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Réunion

BIENNALE INTERNATIONALE D’ARCHITECTURE TROPICALE : L’architecture comme outil-clé vers la transition climatique

« Accompagner la transition climatique dans les espaces tropicaux : pratiques architecturales, urbanistiques et paysagères innovantes ». C’était le thème de la Biennale Internationale d’architecture tropicale de La Réunion, qui s’est tenue au Port du 9 au 12 novembre. Des échanges très riches…

Organisée sur quatre jours, la Biennale internationale d’architecture tropicale a comporté trois jours de conférences au Port, au Kabardock et à l’école d’architecte, et une journée de visite de terrain. Rassemblant des professionnels et experts de nombreuses régions tropicales du monde, son objectif était d’examiner, de capitaliser et de transmettre les stratégies, les pratiques, les projets et les réalisations architecturales, urbanistiques et paysagères spécifiquement conçues et directement adaptées aux environnements tropicaux en vue d’y anticiper la transition climatique.

Face aux dérèglements actuels – changements climatiques, montée du niveau des mers, déforestation tropicale, pollution, érosion de la biodiversité, épuisement des ressources, pénurie d’eau potable -, les travaux proposés par les intervenants sous forme de communications et de posters se situaient au cœur de ces préoccupations et ont permis d’éclairer les pratiques architecturales, urbanistiques et paysagères à La Réunion et dans le bassin indianocéanique, locales, indo-océaniques, mais également dans les zones tempérées de plus en plus confrontées aux questions climatiques. L’océan Indien est un vaste bassin de plus 75 millions de km², situé en majeure partie dans la zone intertropicale, qui inclut aussi bien de petits territoires insulaires que de vastes pays bordiers, allant de l’Afrique du Sud à l’Australie en passant par le Mozambique et l’Inde.

Une vaste zone intertropicale

Ces pays, qui constituent le cadre de vie d’une part non négligeable de la population mondiale, sont aujourd’hui majoritairement urbanisés et posent, du point de vue de l’architecture et de l’urbanisme, des problématiques communes. L’aménagement des territoires, le développement des villes et de la construction, soumis au climat tropical plus ou moins chaud et humide, supposent des savoirs et savoir-faire architecturaux et urbanistiques spécifiques pour concevoir et produire des bâtiments et des quartiers faiblement consommateurs d’énergie, respectueux de l’environnement, proposant un cadre de vie de qualité dans ces contextes climatiques spécifiques.

Ainsi, il s’agit d’enrichir à la fois l’expertise des architectes, des urbanistes, des paysagistes exerçant dans les zones tropicales, majoritairement dans l’océan Indien, et confrontés, dans leurs pratiques, au changement climatique, tout en alimentant la recherche réunionnaise en la matière. Ces problématiques seront d’ailleurs développées au sein des programmes de formation proposés par l’École d’architecture de La Réunion, seul organisme français d’enseignement supérieur en architecture implanté dans l’océan Indien, au cœur du monde tropical.

Les ambitions de l’École d’architecture

Les invités d’honneurs de la Biennale internationale d’architecture tropicale de La Réunion, qui travaillent et étudient dans des zones tropicales hors océan Indien, ont réalisé des projets prestigieux et ont fourni des contributions de haut niveau.

L’appel à communications partait d’un constat partagé par une large majorité de spécialistes :

• Toutes les données aujourd’hui disponibles montrent que les températures ont augmenté au cours des dernières décennies et les scientifiques s’accordent sur le fait que cette hausse est principalement causée par les émissions de gaz liées aux activités humaines ;
• Les milieux tropicaux sont particulièrement concernés par l’état d’urgence climatique ;
• Les activités liées à la construction sont pour partie responsables de ces émissions de gaz à effet de serre ;
• Les architectes, les urbanistes et les paysagistes ont un rôle majeur à jouer en concevant des bâtiments et en aménageant le territoire de manière à limiter l’émission des gaz à effet de serre et ainsi accompagner la transition climatique.

