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Madagascar

Bilan mitigé pour le XVIe sommet de la Francophonie

La grand-messe de la Francophonie s’est tenue pour la première fois à Madagascar, les 26 et 27 novembre, consacrant le retour de la Grande île dans le concert des nations. Une réussite en matière d’organisation. Mais ce XVIe Sommet a été quelque peu boudé par les chefs d’État et de gouvernement.

Le président malgache Hery Rajaonarimampianina tenait à ce Sommet qui représentait un véritable challenge pour son pays. Et il peut s’estimer satisfait alors que, quelques mois avant le rendez-vous, des rumeurs évoquaient encore un « plan B » au Canada ou en Suisse. Il faut reconnaître que Madagascar a dû quelque peu « bricoler » pour tenir ses engagements. Des infrastructures prévues n’ont pas pu être terminées à temps, comme le bâtiment central du village de la Francophonie. Des doutes planaient également sur la capacité de l’aéroport d’Ivato à gérer l’afflux important d’appareils durant l’événement. Mais tout s’est finalement bien passé et le Centre de conférences international a pu accueillir sans problème les activités officielles. 
 

Au côté du président malgache, le président français François Hollande, considéré comme l’artisan de la désignation de Michaëlle Jean au poste de secrétaire général de l’OIF lors du Sommet de Dakar en 2014. Fireflies/OIF
Au côté du président malgache, le président français François Hollande, considéré comme l’artisan de la désignation de Michaëlle Jean au poste de secrétaire général de l’OIF lors du Sommet de Dakar en 2014. Fireflies/OIF

LE RETOUR DE MADAGASCAR SUR LA SCÈNE INTERNATIONALE

Une réussite chaleureusement saluée par Michaëlle Jean, secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). « Je tiens à saluer les autorités malgaches et plus particulièrement le peuple malgache pour la tenue d’un Sommet non seulement réussi mais, à bien des égards, exceptionnel. » Même discours chez les chefs d’État qui ont fait le déplacement. Il convient de noter que le président malgache jouait gros avec l’accueil de ce Sommet. Pour rappel, Madagascar avait été choisie pour abriter l’édition 2010, mais l’organi-sation lui avait été retirée suite aux événements politiques et notamment au coup d’État perpétré par Andry Rajoelina. Un coup d’État qui a valu à la Grande île d’être mise au ban de la communauté internationale. C’est donc sa crédibilité que Hery Rajaonarimampianina jouait les 26 et 27 novembre derniers. Et il a remporté son pari, d’autant plus que la présence des anciens présidents Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina, les opposants les plus en vue, a donné l’image d’un semblant de stabilité politique. Ce Sommet a donc confirmé le retour de Madagascar sur la scène internationale. 

DE GRANDS ABSENTS

La grand-messe de la Francophonie n’a pas fait le plein auprès des chefs de gouvernement et d’État dont seulement une vingtaine ont fait le déplacement à Tananarive. C’est nettement moins que lors du précédent sommet, organisé à Dakar en 2014. Mais il faut dire qu’il fallait alors désigner le successeur d’Abdou Diouf au poste de secrétaire général et que le suspense régnait avec plusieurs candidats en lice. À Tananarive, on tablait sur une trentaine de chefs d’État et de gouvernement sur les 80 pays membres. Le président ivoirien Alassane Ouattara, le Béninois Patrice Talon, le Guinéen Alpha Condé, le Togolais Faure Gnassingbé et le Camerounais Paul Biya étaient attendus mais ne sont pas venus. Quant au roi du Maroc Mohammed VI, son absence a été particulièrement remarquée car il se trouvait sur le sol malgache quelques jours avant l’événement, à la tête d’une imposante délégation (voir notre encadré à ce sujet). En clôture du Sommet, Michaelle Jean a indiqué, avec un certain humour, que « ceux qui n’ont pas pu venir avaient de bonnes raisons et ceux qui sont venus l’ont fait en pleine possession de leurs moyens ». 
 

Michaëlle Jean, secrétaire générale de l’Organisation international de la Francophonie (OIF) et Hery Rajaonarimampianina, président de la République de Madagascar qui accueillait pour la première fois ce Sommet. (Photo Fireflies-OIF)
Michaëlle Jean, secrétaire générale de l’Organisation international de la Francophonie (OIF) et Hery Rajaonarimampianina, président de la République de Madagascar qui accueillait pour la première fois ce Sommet. (Photo Fireflies-OIF)
 

LES RETOMBÉES POUR MADAGASCAR

Le président Hery Rajaonarimampianina n’a cessé de répéter, avant sa tenue, que ce rendez-vous allait être bénéfique en attirant l’attention sur Madagascar. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il a décidé de reporter après le Sommet la Conférence des bailleurs et des investisseurs (CBI). Une tactique payante puisque le montant promis – 6 milliards d’euros – est le double de ce qui était escompté. 
Le secteur privé de son côté lorgne sur le potentiel économique de l’espace francophone qui représente 14% de la population mondiale et 20% des échanges mondiaux de marchandises. Michaelle Jean met en avant le partage d’expérience entre les pays membres en matière de ressources, qu’elles soient financières, humaines ou techniques. La secrétaire générale évoque ainsi la mise en réseau des petites et moyennes entreprises. Par ailleurs, Madagascar a signé des accords bilatéraux en marge du Sommet, à commencer par les 22 accords signés avec le Maroc qui touchent plusieurs secteurs. La France a également conclu six accords de financement d’un montant total de 61,8 millions d’euros. Enfin, un mémorandum sur le commerce du riz a été signé entre le Vietnam et Madagascar.

