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Yannick Lauri : « Bientôt deux thoniers senneurs-surgélateurs sous pavillon mauricien »

Une grande première pour Maurice qui a accordé à l’armateur réunionnais l’immatriculation de cinq bateaux dont le premier sera baptisé le 30 août prochain à Hô-Chi-Minh-Ville, sur le chantier naval du groupe français Piriou.

L’Eco austral : Vous développez votre activité industrielle à Maurice avec, depuis 2008, une première usine en joint-venture avec IBL, puis maintenant une deuxième qui vous appartient à 100% et sera inaugurée le 22 novembre. Cette activité ne pouvait-elle pas se faire à La Réunion où vos bateaux étaient basés ?

Yannick Lauri : Cette activité de valorisation a été imaginée au départ pour La Réunion, mais cela n’a pas été possible malgré l’intervention de différents acteurs de l’administration. C’est un peu le même le problème que pour le chantier naval CNOI. Nous n’avons pas pu avoir l’espace bord à quai qu’il nous fallait. Il s’agit de traiter du thon à – 40°C et il ne peut y avoir aucune rupture de la chaîne de froid. L’HACCP (1) nous y oblige. On ne nous a rien proposé de satisfaisant et les études pour l’agencement de la darse de pêche sont toujours en cours depuis cinq ans. Il faut savoir aussi que La Réunion n’a jamais été un port thonier, au contraire de Maurice qui a deux usines de process traitant chacune à peu près 50 000 tonnes. La Réunion a toujours refusé les senneurs (2). Le Comité régional des pêches et la Région voulaient plutôt des palangriers (2). Il y a un manque d’expertise dans la connaissance du thon. Récemment, alors qu’un bateau avait été appréhendé en train de pêcher illégalement et qu’il a fallu faire un inventaire de ce qu’il y avait à bord, on a eu du mal à trouver un spécialiste.

Vous avez prévu également d’immatriculer des senneurs-surgélateurs sous pavillon mauriciens. Est-ce la même raison que pour l’activité industrielle ?

Nous avons cinq bateaux de ce type (3) dont deux immatriculés à La Réunion et trois à Mayotte. Mais nous ne pouvions plus immatriculer parce que la France n’a plus de plan de développement dans le cadre de la Commission thonière de l’océan Indien. Maurice, au contraire, dispose d’un plan qui n’a pas encore été utilisé. C’est pourquoi nous avons pu y obtenir l’immatriculation de cinq nouveaux navires.

Quand seront-ils en service ?

Deux bateaux sont en construction au Vietnam, le baptême du premier se fera le 30 août prochain et ce sera l’épouse du ministre mauricien de la Pêche, Nicolas Von Mally, qui en sera la marraine. Ce navire mettra en – suite le cap sur l’île Maurice pour quinze jours de route. Le baptême du deuxième bateau est programmé pour le 28 novembre. Quant aux trois autres, ils n’ont pas encore été commandés et ils devraient être plus petits (79 mètres au lieu de 90 mètres) afin d’être adaptés à tous les océans.

Quel investissement représente un senneur-surgélateur ?

Les deux bateaux qui vont être livrés prochainement au Vietnam représentent chacun un investissement de 25 millions d’euros. Et votre deuxième usine à Maurice ? 4 millions d’euros. En août 2012, une holding a vu le jour à Singapour et elle coiffe désormais les trois centres d’activité : La Réunion, pour la pêche à la langouste et à la légine dans les TAAF (Terres australes et antarctiques françaises), Maurice et bientôt l’Asie.

Il semble que ce soit sur ce continent que se fera votre développement futur ?

Nos clients se situent déjà, pour une bonne part, en Asie. Et Jacques de Chateauvieux, président du conseil d’administration, a bien souligné lors de notre assemblée générale, le 21 mai, que le moteur de notre croissance serait l’expansion des classes moyennes sur ce continent. En ce qui concerne nos opérations de pêche et de valorisation, c’est l’océan Pacifique qui sera notre « troisième zone ». À l’horizon 2015-2018, nous y aurons une flotte composée de dix thoniers senneurs-surgélateurs et une usine de transformation basée en Papouasie-Nouvelle- Guinée.

Jacques de Chateauvieux, actionnaire majoritaire à travers sa holding familiale Jaccar, a aussi parlé d’une certaine anémie des bourses en Europe et de l’intérêt de trouver des places plus dynamiques. Faut-il s’attendre à une introduction sur la bourse de Singapour ?

À terme, la question sera de savoir si, avec un volant de flottant de 5% à 10%, il est utile de rester sur la bourse de Paris. Nous y sommes en tout cas jusqu’en 2015. Quant à la bourse de Singapour, aucun choix n’a encore été arrêté, mais ce serait logique puisque le holding y siège.

 

(1) HACCP : Hazard Analysis Critical Control Point, méthode et principes de gestion de la sécurité sanitaire des aliments.

(2) Senneur et palangrier : leur nom vient de leur technique de pêche, à la senne (filet traîné sur les fonds sableux) pour le senneur et à la palangre (longue ligne avec des hameçons) pour le palangrier.

(3) Des bateaux de 90 mètres qui surgèlent à – 40°C.