L’École d’architecture de La Réunion a l’ambition de devenir une plateforme spécialisée en architecture, urbanisme et paysage dans les zones tropicales. Tant pour la formation (le domaine d’étude s’intitule : « Architecture, ville et territoire en milieu tropical ») que pour la recherche à La Réunion. La biennale s ‘inscrit dans cette perspective.

L’objectif est de pouvoir produire « sur place » des solutions originales adaptées aux environnements et aux sociétés tropicales à partir des expertises locales et plus généralement « des sud » pour ne plus être contraint d’ajuster des projets conçus « au nord », pour des environnements tempérés et des sociétés occidentales. Il s’agit également de donner un rôle actif aux habitants, comme usagers et citoyens, dans la définition et la réalisation de projets architecturaux et urbanistiques à partir de leurs besoins inscrits dans leurs environnements sociaux et culturels.

Les 16 communications présentées à la Biennale étaient regroupées en quatre thèmes qui constituaient les quatre sessions du colloque : « Aménager avec les acteurs », « Bâtir en milieu tropical », « Concevoir l’habitat en contexte tropical » et « Réaménager la ville tropicale ». Sur les 16 communications retenues, 7 portaient sur La Réunion, 2 sur Mayotte, 2 sur la Guyane, 1 sur la Martinique, 1 sur l’Australie, 1 sur l’Uruguay et 2 sur les espaces tropicaux en général.

Organisatrice de la biennale, l’École d’architecture de La Réunion, ouverte en 1988, est l’antenne de l’École nationale supérieure d’architecture de Montpellier (Ensam). ©Droits réservés

Matériaux locaux et innovations : La question de construire avec des matériaux locaux bio-sourcés a été abordée durant la Biennale, avec l’usage du bois en Australie et de la brique de terre compressée à Mayotte, de même que l’acceptabilité des populations. Des présentations de portée plus générale se sont penchées sur « une architecture tropicale résiliente face au changement climatique », les travaux d’architectes et d’urbanistes pionniers, « les prémisses de la transition climatique », mais également les moyens pour augmenter les économies d’énergie dans les espaces domestiques.

Invités d’honneurs et conférenciers :

VINCENT KITIO – Président de la Biennale, cet architecte est titulaire d’un doctorat en technologies appropriées aux bâtiments pour les pays tropicaux. Il dirige l’Unité énergie urbaine de l’ONU-Habitat, une section responsable de trois domaines prioritaires : l’accès universel à l’énergie pour les pauvres urbains et péri-urbains et l’efficacité énergétique dans l’environnement bâti et les technologies des énergies renouvelables en zones urbaines. Sa conférence d’ouverture s’intitulait : « Climat et habitat social en Afrique : enjeux et perspectives ; l’habitat social abordable comme double solution au déficit du logement et à la crise climatique. »

FRANCIS HALLÉ – Toutes les recherches de ce botaniste, biologiste et dendrologue ont été consacrées aux plantes tropicales, en particulier celles des forêts humides des basses altitudes autour de deux spécialités scientifiques : l’écologie des forêts tropicales et l’architecture de leurs arbres. Francis Hallé avait le rôle de « grand témoin » de la Biennale.

BRUNO STAGNO – Cet architecte Hon. FAIA, travaille à San-José, au Costa Rica. Intervenant sur « l’évolution vers une architecte tropicale », il a montré que la recherche effectuée sous la latitude tropicale est aujourd’hui structurante pour la stabilité climatique de la planète et pour atteindre les objectifs mondiaux en matière de développement durable.

JACQUES FERRIER – Cet architecte et urbaniste, diplômé de l’École d’architecture de Paris-Belleville et de l’École centrale de Paris, a créé son agence à Paris en 1993 et travaille depuis en France et à l’international. Ses projets s’inscrivent dans une même philosophie : concevoir une architecture et une ville pour une société créative et durable. Il s’est exprimé sur « la ville sensuelle pour dépasser l’infrastructure urbaine ».