À SAVOIR
– Le XVIIe Sommet se déroulera en Arménie en 2018,
– Le XVIIIe Sommet se tiendra symboliquement en Tunisie en 2020 à l’occasion des 50 ans de l’OIF. En effet, l’homme fort de ce pays pendant trente ans, Habib Bourguiba, a été    l’un des pères fondateurs de la Francophonie.
– Le Sommet a validé la demande d’adhésion de quatre nouveaux membres : La Nouvelle Calédonie, l’Argentine, la Corée du Sud et la province canadienne de l’Ontario. En revanche, la candidature de l’Arabie Saoudite a été rejetée.
LES RÉSOLUTIONS DE TANANARIVE
Sur les situations de crise, de sortie de crise et de consolidation de la paix dans l’espace francophone ;
Sur la création d’une entité au sein de l’OIF pour la promotion de l’égalité femme-homme, des droits et de l’autonomisation des femmes et des filles ;
Sur la prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violent pouvant conduire au terrorisme ;
Sur la formation professionnelle et technique ;
Sur l’énergie propre et durable pour tous en Afrique ;
Sur la promotion de la diversité linguistique ;
Sur les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés ;
Sur la décentralisation et le développement local ;
Sur l’eau, la paix et la sécurité ;
Sur la promotion du dialogue des cultures en tant que facteur de développement durable ;
Sur l’investissement dans le secteur de la santé pour soutenir la croissance partagée dans l’espace francophone ;
Sur la sécurité routière ;
Sur l’économie bleue.
Sheraton
Hery Zo Rakotondramanana

LE SHERATON CONTRAINT D’OUVRIR SANS SHERATON
Annoncée au mois d’août dernier en tant qu’exploitant de l’hôtel 5 étoiles à Ivato, la grande marque de l’hôtellerie de luxe du groupe américain Starwood (qui vient d’être racheté par Marriott), se serait désistée. Il existerait en effet de nombreux points qui ne satisfont pas aux standards de Sheraton et qui ne pouvaient pas être corrigés avant la tenue du Sommet de la Francophonie. L’enseigne aurait ainsi décidé de ne pas procéder à l’ouverture de l’hôtel durant l’événement. Le gouver-nement malgache a réagi en décidant d’ouvrir l’établissement et de le faire fonctionner en confiant sa direction au dirigeant d’un grand hôtel de Tananarive, le service étant assuré par l’école de management hôtelier Vatel. La question se pose maintenant de savoir si le retrait de la marque américaine est temporaire ou définitif. Un quotidien malgache a avancé que le groupe avait été éjecté au profit d’une autre enseigne. 

De gauche à droite : Kako Nubukpo de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Philippe Arraou, président du Conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables de France et Sylvain Martinez, CISO (Chief Information Security Officer) de BIRGER. DR
De gauche à droite : Kako Nubukpo de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Philippe Arraou, président du Conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables de France et Sylvain Martinez, CISO (Chief Information Security Officer) de BIRGER. DR

BIRGER. AUX ASSISES DE LA FIDEF
En marge du Sommet de la Francophonie, la Fédération internationale des experts-comptables francophones (FIDEF) a organisé, les 25 et 26 octobre, ses XVIe Assises. C’est le président de Madagascar, Hery Ra-jaonarimampianina, lui-même expert-comptable qualifié, qui a ouvert ces rencontres. L’entreprise mauricienne BIRGER. y est intervenue sur les questions de cybersécurité. Son CISO (Chief Information Security Officer), Sylvain Martinez, a évoqué en particulier les principaux risques et les solutions pour se protéger contre les cyber attaques. Créée en 1981, la FIDEF réunit 36 pays francophones sur quatre continents, soit environ 100 000 experts-comptables. 

EN MARGE DU SOMMET : UNE FORTE DÉLÉGATION D’ENTREPRENEURS DU MAROC
Une quarantaine d’opérateurs économiques marocains, membres de la CGEM (Confédération générale des entreprises du Maroc), dont sa pré-sidente, Miriem Bensalah Chaqroun, ont rencontré le 20 novembre les membres du GEM (Groupement des entreprises de Madagascar). Il était question de renforcer des relations commerciales qui demeurent très modestes avec des exportations malgaches vers le Maroc qui s’élevaient en 2015 à 4,9 millions d’euros et des importations à 4,4 millions d’euros. Sachant que la CGEM pèse, à travers ses 88 000 membres, quelque 55% du PIB du Maroc et qu’elle représente 95% des PME de ce pays, on comprend mieux l’intérêt de cette rencontre pour les entrepreneurs malgaches. Les membres de la CGEM se sont ainsi déclarés ouverts à toutes les formes de partenariat, privé (avec des joint-venture) ou pu-blic-privé. « Il s’agit d’un engagement à réaliser des projets de co-dé-veloppement avec Madagascar », a souligné Miriem Bensalah Chaqroun. Njaratiana Rakotoniaina