevés pendant plusieurs années. Les obligations, qui avaient précédemment une corrélation négative avec les actions et servaient à protéger les portefeuilles, ne jouent plus ce rôle.

De 1990 à 2019, les pays développés ont fait le choix d’une inflation basse, en achetant le moins cher possible en Chine, afin de protéger le pouvoir d’achat des consommateurs américains et européens. Ceci au détriment du taux de chômage, qui était relativement élevé, notamment en France.

En 2019, les États-Unis ont commencé à prendre des sanctions majeures envers la Chine et tentent depuis de reinternaliser certaines productions stratégiques, telles que les semi-conducteurs. Depuis deux ans, la guerre en Ukraine a modifié les chaînes d’approvisionnement énergétiques et, comme le dit Charles Gave, l’économie, c’est de l’énergie transformée, donc payer l’énergie plus chère ne peut qu’avoir des conséquences inflationnistes.

Milton Friedman disait que « l’inflation est toujours et partout un phénomène monétaire ». Financer les déficits par la planche à billets, comme le font les États-Unis et l’Europe, ne peut que générer de l’inflation.

Peut-on identifier des opportunités d’investissement, dans quels types de produits et dans quelles parties du monde ?

Les dettes colossales cumulées par les États-Unis et plusieurs pays européens, dont notamment la France, ne peuvent qu’être temporairement solutionnées par l’émission gargantuesque de dette par la FED et la BCE. Notre conclusion est que, dans ce contexte, l’or, dont l’offre ne dépend que de l’extraction minière, est un meilleur investissement que les monnaies fiat comme le dollar et l’euro, qui sont sujettes aux folies de nos gouvernants.

Concernant les actions, je vais commencer par deux constats : les États-Unis représentent 4 % de la population mondiale, 19 % du PIB mondial mais 70 % de la capitalisation boursière mondiale. Nvidia, qui produit des semi-conducteurs et fait partie des « Magnificent 7 » (sept actions américaines du secteur technologique très populaires auprès des investisseurs – NDLR), réalise un peu plus de 50 milliards de dollars de chiffre d’affaires annuel. Sa capitalisation boursière est de 1 700 milliards de dollars, soit plus de 30 fois son chiffre d’affaires. Nvidia a quatre fois la capitalisation boursière du champion européen LVMH.

Nous sommes par contre favorables aux investissements en actions dans les pays émergents, beaucoup moins chères que les actions américaines. Nous sommes conscients que cela nous a desservis ces dernières années, mais il nous semble que l’histoire boursière se répète, avec beaucoup de similitudes avec le premier trimestre 2000, l’année 2000 ayant vu un effondrement de 39 % du Nasdaq. À moins que ce soit le dollar qui vacille, auquel cas les actions américaines continueraient à monter.

Traditionnellement, les gestionnaires de patrimoine prônaient une diversification pour « ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier ». Certains ne sont plus d’accord avec ce principe. Qu’en pensez-vous ?

Jusqu’à 2021, diversifier voulait dire investir en obligations long terme pour se protéger d’une baisse éventuelle des actions. Aujourd’hui, comme je l’ai mentionné plus haut, il vaut mieux diversifier en achetant de l’or plutôt que des obligations. Les obligations court terme, quand elles rapportent plus de 4 %, ont aussi de l’intérêt.

On dit que plus la prise de risque est importante, plus le gain peut être important. Est-ce qu’il existe un juste équilibre  ? Quels conseils pouvez-vous donner ?

Mon premier conseil est pour les jeunes : Investissez le plus tôt possible, dès que vous commencez à travailler !

Mon deuxième conseil est toujours pour les jeunes, et certains moins jeunes : Attention aux cryptos ! L’appât du gain est souvent une mauvaise idée. Même le bitcoin, la crypto la mieux organisée, ne deviendra jamais une réserve de valeur acceptée par la majorité des gouvernements. Sans parler du blanchiment d’argent qui passe par les cryptos.

Mon troisième conseil est pour tout le monde : Investissez dans des actifs que vous comprenez et non pas parce qu’un conseiller financier, expression qui veut dire vendeur, vous démontre que c’est le nouvel Eldorado !

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